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mai 2019  I  Article  I  FRB  I  Biodiversité et réglementation

Les régimes d’APA en vigueur en Outre-mer

Le Protocole de Nagoya précise l’article 15 de la Convention sur la diversité biologique (CDB) relatif à l’accès aux ressources génétiques et au partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation de ces ressources (APA). Il est entré en vigueur dans l’Union européenne le 12 octobre 2014. Chaque pays décide des règles d’accès à ses ressources génétiques. En France, les procédures d’accès se font auprès du ministère en charge de l’environnement. Le partage des avantages est établi entre le fournisseur et l’utilisateur et est matérialisé par un accord contractuel bilatéral (MAT).

Les régimes d’APA en vigueur en Outre-mer

Trois espaces et territoires étaient déjà dotés de règles d’APA avant l’adoption de la loi : le Parc amazonien de Guyane, la province sud de Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française.

La Guyane

Adoptée en 20061, une procédure d’APA encadrait l’accès et l’utilisation des ressources se situant dans le Parc amazonien de Guyane (PAG).

Les utilisateurs étaient soumis à la charte du PAG. Ils soumettaient une demande d’autorisation au Comité régional de coordination APA de la Collectivité territoriale de Guyane, accompagnée notamment du consentement préalable et éclairé des communautés concernées, des conditions d’utilisation et du contrat de partage des avantages.

Le Président de la Collectivité territoriale de Guyane délivrait l’autorisation au vu de l’avis du Comité régional de coordination APA et après consultation du PAG et des conseils consultatifs existants2.

 

Le dispositif du PAG est devenu caduc depuis le 1er janvier 2018. La procédure prévue par la loi constitue le seul régime d’APA applicable à l’ensemble de la Guyane. La collectivité territoriale de Guyane pourra demander d’exercer les fonctions d’autorité compétente si elle le souhaite et délivrer le cas échéant les autorisations pour les ressources la concernant. Il est utile de rappeler que des communautés d’habitants, au sens de la loi, sont présentes en Guyane et concernées par la procédure particulière d’accès et d’utilisation de leurs connaissances traditionnelles associées à des ressources génétiques. Le PAG est, à titre transitoire, désigné en tant que personne morale de droit public chargée d’organiser la consultation des communautés d’habitants détentrices de connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques.

 

Au vu de la forte implication des acteurs locaux et des attentes de la collectivité en matière d’APA, notamment le respect du code de bonne conduite et une bonne information, il est conseillé de contacter la collectivité territoriale avant le démarrage de nouvelles recherches quand bien même ces dernières se situent en dehors du PAG et que le régime d’APA national n’est pas encore consolidé (désignation des autorités compétentes en outre-mer le cas échéant). Il est utile de contacter également les représentants régionaux des établissements de recherche.

 

1. Loi no 2006-436 du 14 avril 2006 relative aux parcs nationaux, aux parcs naturels marins et aux parcs naturels régionaux.
2. Le Conseil scientifique et le Comité de vie locale du PAG, le Comité Scientifique Régional du Patrimoine Naturel de Guyane sur la collecte potentielle d’espèces protégées (CSRPN), le Conseil Economique, Social, et Environnemental régional de la Guyane (CESER) et le Conseil de la Culture, de l’Education et de l’Environnement (CCEE) regroupés aujourd’hui au Conseil Economique, Social, Environnemental, de la Culture et de l’Education de Guyane (CESE.CEG), et le Conseil Consultatif des Populations Amérindiennes et Buschinenge (CCPAB).

La Nouvelle-Calédonie

Chacune des trois provinces de Nouvelle-Calédonie est compétente en matière de gestion et de conservation des ressources naturelles et peut dès lors adopter un régime d’accès et de partage des avantages pour son territoire. Les trois provinces ont dorénavant prévu des mesures d’accès et ont exclu conjointement du champ d’application des mesures les usages domestiques, ainsi que les utilisations et échanges traditionnels par les communautés locales des ressources génétiques.

 

  • Province Nord

Les articles 310-1 à 316-1 du code de l’environnement de la province Nord prévoient trois régimes distincts en fonction de l’utilisation des ressources génétiques3.

    • Un régime de déclaration s’applique lorsque l’accès se fait à des fins de production locale et artisanale pour une utilisation et une vente en Nouvelle-Calédonie (article 312-1).
    • Lorsque l’accès et l’utilisation sont faits à des fins de production de connaissances scientifiques publiques sans objectif de développement commercial ou de protection par un régime de propriété intellectuelle, c’est un système d’autorisation simplifiée qui a vocation à s’appliquer. Ce régime ne peut néanmoins bénéficier qu’à des organismes publics de recherche ou d’enseignement (article 313-1). La demande doit préciser les modalités d’accès, les méthodes de collecte et le devenir et l’utilisation des ressources.
    • Enfin, un système d’autorisation encadre les autres cas d’accès et d’utilisation (article 314-1). La demande d’autorisation nécessite le versement de frais de dossier et doit contenir des justificatifs des droits d’accès aux terrains, l’intention d’exporter ou non la ressource et une description de l’utilisation projetée.

Certaines exceptions existent néanmoins, ces régimes pouvant par exemple être adaptés ou écartés lorsqu’une ressource est utilisée comme modèle biologique ou présente un enjeu ou risque particulier.

Le dispositif est également applicable pour toute nouvelle utilisation de ressources originaires de la province Nord et détenues dans une collection déjà constituée antérieurement ou postérieurement à l’entrée en vigueur de la réglementation.

Par ailleurs, il faut noter qu’en vertu d’un principe d’opposabilité réciproque, toutes les demandes d’accès issues de pays non parties au Protocole de Nagoya seront systématiquement rejetées.

 

Une convention de partage des avantages doit être conclue et ne peut contenir aucune clause d’exclusivité dans l’accès ou l’utilisation des ressources.

 

  • Province Sud

Les articles 311-1 à 313-3 du code de l’environnement de la province Sud ne règlementent que les récoltes in situ de ressources qui ne sont ni agricoles ni alimentaires4. Un système de déclaration préalable s’applique lors d’un accès à une ressource génétique sans objectif direct de développement commercial. En revanche, un utilisateur doit présenter une demande d’autorisation au Président de l’Assemblée de province lorsqu’un développement commercial est envisagé. Un utilisateur étranger est soumis à cette seconde procédure quelque soit l’utilisation envisagée.

 

Le formulaire de déclaration ou de demande d’autorisation comprend notamment l’autorisation écrite des propriétaires des terres sur lesquelles se situent les ressources convoitées, la description des activités envisagées et des méthodes de collecte, des éléments permettant d’évaluer l’impact sur la biodiversité de l’activité, ainsi qu’un calendrier prévisionnel de réalisation des activités.

Le formulaire de demande d’autorisation mentionne également l’intention de l’utilisateur d’exporter ou non la ressource et les propositions du demandeur en matière de partage des avantages.

Le formulaire de déclaration contient quant à lui l’engagement du déclarant de restituer à la direction en charge de l’environnement de la province Sud les informations et connaissances acquises à partir des ressources biologiques, génétiques et biochimiques prélevées sur son territoire.

 

Un utilisateur étranger ne peut obtenir d’autorisation sans l’avis préalable sur son projet d’un organisme de recherche public présent en Nouvelle-Calédonie. Ce dernier peut préciser qu’il est souhaitable que l’accès à la ressource se fasse dans le cadre d’une convention avec l’utilisateur étranger. Si un tel partenariat est établi, l’utilisateur est tenu d’accepter la participation des scientifiques affectés dans les organismes de recherches implantés en Nouvelle-Calédonie, dans l’objectif d’accroître la capacité scientifique locale.

 

La durée de validité de l’autorisation est fixée par le président de l’assemblée de province en fonction des activités envisagées.

Tout transfert à des tiers, par l’utilisateur, des ressources biologiques ou génétiques doit être déclaré à la direction en charge de l’environnement de la province Sud et s’accompagner du transfert de l’autorisation ou du récépissé de déclaration et des obligations afférentes.

Un changement d’utilisation, non prévu dans l’autorisation ou la déclaration, requiert une nouvelle demande d’autorisation ou une nouvelle déclaration.

 

L’autorisation d’accès ne vaut pas autorisation d’exportation (article 312-8). Cette dernière doit par conséquent être obtenue séparément.

 

  • Province des Îles Loyauté

Les articles 311-1 à 314-4 du Code de l’environnement de la Province des Iles Loyauté prévoient un régime d’autorisation préalable d’accès délivré par arrêté du président de l’assemblée de province dans un délai maximum de trois mois après le dépôt du dossier et pour une durée d’un an, renouvelable.5 

 

Le consentement préalable en connaissance de cause des autorités coutumières ou propriétaires fonciers, concernés par le prélèvement des ressources, doit être recueilli. Ceux-ci peuvent conditionner l’accès à une contrepartie non monétaire telle que des actions de formation ou de restitution.

 

La demande d’autorisation (articles 312-1 à 312-10) doit comporter :

    • L’engagement de l’utilisateur à être accompagné sur le terrain d’un guide désigné par les services provinciaux et rétribué par l’utilisateur.
    • L’engagement de l’utilisateur à conclure ultérieurement un contrat de partage des avantages.
    • Une mention de l’intention de l’utilisateur de transférer ou non les ressources récoltées, les méthodes et lieux de collecte, la spécification de l’utilisation de ces ressources ainsi que, le cas échéant, l’utilisation d’un savoir traditionnel associé à celles-ci.

 

Un utilisateur étranger est obligé d’associer dans son projet un organisme de recherche présent en Nouvelle-Calédonie. Une convention prévoyant les modalités de partenariat doit ainsi être établie.

 

L’utilisateur est soumis à certaines obligations :

    • Fournir une information continue par la remise de rapports d’activité et de rapports de résultats selon une période fixée par les parties (article 313-4) ;
    • Obtenir l’autorisation préalable des autorités provinciales et du fournisseur de la ressource avant la publication des données issues des recherches sur les ressources concernées (article 313-4) ;
    • Obtenir le consentement préalable du président de l’assemblée de province en cas de cession des résultats de recherche à une entreprise commerciale (article 313-4). Dans un tel cas, un nouveau contrat accessoire de partage des avantages sera conclu.
    • Le président de l’assemblée de province peut imposer à l’utilisateur un état du site avant prélèvement ou la production d’une étude ou d’une notice d’impact sur l’environnement (article 312-7).

 

Toute demande de renouvellement d’une autorisation doit être effectuée au moins trois mois avant l’expiration de l’autorisation en cours de validité. L’autorisation d’accès ne vaut pas autorisation d’exportation (articles 312-6). Il est ainsi nécessaire d’obtenir en outre une autorisation d’exportation.

 

Un contrat organise le partage des avantages monétaires ou non monétaires. La Province des Iles Loyauté a créé à cet effet, un fonds pour les générations futures qui reçoit les avantages monétaires perçus (article 313-6). Ce fonds est géré conjointement par les autorités provinciales, les autorités coutumières et les propriétaires fonciers. Le fonds a vocation à financer des mesures privilégiant le bien-être des populations locales et la préservation de la biodiversité, après avis du comité de protection de l’environnement de la province.

 

Les trois provinces ont e prévu certaines obligations communes pour les utilisateurs :

    • Ceux-ci doivent établir au terme de l’autorisation un rapport de récolte détaillé, et faire parvenir au président de l’assemblée de province toutes les publications éventuelles sur la ressource collectée ;
    • En outre, le président de l’assemblée de province peut leur imposer la remise ou la présentation d’un échantillon de chaque espèce prélevée dans un délai d’un mois après la publication de la description de l’espèce, sous peine de révocation de l’autorisation.

 

Tout manquement à ces réglementations peut être sanctionné.

La Polynésie française

La Polynésie française, compétente en matière de ressources naturelles, a adopté un dispositif d’accès aux ressources biologiques et de partage des avantages (articles LP 3411-1 à LP 3432-3 du code de l’environnement6). 

 

Un régime d’autorisation préalable s’applique pour tout accès et utilisation de ressources biologiques et/ou de connaissances traditionnelles associées.

    • Pour un accès à des ressources biologiques, l’utilisateur doit obtenir et joindre à la demande d’accès l’accord du ou des propriétaires du site dans lequel se trouve la ressource pour pouvoir pénétrer sur ce site et réaliser la collecte de la ressource (art. LP 3412-2).
    • Concernant les connaissances traditionnelles, la demande d’autorisation comprend notamment la source des CTA et l’accord préalable du détenteur des connaissances (qui peut être la Polynésie elle-même).

Dans les deux cas, le demandeur doit également joindre le contrat de partage des avantages.

 

L’accès aux ressources biologiques ou aux CTA est accordé par un arrêté pris en conseil des ministres, sur proposition du ministre en charge de l’environnement et après avis du ministre en charge de la recherche et de tout autre ministre concerné (art. 3412-1). L’autorisation délivrée n’est pas cessible à un tiers. Tout manquement peut être sanctionné.

 

L’autorisation d’accès ne vaut pas autorisation d’exportation (art. LP 3421-1). Il est donc nécessaire d’obtenir en outre une autorisation d’exportation.

 

Le partage des avantages intervient à la fois entre l’utilisateur et le propriétaire du terrain et/ou le détenteur des CTA et entre l’utilisateur et la Polynésie.
Tout utilisateur est soumis à une obligation d’information continue et doit ainsi remettre des rapports d’activité et des rapports de résultats selon une périodicité fixée par les parties.

 

6. Accessible à l’adresse suivante : http://lexpol.cloud.pf/LexpolAfficheTexte.php?texte=503933
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