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Article Publié : 9 décembre 2025 I Mis à jour : 12 décembre 2025

Le suivi de la biodiversité en France : un système en structuration

Article écrit par : Julie de Bouville et Nicolas Hette Troncart

Lecture : 5 min

La France dispose aujourd’hui d’une surveillance  de la biodiversité à la fois dense et fragmentée. Historiquement construit autour des obligations européennes — directives Oiseaux, Habitats, directives-cadres sur l’eau et stratégie pour les milieux marins —, il associe une pluralité d’acteurs publics, scientifiques, associatifs et, plus marginalement, privés. 

Un cadre national en consolidation 

La surveillance – dont l’état à la responsabilité – repose sur les grands établissements publics tels que l’OFB, le MNHN, les agences de l’eau ou l’Ifremer. Ces structures assurent le respect des engagements communautaires en matière de surveillance et alimentent les rapports transmis à la Commission européenne. 
Depuis 2024, le Schéma national de la surveillance de la biodiversité terrestre offre un cadre méthodologique pour harmoniser les protocoles et clarifier la répartition des rôles pour les milieux terrestres. L’enjeu est de passer de suivis hétérogènes et fragmentés entre territoires, à une production de données comparables, continues et pérennes — condition d’une gouvernance plus cohérente de la connaissance environnementale. 

 

Des acteurs multiples et complémentaires 

Pour les milieux terrestres, le secteur associatif, fort de son ancrage territorial, joue un rôle clé de producteur de données à travers les suivis naturalistes et les programmes de sciences participatives (LPO, SFEPM…). Ces contributions demeurent indispensables, mais leur intégration dans la surveillance reste inégale. 
Pour les associations de protection de la nature et plus largement tous les gestionnaires de biodiversité, participer à des protocoles communs permet d’évaluer l’efficacité de leurs actions locales en les situant dans un cadre national. 

Les entreprises produisent également des données via leurs obligations de suivi environnemental (séquence « éviter, réduire, compenser »). Ces informations, bancarisées via la plateforme Depobio, leur servent à évaluer leurs impacts et à documenter leurs engagements environnementaux. Ce diagnostic reste néanmoins à affiner s’il devait comparer par exemple les observations locales des entreprises aux tendances de la biodiversité issues de la surveillance nationale. L’adoption de protocoles de suivi harmonisés serait alors à définir pour alimenter la surveillance de la biodiversité. 

Les chercheurs, quant à eux, utilisent les suivis de la surveillance pour mieux comprendre les pressions exercées sur les écosystèmes et les effets du changement climatique. Quant aux citoyens, la participation à la collecte de données leur offre un moyen concret de s’impliquer dans la connaissance du vivant. 

 

Interopérabilité : un système en progrès 

Le Système d’information sur la biodiversité (SIB) est l’un des trois systèmes d’information fédérateurs aux côtés du SIE pour l’eau et du SIMM pour le milieu marin. 
Ces plateformes reposent sur des référentiels communs (comme TaxRef pour la taxonomie), garantissant une compatibilité croissante des données. 
Les enjeux concernent désormais la bancarisation, la validation et la diffusion des informations, dans un contexte où la technologie — IA, reconnaissance d’images, collecte mobile — facilite la massification sans remplacer l’expertise scientifique nécessaire à la qualification des données. 

 

Un service public sous tension 

La surveillance de la biodiversité française s’affirme comme un service public de la donnée, au service de plusieurs finalités :

  • le pilotage des politiques publiques ;
  • l’appui à la recherche ;
  • le suivi des actions locales ;
  • la transparence démocratique. 

Mais les moyens humains et financiers demeurent limités. Une large part du suivi terrestre repose sur le bénévolat associatif, un modèle fragile face aux besoins croissants d’harmonisation et de continuité. Les milieux ordinaires, les sols ou certains groupes d’espèces (pollinisateurs, champignons) restent insuffisamment couverts. 

 

Vers une approche plus intégrée 

Les nouvelles directives européennes, notamment celle sur la surveillance des sols, devraient élargir le champ des suivis. Mais les ambitions demeurent contraintes par les budgets et la priorité donnée aux obligations minimales. 
À terme, la cohérence du système dépendra de la capacité à mieux coordonner les acteurs, à ouvrir les données de manière encadrée et à reconnaître la biodiversité comme un bien commun nécessitant un investissement durable. 

 

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