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Cultiver la biodiversité pour récolter des denrées alimentaires, la sécurité alimentaire et la durabilité

Dans un contexte agricole et alimentaire tendu, la transition du système alimentaire vers des processus et pratiques plus soutenables est souvent remise en question. Une série de découvertes en écologie et en agriculture suggère que la biodiversité, tant spécifique que génétique, peut aider à résoudre les problèmes de durabilité auxquels est confrontée l’agriculture intensive moderne. De la parcelle au pays, cette étude démontre les avantages apportés par une diversification des cultures (variétale, spécifique, paysagère) par rapport à l’agriculture intensive conventionnelle

 

La modernisation de l’agriculture a entraîné une réduction de la diversité génétique des espèces utilisées. Celle-ci est pourtant la clé pour une agriculture plus adaptée au changement climatique, à une nutrition plus équilibrée, à des pratiques plus durables pour l’environnement et la santé humaine. Cette diversification permet des rendements plus élevés et plus stables, un moindre recours aux engrais et aux pesticides, un besoin moins important en terres cultivables et des apports nutritionnels plus équilibrés.

 

 

Les messages-clés de la publication

 

La sélection moderne  favorisé l’uniformité pour une productivité maximale en monoculture, elle a ainsi délaissé les caractères permettant à des espèces ou variétés de coexister. La production alimentaire mondiale est dominée par quelques espèces dont l’effondrement serait catastrophique pour la sécurité alimentaire, en plus des impacts environnementaux et sanitaires que leur culture entraîne.  Face à cette uniformisation, que retenir de la diversification des cultures

 

  • La diversification des cultures dans l’espace et dans le temps (rotations, cultures de couvertures, intercalaires, pièges ou répulsives, paysages) a le potentiel d’augmenter considérablement la stabilité, la sécurité et la fiabilité de la production alimentaire, tout en réduisant les risques de pollutions (moindre utilisation d’engrais et de pesticides) et les risques pour la santé humaine (pollutions, régimes alimentaires). 

 

  • Comparé aux autres solutions la diversité des espèces cultivées présente l’effet le plus important pour stabiliser la production. Vient ensuite l’irrigation. La fertilisation, quant à elle, n’a pas démontré d’effet significatif sur la stabilité des rendements. 

 

  • De très nombreux travaux démontrent les avantages de cette diversification des cultures : stabilité de la production, meilleure nutrition, réduction du besoin de nouvelles terres cultivables, amélioration de la fertilité des sols, renforcement du biocontrôle sur ravageurs, moindre recours aux pesticides et engrais, meilleurs rendements, gain de productivité beaucoup plus rapides que la sélection génétique conventionnelle, etc. et meilleure compétitivité par rapport aux monocultures.  

 

  • Toutefois cette diversification est limitée à cause d’un manque d’investissements. Il semble donc important de faciliter la formation des agriculteurs, poursuivre la recherche sur les meilleures combinaisons spécifiques et variétales et les meilleures échelles spatio-temporelles et proposer de nouvelles machines agricoles adaptées à cette diversité. 

 

 

[actualité] Événement de lancement du programme de recherche scientifique sur les certificats de biodiversité

La plupart des experts de la biodiversité et de la conservation tels que les praticiens de l’écologie scientifique, académiques ou de la société civile, estiment savoir pour un endroit donné, quelles actions sont plus ou moins favorables à la biodiversité, suggérant qu’ils sont capables d’associer ces actions à un gain attendu de biodiversité. Nous faisons l’hypothèse que l’on peut ainsi quantifier le gain attendu de la mise en place de ces actions en s’appuyant sur le consensus entre experts.

 

Afin de tester la pertinence de cette hypothèse, le Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN), la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) et Carbone 4 collaborent pour « Mesurer l’efficacité des actions favorables à la biodiversité par consensus d’experts ».

 

Rendez-vous à la soirée de lancement du Programme de recherche scientifique
sur les certificats de biodiversité

 

Le mardi 28 novembre 2024
De 17h30 à 20h30

 

Dans l’amphithéâtre Verniquet au Jardin des Plantes
du Muséum national d’Histoire naturelle

 

+ d’infos et inscription :
robin.almansa@fondationbiodiversite.fr

 

 

Ce projet a pour ambition de mettre au point et livrer :

  • une méthodologie pour remplir, pour un socio-écosystème donné, la grille des pratiques favorables à la biodiversité associées aux gains biodiversité évalués par consensus d’experts ;
  • le système d’information associé : une plateforme numérique de recueil de consensus et système de gestion de bases de données ;
  • des recommandations sur l’actualisation et l’utilisation d’une telle grille pour différents contextes ;
  • la grille remplie pour deux socio-écosystèmes tests d’Europe occidentale : terres arables et polyculture-élevage ; forêt exploitée.

 

 

Le rôle de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité dans ce programme sera de mobiliser l’expertise scientifique afin d’évaluer l’effet de pratiques sur la biodiversité dans le cadre des écosystèmes agricoles et forestiers tempérés. Les résultats de ce projet ont vocation à être diffusés largement pour inciter à mettre en œuvre la méthode dans d’autres contextes, pour d’autres écosystèmes.

 

 

[Actualité] Atelier de travail désertification, climat, biodiversité : Le rôle des terres dans l’agenda du développement durable

Les trois conventions environnement (sur la diversité biologique, le changement climatique et la lutte contre la désertification) abordent la question des terres avec des prismes qui peuvent masquer des effets délétères indirects, car elles sont basées sur des « séparations scientifiques », des silos politiques. L’enjeu est grand, car aujourd’hui 25 % des éco régions ont moins d’1 % d’intégrité écologique et 65 % ont moins de 5 % d’intégrité écologique. Par ailleurs, la conscience politique du problème progresse : les États Parties de la convention des Nations unis sur la désertification ont signalé qu’un cinquième de toutes les terres, soit plus de 2 milliards d’hectares, est désormais considéré comme dégradé. Si cette dégradation se poursuit à un rythme similaire, il y aura près d’un milliard d’hectares supplémentaires de terres dégradées d’ici à 2030, ce qui équivaut au total mondial des engagements actuels de restauration des pays.

 

L’atelier organisé, avec le soutien du Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères (MEAE), Ministère de la Transition écologique (MTE), Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (Mesr), de l’AFD et de Montpellier Méditerranée Métropole, par le Comité scientifique Français de la Désertification, avait pour objectifs de discuter de cette question des terres avec les membres de l’interface science politique (SPI) de la Convention sur la désertification, des experts impliqués dans les travaux du Giec et de l’Ipbes, des décideurs politiques, des ONG, des étudiants et des chercheurs.

 

Hélène Soubelet, directrice de la FRB, en tant que membre du Comité français sur la désertification, a participé à cette journée en organisant et animant la table ronde sur les cadres, visions communes, les complémentarités et les dissenssus entre les trois interfaces politiques en appui des Conventions climat, biodiversité et désertification. Nichole Barger, co-présidente de l’interface science politique sur la désertification, Youba Sokona, co-auteur de plusieurs rapports du Giec et vice-président du sixième cycle et Fabrice de Clerck, co-auteur de plusieurs évaluations Ipbes, ont échangé sur deux aspects : les messages clés de ces instances relatifs aux terres et les outils et solutions pour préserver, restaurer, utiliser durablement les terres.

 

 

Les éléments principaux de la table ronde sont d’une part que l’objectif de neutralité de la dégradation des terres ne pourra être obtenue qu’en prenant en considération les besoins des populations locales et leurs valeurs différentes. De part et d’autre du spectre, certains considérant la terre comme faisant partie de leur famille, de leurs amis, et de l’autre, certains considérant les terres comme un substrat inerte utilisable sans limite par leurs propriétaires ou leurs gestionnaires.

 

Donner des alternatives, en particulier pour le secteur le plus impactant, l’agriculture qui porte en son sein des problèmes, lorsqu’elle est focalisée sur les rendements et des solutions, lorsqu’elle considère plusieurs enjeux, comme la production de nourriture, la santé humaine, le stockage du carbone, la préservation de la ressource en eau. Le type d’écosystème le plus grand au niveau mondial sont les agrosystèmes. Il faut donc impérativement se saisir des pratiques agricoles.

 

La question des compromis entre les droits individuels à l’échelle locale et les droits collectifs à l’échelle globale doit également être traitée. Les conventions, les connaissances scientifiques peuvent arriver à des consensus sur des objectifs globaux : restaurer 30 % de la nature, préserver 50 % de la biosphère, changer de régime alimentaire.

 

À travers une approche ARTistique un cadre d’action peut être proposé :

 

A : Avoid degradation (éviter la dégradation) ;

R : Restore intactness (restaurer l’intégrité) / Regenerate ecological fonctions (regénérer les fonctions écologiques) / Reduce pressure, pesticides, soil sealing, overconsomption (Réduire la pression, les pesticides, l’imperméabilisation des sols, la surconsommation) ;

T : Transforme socio-economical systems and socio-ecological systems (transformer les systèmes socio-économiques et socio-écologique).

 

 

Il est urgent que les trois conventions, qui travaillent sur des enjeux communs avec trois entrées différentes, se mettent à délivrer des messages communs qui seront plus faciles à intégrer sur les territoires. Une des clés serait peut-être de travailler sur des systèmes qui sont mieux connus des acteurs sur le terrain : l’alimentation, l’urbanisme, l’énergie, les infrastructures, plutôt que sur le système climatique, les écosystèmes, le management des terres.

 

La journée s’est poursuivie par des échanges puis des ateliers sur trois sujets dans la cadre de la préparation des futurs travaux de la convention sur la désertification : les systèmes d’utilisation durable des terres, les tempêtes de sable et de poussière et l’aridité (voir ci-dessous).

 

Utilisation durable des terres

La question foncière découle d’une vision instrumentale : ignorant ce qui relève des inégalités et des visions silencieuses, d’asymétrie de pouvoir.

 

La gouvernance est en effet une question socio politique, de contrôle territorial, de droit différentié, de gestion des conflits. Situation de blocage foncier, historique. Elle est le résultat des actions d’acteurs en position de pouvoir, quelle qu’en soit la source. Ceux qui ont intérêt à investir dans la restauration peuvent ne pas être ceux qui détiennent les droits sur les terres. Or les droits fonciers locaux peuvent être légitimes sans être légaux. La gestion décentralisée du foncier permet de redonner des droits aux populations locales.

 

La notion de neutralité est souvent méconnue ou ignorée au niveau local alors qu’elle est bien décryptée au niveau international. La neutralité n’est pas non plus un objectif des politiques sectorielles de l’agriculture, de l’énergie, de l’urbanisme etc.

 

Le facteur humain est une donnée complexe de l’équation avec des questions de genre, de droits humains, d’anthropologie, de populations autochtones et locales.

 

Il est sans doute plus efficace de s’intéresser aux communs qu’aux terres seules, sortir de la seule restauration, mais considérer l’évitement et la réduction des impacts. L’agroécologie offre une plus grande résistance aux aléas climatiques et devrait être mieux pris en compte par les travaux sur la désertification.

Tempêtes de sable et de poussière 
Certaines situations météorologiques génèrent des vents forts qui mobilisent les sables et les poussières des sols nus et secs (taux d’érosion des plus élevés) et les transfèrent via l’atmosphère sur des territoires éloignés, à distance des sources. Ce sont des évènements de très grande ampleur qui impactent les sols d’origine (perte de substrat), les sols d’arrivés (fertilisation), la santé des populations (pollution) et la société (moindre visibilité et donc ralentissement de certaines activités). Ces phénomènes ont donc des effets positifs et négatifs de transferts de matières d’un écosystème à un autre. Les activités humaines, en particulier agricoles, peuvent aggraver ces tempêtes en dégradant les sols, par exemple surpâturage ou surfaces cultivées.
Aridité

L’aridité est un phénomène long (contrairement à la sécheresse qui peut être ponctuelle). Elle a deux composantes, la demande de l’atmosphère et la disponibilité en eau. Avec des températures qui augmentent, la demande atmosphérique augmente, on estime que pour chaque degré de plus, l’humidité de l’air augmente de 7 %. Plusieurs phénomènes agissent en synergie ou en antagonisme. Lorsque le CO2 augmente, les plantes sont plus efficaces à capter l’eau, mais elles évapotranspirent plus. Par ailleurs, la température contrôle l’ouverture des stomates qui se ferment en condition chaude et donc captent moins de C02, ce qui diminue la photosynthèse, la production de sucres diminue, ce qui peut entrainer des mortalités. 

 

Les tendances futures montrent un assèchement (en particulier au sud de la France, aux USA, en Afrique du sud et à Madagascar). Le Sahel, le Sahara, l’Inde, l’Océanie présentent des tendances opposées. Il y a des régions où il existe des désaccords entre les modèles et les observations, lorsqu’il y a des problèmes dans les données, en particulier en Afrique. Les variabilités naturelles sont fortes. En Ethiopie, la variabilité naturelle a conduit à deux ans sans précipitation.

 

L’eau ne disparait pas, elle se déplace (Human caused long term changes in global aridity. Chai et al., 2021), la biodiversité, elle, disparait (Bar On, 2018).

 

À Propos

 

>> Le Conseil scientifique français sur la désertification (CSFD) a été créé en par les ministères chargés des affaires étrangères et de l’environnement afin d’apporter un appui scientifique et technique aux négociations internationales dans le cadre de la Convention sur la désertification.

+ d’infos

 

 

>> L’Interface science-politique (SPI) de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification a été créée en 2013. Elle est composée de scientifiques indépendants sélectionnés au niveau mondial, de scientifiques indépendants nommés au niveau régional, de décideurs politiques et d’observateurs. Le SPI s’efforce de traduire les données scientifiques actuelles en recommandations pertinentes pour les politiques. Il a par exemple défini le cadre scientifique de la Dégradation neutre des terres. Le SPI collabore avec d’autres groupes et organes scientifiques. Il procède également à l’évaluation d’autres évaluations scientifiques (Ipbes, Giec, ITPS). Son programme de travail est déterminé par le Comité de la science et de la technologie (CST) de la Convention.

+ d’infos 

 

 

 

Utilisation durable des espèces sauvages – Les principaux messages de l’évaluation Ipbes

Pêche, cueillette, observation : nombreuses sont les pratiques humaines à travers le monde en lien direct avec les espèces sauvages de plantes, d’animaux, de champignons et d’algues. Pour tendre vers des pratiques plus durables, 85 experts issus des sciences naturelles, humaines et sociales et 200 auteurs collaborateurs ont travaillé conjointement pendant 4 ans.

 

En s’appuyant sur plus de 6 200 sources provenant de la littérature scientifique et des savoirs autochtones et locaux, les auteurs proposent une analyse et des outils et identifient cinq catégories d’utilisation des espèces sauvages : la pêche, la cueillette, l’exploitation forestière, le prélèvement d’animaux terrestres et les pratiques non extractives. 

 

La FRB propose dans la brochure (téléchargeable dans les ressources ci-dessous) les principaux messages à retenir ainsi qu’une analyse critique de ce travail unique.

La prévention des invasions biologiques : un enjeu crucial pour l’environnement

En quoi consiste la prévention ?   

 

Elle vise à mettre en place des mesures de contrôle des importations aux frontières et de biosécurité pour limiter l’arrivée de nouvelle espèces exotiques et leur déplacement. Cela nécessite un cadre réglementaire et une surveillance biologique organisée du territoire. La surveillance doit se concentrer sur les points chauds d’introduction tels que les ports et les aéroports, les voies de communication, comme les routes ou les voies ferrées, qui constituent des corridors de dispersion. Une vigilance particulière doit aussi être portée aux espaces prioritaires, tels que les espaces naturels et les aires protégées abritant des espèces patrimoniales, endémiques ou en danger qui pourraient être menacées par ces espèces exotiques envahissantes.

 

 

Combien d’espèces arrivent sur le territoire ?   

 

D’après l’indicateur de l’observatoire national de la biodiversité, depuis 1983, un département de métropole compte en moyenne 11 espèces exotiques envahissantes de plus tous les dix ans. Le cas du frelon asiatique est emblématique. Détecté pour la première fois en 2004 en France, il a depuis colonisé presque toute l’Europe. Le coût de la lutte contre cette invasion en France se chiffre à plusieurs millions d’euros par an, et s’accroit avec le temps. L’éradication aurait été possible au début de l’installation de l’espèce. Aujourd’hui ce n’est plus envisageable, on est obligé de vivre avec.   

 

 

Y a-t-il régulièrement des alertes ?

 

La pression aux frontières est permanente. Il y a déjà eu plusieurs alertes nationales d’invasions biologiques potentielles. Entre 2019 et 2021, quatre nouvelles espèces exotiques d’écrevisses problématiques pour nos cours d’eau ont été découvertes en France. Originaires d’Amérique du Nord, elles ont sans doute été introduites accidentellement, mais on ne peut pas exclure des relâcher intentionnels. En 2022, la petite fourmi de feu ou fourmi électrique a été découverte à Toulon. Cette espèce originaire d’Amérique du Sud est l’une des cinq espèces de fourmis les plus envahissantes au monde. On peut supposer qu’elle est arrivée par des bateaux militaires ou par le commerce des plantes. Bien que nous parvenions à les identifier et les détecter, il y a encore peu de réponses efficaces face à ce problème.

 

 

Lorsque l’espèce exotique envahissante est déjà installée sur le territoire comment limite-t-on son déplacement ?   

 

 Il existe des listes réglementaires et scientifiques. La liste règlementaire permet par exemple d’interdire l’importation ou la commercialisation des espèces identifiées. Pour la France métropolitaine, 94 espèces sont aujourd’hui réglementées et interdites de commerce, transport ou encore colportage. Mais on est bien loin du nombre des espèces pouvant s’installer sur le territoire. A côté de cela, il existe des listes scientifiques qui se fondent sur des inventaires, des évaluations et la caractérisation du risque. Bien que parfois soumises à discussion et débat sur la méthodologie, ces listes permettent d’orienter des actions de surveillance et de gestion sur le territoire.

 

 

Qui est en charge de construire ces listes scientifiques ?   

 

Pour la flore, se sont notamment les conservatoires botaniques nationaux qui sont en charge de produire ces listes. Aujourd’hui, on arrive à inventorier entre 600 et 900 plantes naturalisées dans chaque région. Une centaine sont considérées comme espèce exotique envahissante. Mais ce statut peut varier avec l’espace et le temps. Une espèce peut être considérée comme envahissante dans le sud par exemple, mais pas dans le nord. Elle peut l’être ou le devenir puis disparaitre. C’est par exemple le cas de la Caulerpe (Caulerpa taxifolia) qui a envahi les côtes de plusieurs pays méditerranéens dans les années 1990-2010, mais dont les populations sont aujourd’hui en forte régression. Des espèces exotiques problématiques sur le moment peuvent , après de nombreuses années, trouver leur place dans l’écosystème et fournir par exemple des services écosystémiques qui avaient disparus. Les acteurs confrontés aux invasions biologiques s’interrogent de plus en plus sur les évolutions possibles vers des « néo-écosystèmes », définis comme des assemblages hybrides et fonctionnels d’espèce indigènes et d’espèces exotiques. C’est un sujet émergent pour la recherche.

 

 

Les politiques publiques nationales sont-elles cohérentes pour répondre à cet enjeu ?

 

Pas toujours… Par exemple, dans un contexte de changement climatique, un enjeu majeur pour la forêt française est d’accroître ses capacités de résilience pour garantir la qualité et la quantité de l’ensemble des services fournis. Parmi les solutions proposées, le recours à des essences exotiques au sein « d’îlots d’avenir », plus tolérants à la chaleur et à la sécheresse, est encouragé par les pouvoirs publics. Or une part importante des espèces préconisées sont des espèces exotiques comme le robinier, le chêne rouge ou le noyer noir dont le caractère envahissant pour certaines est bien documenté en France et ailleurs dans le monde. A l’heure où les scientifiques n’ont de cesse d’alerter sur les impacts négatifs des invasions biologiques, la question de la cohérence entre nos politiques publiques nationales se pose d’autant plus.

 

 

Avons-nous en France les moyens de prévenir les invasions biologiques ?

 

Depuis quelques années, des réseaux et des groupes de travail se sont constitués et des stratégies régionales en métropole et en outre-mer ont été élaborées pour définir un cadre d’action collectif. Les résultats sont là en termes d’amélioration des connaissances, de stratégie collective, de réglementation. On sait ce qu’il faut faire. Reste la question des moyens humains, financiers et d’une volonté politique pour mettre en œuvre la prévention. Il nous faut aujourd’hui accentuer la sensibilisation des citoyens, des élus et professionnels, renforcer notre biosécurité avec plus de personnels formés aux frontières et sur le terrain et une surveillance biologique coordonnée du territoire. Enfin, il nous faut soutenir davantage la recherche pour développer des outils d’aide à la décision afin de mieux anticiper les prochaines invasions.

Considérations juridiques sur les nouvelles relations entre l’Homme et l’abeille

La raréfaction des pollinisateurs en général et de l’abeille domestique en particulier ont mis en évidence leur importance dans la production agricole et la protection de biodiversité.La mise en œuvre d’instruments juridiques propres à garantir une bonne gestion de la pollinisation n’est pas des plus évidentes, en raison de la difficulté qu’il y a à gouverner les essaims et, surtout, à en fixer les termes d’un point de vue juridique. S’il y a bien service écosystémique, la légitimité d’un paiement à l’apiculteur interroge, comme interrogent les conventions de pollinisations, à la finalité aléatoire. Des conventions à l’objet inédit (fauche tardive, jachère fleurie, etc.) permettent sans doute d’asseoir un service environnemental au profit des pollinisateurs, mais elles peinent à compenser les atteintes (épandage de pesticides par exemple) qui les affectent.

Intensité de pressions anthropiques dans les territoires ultramarins

Les territoires ultramarins sont à la fois riches en biodiversité mais également exposés et fragiles face à l’incidence des changements globaux du fait de l’insularité de la plupart de ces territoires et des caractéristiques de leurs systèmes socio-économiques. Afin de mieux comprendre ces pressions, un Club FRB Recherche-action « Changements globaux et gestion durable de la biodiversité dans les territoires ultramarins » a vu le jour et permis cette étude. 

 

Ce travail s’est concentré sur six territoires distribués sur trois bassins océaniques (Atlantique, Pacifique et Indien) : la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane, Mayotte, La Réunion et la Nouvelle-Calédonie. Il a permis d’explorer l’intensité de deux des cinq pressions directes identifiées par l’Ipbes, la pollution des cours d’eau et les espèces végétales exotiques envahissantes (EEE), à l’échelle de ces sites sous forme de cartographie et de dresser des liens de causalité entre chacune des pressions et différents facteurs naturels ou anthropiques.

 

La taxation des terres agricoles en Europe : approche comparative

Dans le cadre de l’Union européenne (UE), l’agriculture fait l’objet d’une politique commune ancienne, bien établie, très connue et bénéficiant du budget le plus important (386,6 milliards d‘euros pour la période 2021-2027, soit 32 % du budget européen ). Elle est également concernée par la politique du marché intérieur. En outre, diverses directives de l’UE relatives à l’environnement s’appliquent aux terres agricoles. C’est notamment le cas en matière de biodiversité (Directive Oiseaux, Directive Habitats, Directive sur la responsabilité environnementale), en matière d’évaluation environnementale (Directive Projets, Directive Plans et programmes), en matière d’eau (Directive cadre sur l’eau, Directive nitrates, Directive boues d’épuration, Directive inondations, etc.). L’UE est également partie à plusieurs conventions internationales dans le domaine de la biodiversité qui concernent les terrains agricoles (Convention sur la diversité biologique, Convention de Berne, Convention de Bonn, Convention de Ramsar, etc.).

 

Bien que l’agriculture européenne soit soumise à ce triple processus d’harmonisation, les règles de taxation des terres agricoles semblent assez différentes d’un État à l’autre. Pourtant, cette taxation influe sur plusieurs aspects des politiques agricoles et environnementales. Elle peut favoriser ou défavoriser la rentabilité de l’agriculture, inciter à pratiquer tel ou tel type d’agriculture plus ou moins favorable à la biodiversité, encourager ou désinciter à un changement de destination des terres agricoles. La taxation des terres agricoles entraine donc des effets multiples, aussi bien sur les terres agricoles elles-mêmes qu’envers les politiques agricoles, d’aménagement du territoire, d’urbanisme, d’environnement . En outre, au sein même des débats sur les stratégies possibles en matière de politique de la biodiversité la taxation des terres agricoles et ses modalités peuvent favoriser telle ou telle option.

 

Pour ces différentes raisons, une analyse comparative de la taxation des terres agricole en Europe a paru utile à la Fondation pour la recherche sur la biodiversité. 

 

La note est disponible dans les ressources téléchargeables. 

 

Reconnecter au vivant par les émotions : le nouveau défi de la presse naturaliste

Quel a été le point de départ à l’origine de la création de La Salamandre ?  

 

Tout a commencé par une enfance à la campagne, remplie de balades dans la nature, qui m’ont permis de satisfaire la curiosité que j’avais pour le monde du vivant. Quand j’étais enfant, j’ai très vite eu conscience que la nature déclinait, ce qui a suscité beaucoup de colère et de tristesse. Alors je me suis demandé ce que je pouvais faire, à ma modeste échelle. Et comme j’avais beaucoup de plaisir à partager cette passion pour la nature, je me suis dit que j’allais créer un petit journal avec le peu de moyens que j’avais. J’ai commencé à taper sur une vieille machine à écrire héritée de mon grand-père. J’ai d’abord écrit sur les crapauds, les pissenlits, les hirondelles, etc. Et La Salamandre est née. Depuis les choses ont bien changé ! Aujourd’hui, les jeunes feraient un podcast, une chaîne YouTube ou un compte Instagram, mais à l’époque tout ça n’existait pas encore.  

 

 

Quels sont les principaux objectifs que vous aviez en créant la revue ? 

 

Pour nous, l’objectif n’est pas que les gens connaissent la biodiversité dans ses moindres détails. On ne veut pas former de parfaits naturalistes. Notre but est de reconnecter les gens au monde du vivant en passant par les émotions. On essaie de raconter des histoires pour créer de l’empathie. En étant touché par ces histoires, le vivant reprend de la valeur.  

 

 

Comment faites-vous pour continuer à toucher le public ?  

 

Pour toucher le plus de monde, nous essayons de multiplier les formats. En plus des différentes revues que l’on propose, nous éditons entre dix et quinze livres chaque année. Nous produisons aussi des documentaires animaliers et nous organisons un grand festival annuel en Suisse. Aujourd’hui, nous essayons de mettre davantage l’accent sur le numérique pour toucher les jeunes. Une des spécificités de La Salamandre est de véhiculer un message très positif, même s’il est de plus en plus difficile. On a tous besoin de ça, de continuer à montrer le beau et le positif pour que les humains continuent à prendre soin d’eux en prenant soin de la nature.  

 

 

Pensez-vous que réapprendre au public à observer la vie sauvage peut permettre de retisser durablement les liens entre l’humain et la nature ?  Le prochain rapport de l’Ipbes consacré à l’utilisation durable des espèces sauvages traitera de l’observation de la nature comme d’une activité « non extractive ». Elle n’est donc pas sans impact… 

 

Comment peut-on se sentir concerné par quelque chose avec lequel on a complètement perdu contact ? Si je vis en ville et que je passe la moitié de mon temps les yeux collés à un écran, comment puis-je me sentir concerné par la protection de la forêt, des oiseaux et des insectes ? Il est indispensable de retisser le lien entre l’humain et la nature. Aujourd’hui, les écosystèmes naturels subissent des pressions sans précédent, la population humaine ne cesse de croitre et le simple fait d’aller dans la nature et de l’observer peut avoir un effet délétère. Pendant la pandémie de la Covid-19, les gens ont moins voyagé pendant environ 2 ans, ce qui a été une bonne chose pour la biosphère. Mais d’un autre côté, la pression sur les écosystèmes provoquée par les loisirs de plein air s’est intensifiée. Ce paradoxe-là n’est pas facile à gérer. Notre rôle est de recréer du lien en invitant les gens à sortir, certes, mais aussi à observer, à s’émerveiller et à remettre en question certains de leurs comportements et de leurs pratiques. 

 

 

Considérez-vous que l’éducation à l’environnement puisse être un réel changement transformateur ?  

 

Malheureusement, je crois que jusqu’ici, force est de constater qu’elle ne l’a pas été. Ça fait quarante ans que c’est mon métier et qu’avec mon équipe nous sensibilisons des centaines de milliers de gens, à côté de nombreuses autres organisations qui le font à plus grande échelle encore. Pourtant, le monde continue de courir à la catastrophe. Je pense qu’il faudrait changer d’échelle pour que cela devienne un changement transformateur. Dans nos sociétés occidentales, aujourd’hui, il y a un vrai problème culturel, notamment en France. La nature n’est pas considérée comme un sujet important ou même sérieux. Au premier plan, il y a la culture, toutes ces œuvres magnifiques que créent les humains. Aujourd’hui, on parle de sujets comme la protection de la ruralité ou de questions comme celles liées aux pratiques de chasses. Mais au fond, la biodiversité n’a pas l’air d’être culturellement quelque chose d’important. Ça évolue dans le bon sens, bien sûr, mais encore trop lentement. Je pense qu’il y a encore cet héritage des philosophes du siècle des Lumières qui est bien ancré dans les mentalités. Il faut comprendre qu’en détruisant la nature, on détruit l’être humain. 

 

 

Comment remédier à ce constat d’échec ?  

 

J’ai récemment rencontré le philosophe Baptiste Morizot dont je trouve la pensée très nourrissante et dont je partage le diagnostic. Le mot de « nature » accumule un peu les casseroles. Déjà la nature, c’est futile par rapport à cette magnifique culture créée par les humains. Et c’est aussi un peu infantilisant. A la rédaction, on s’en rend bien compte. Quand on présente notre travail à des personnes qui ne nous connaissent pas, ils nous répondent souvent : « Ah, c’est super ! Je vais montrer ça à mes enfants ». Or, la nature est un sujet sérieux qui concerne tout le monde. Le mot de nature est presque devenu infantilisant. Je pense que la première chose à faire est de changer le discours et de parler par exemple de « monde vivant », qui est bien plus puissant car il nous inclut directement. Ensuite, il faut être plus attentif à nos systèmes éducatifs. Il y a une véritable révolution à faire dans ce domaine.  

 

 

Participez-vous à cette révolution de l’éducation ?  

 

Complètement. Nous avons édité un livre qui s’appelle « L’école à ciel ouvert », un manuel pour les enseignants qui respecte les programmes des écoles suisses et françaises. Le propos de ce livre est de montrer aux enseignants que tout peut être appris dans la nature. On peut faire des mathématiques, de l’anglais, de la physique et de la géographie dans la forêt. Le but n’est pas juste de faire des sorties dans la nature une fois par mois pour apprendre le nom des arbres, mais de faire toute l’école en lien avec le monde vivant.  Les vertus pédagogiques sont nombreuses ! Les enfants peuvent établir un vrai lien à la nature, tout en bénéficiant d’un cadre sain et propice à l’expérience. C’est encourageant, car ce livre rencontre un grand succès, encore aujourd’hui. Ce genre d’initiative est importante, parce que là, on est sûr de toucher tout le monde. En visant les écoles, on touche aussi les adultes. On entend souvent le discours qui consiste à dire que « c’est important de sensibiliser les jeunes, car ce sont eux qui dans 20 ou 30 ans vont devoir corriger nos erreurs ». Mais on ne peut plus dire cela aujourd’hui. Les changements doivent venir maintenant. En sensibilisant les enfants, ils deviennent des alliés pour amener à des changements de comportements des adultes, peut-être de manière plus rapide qu’en sensibilisant directement les adultes. Les enfants sont un peu comme des catalyseurs de changements sociétaux. En les sensibilisant, notre cible est aussi les adultes qui sont les décideurs d’aujourd’hui.

Gestion adaptative : une chasse durable est-elle possible ?

Qu’est-ce que la gestion adaptative de la chasse ?

 

Cette mesure vise à ajuster les prélèvements en fonction de l’état de conservation des espèces chassées, en s’appuyant à la fois sur la concertation des parties prenantes et sur les données scientifiques. Elle a été introduite en France dans la loi du 24 juillet 2019, portant création de l’Office français de la biodiversité (OFB). Réglementairement, il y a, aujourd’hui quatre espèces soumises à la gestion adaptative : la tourterelle des bois, le grand tétras, la barge à queue noire et le courlis cendré. Mais l’idée est de l’étendre à toutes les espèces exploitées, non seulement chassables mais aussi peut-être un jour pêchables.

 

 

En quoi cette gestion diffère de ce qui était précédemment mis en place ?

 

Jusqu’à présent aucune réglementation, sauf quelques rares exceptions concernant surtout les espèces sédentaires, ne s’appliquait au nombre à prélever. La régulation des prélèvements, pour la chasse des oiseaux, se faisait essentiellement par la durée de la saison de chasse. Or avant l’arrivée de cette modalité de gestion, les chasseurs pouvaient avoir tendance à considérer certains gibiers, et notamment les oiseaux migrateurs, comme une manne infinie qu’ils pouvaient prélever à satiété. La chasse, entre le milieu du 19e et le début du 20e siècle, a pu ainsi prendre des allures industrielles pour les besoins de certaines industries comme la chapellerie : les plumes étant très prisées pour décorer les chapeaux, ou l’agroalimentaires avec les usines de conserves de canards sauvages dans le nord de l’Europe. Des millions d’oiseaux ont été prélevés à cet effet. Mais ces prélèvements illimités n’ont pas pu durer très longtemps, car les populations ont fortement diminué, atteignant a priori leurs niveaux les plus bas à la sortie de la Seconde Guerre mondiale. Des réglementations ont alors vu le jour. Les saisons de la chasse se sont raccourcies, certaines espèces en danger critique ont été placées sous statut de protection. La chasse d’autres espèces, comme les petits oiseaux, tel le rouge gorge, pour des raisons éthiques a été interdite. Si toutes ces régulations combinées ont permis d’atténuer le déclin de certaines espèces, il n’était pas encore question du volume des prélèvements. Un chasseur pouvait, sur une période donnée, prélever autant d’individus d’une espèce qu’il le souhaitait, pourvu que la chasse soit ouverte, et que certaines limites ne soient pas imposées localement par les sociétés de chasse.

 

 

Comment la gestion adaptative a-t-elle vu le jour ?

 

Elle a été introduite en Amérique du nord dans les années 1990 pour la chasse des oiseaux d’eau, les anatidés. À cette époque, des épisodes de sécheresse ont provoqué le déclin de certaines populations de canards et les questions qui se posaient alors étaient les suivantes : la chasse avait-elle un effet additionnel ou, comme le suggérait une étude, la chasse n’avait qu’un rôle compensatoire à la mortalité naturelle, autrement dit les oiseaux seraient morts à cette période d’une façon ou d’une autre ? Ce défaut de connaissances conduisait à l’impossibilité de proposer des quotas sur lesquels tout le monde pouvait s’accorder. Si la chasse prélève des oiseaux qui mourront par ailleurs, pourquoi alors en limiter les prélèvements ?

 

 

Comment les parties prenantes se sont accordées ?

 

Un groupe de scientifiques a proposé de mettre en place une gestion adaptative des prélèvements d’oiseaux d’eau, dans le but d’encadrer la pratique de la chasse, mais aussi d’améliorer simultanément les connaissances et l’état de conservation des espèces. Ils ont réuni différentes parties prenantes comme les instances fédérales, les chasseurs et les naturalistes pour s’accorder à la fois sur des tailles de population cibles et sur une réglementation avant le début de la saison de chasse. Les populations d’anatidés ont alors été suivies durant l’année pour être ensuite confrontées aux prédictions de différents modèles, de manière à faire évoluer la connaissance du fonctionnement du système. Si les connaissances collectées depuis 1995 ont conclu que la chasse jouait bien un rôle additif à la mortalité naturelle des anatidés, les mesures mises en place, ont permis à ces populations d’oiseaux d’aller nettement mieux. Les objectifs de taille de populations initialement visés ont été pour la plupart des espèces très largement dépassés depuis.

 

 

À partir de quand la France a-t-elle choisi d’adopter ce modèle ?

 

Au début des années 2000, en France, une grande tension agitait les défenseurs de la nature et les chasseurs. Les débats portaient sur les volumes de prélèvements ou les périodes de chasse, pour l’oie cendrée ou la tourterelle des bois par exemple. Les bons résultats de la gestion adaptative conduite en Amérique du Nord sont parvenus jusqu’en France. Ce modèle est apparu aux yeux de tous comme un modèle de gestion durable, car fondé sur les connaissances et permettant aux parties prenantes de se mettre autour d’une table et de s’accorder. La gestion adaptative a été graduellement introduite en Europe pour les différentes espèces d’oies, puis en France pour certaines espèces d’oiseaux sédentaires ou migrateurs.

 

 

Comment cette gestion a-t-elle été accueillie par les parties prenantes ?

 

Les dissensions résident dans la manière dont cette gestion adaptative doit être appliquée : faut-il utiliser tel ou tel modèle de dynamique de population ? Lorsqu’une incertitude apparaît, faut-il faire valoir le principe de précaution ? etc. De façon générale les chasseurs acceptent le principe des quotas et le suivi scientifique pour déterminer les causes premières du déclin des espèces chassées, mais ils estiment qu’ils n’en sont pas forcément directement responsables et qu’ils paient le prix pour les autres. Selon eux, il est plus facile de réglementer la chasse qui est un loisir que de modifier les pratiques agricoles qui dans bien des cas sont les causes directes du déclin des oiseaux. C’est le cas par exemple de la tourterelle des bois qui a vu ses populations chuter à cause de la perte d’habitat liées à l’agriculture. Sa taille de population est devenue si faible qu’elles ne peuvent aujourd’hui plus soutenir le prélèvement et sa chasse est actuellement suspendue.

 

 

Quels impacts concrets la gestion adaptative va avoir sur les pratiques de chasse ?

 

Elle va impliquer certaines contraintes, en particulier l’existence de quotas de prélèvements et l’obligation pour les chasseurs de renvoyer chaque année leur tableau de chasse rapidement après la fin de la saison. Mais cette gestion adaptative leur promet aussi un gibier globalement abondant grâce à la réglementation sur les prélèvements ou la période de chasse qui fluctuera en fonction de l’état et des connaissances des populations cibles.

 

 

Quand sera-t-elle appliquée aux autres espèces ?

 

Cette gestion est encouragée par l’Europe. Il est probable que dans les cinq prochaines années, elle soit mise en place pour une grande partie des 90 autres espèces qui aujourd’hui sont chassables en France.

Réduire l’impact environnemental et valoriser les pêcheurs : la combinaison gagnante pour une pêche durable ?

Quel a été pour vous le point de bascule qui vous a poussé à vouloir faire évoluer le commerce des produits de la pêche ?  

 

Au début de ma carrière d’ingénieur agro-halieute, je me suis retrouvé pendant un an sur les bateaux et j’ai pris conscience de tout ce que j’avais théorisé pendant mes études. C’est-à-dire que les pêcheurs ne savent jamais ce qu’ils vont attraper, ni quand ils vont pouvoir sortir en mer, ni même combien ils vont pouvoir vendre leurs prises : bref, ils sont soumis à une grande instabilité. Le plus souvent, j’ai rencontré des équipages déçus d’avoir trimé dans la tempête pendant plusieurs heures pour finalement très mal vendre leur produit. Certains me disaient : “Moi, je vends en direct. De cette manière, je valorise mieux mon poisson et je peux me permettre de ne pas aller en mer quand le temps est mauvais”.  

 

Qu’avez-vous mis en place pour répondre à cette prise de conscience ?  

 

Au début, pas grand-chose… Je me suis retrouvé à travailler à la direction des pêches du ministère de l’agriculture où je subventionnais des projets de recherche et développement ou d’investissements à bord de navires. Mais petit à petit, je me suis intégré dans les systèmes d’Amap et j’ai découvert ces offres de paniers avec de super produits, bons, provenant directement du producteur, bien payés et issus de pratiques vertueuses. Là, je me suis dit qu’il fallait faire la même chose avec la pêche.  

 

Quelles sont les valeurs que cherchent les consommateurs en se tournant vers vous ? 

 

Récemment, nous avons fait un sondage auprès de nos abonnés. On distingue deux cas. Les plus anciens clients nous disent que c’est la qualité du produit et le goût qui fait la différence. Je pense que l’on n’est pas tombé dans l’écueil de certains produits issus du commerce équitable ou du vin bio qui proposent de bonnes valeurs mais qui n’offrent pas de bons produits. Pour les abonnés plus récents, la différence se fait sur l’engagement de durabilité qui est associé à une certaine valeur de confiance. Aujourd’hui, les gens se méfient des labels. Nous mettons en avant des produits frais, durables et éthiques, avec derrière une véritable transparence et de vrais critères.  

 

Qu’est-ce qui fait que votre activité est durable ? 

 

D’abord, nous travaillons avec certains types de navires de manière exclusive. C’est-à-dire que nous ne mettons dans nos paniers que des produits issus de la petite pêche côtière. Concrètement, cela signifie que nous ne travaillons qu’avec des bateaux de 12 mètres au plus qui sortent à la journée uniquement et qui embarquent trois marins au maximum pour la pêche au filet. Mais nous avons aussi des critères techniques. Nous ne travaillons qu’avec des pêcheurs qui utilisent des techniques douces ou passives. Concrètement, il s’agit d’engins que l’on pose dans l’eau et que l’on revient chercher plus tard comme des hameçons, des lignes, des casiers ou des filets. Nous valorisons aussi la pêche à la main, en plongée ou à pied. Évidemment, nous refusons de travailler avec des pêcheurs qui utilisent des chaluts ou des dragues qui, selon les scientifiques, abîment les fonds marins. Nous faisons aussi attention à la sélectivité : nous achetons ce qui est pêché, même s’il s’agit de poissons peu connus par le consommateur.  

 

Comment rémunérez-vous vos pêcheurs ?  

 

Aujourd’hui, c’est assez hétérogène. Il y a les poissons les plus demandés payés quasiment au prix du marché, comme les bars, les soles ou les turbots. Et pour les espèces moins connues, nous payons beaucoup plus. Globalement, nous nous engageons à payer 20 % de plus que le marché.  

 

Qui sont les pêcheurs qui travaillent avec vous ?  

 

On rencontre des pêcheurs qui sentent que leur filière n’est pas assez valorisée. Il n’y a pas de “bio” pour la pêche, donc pas de possibilité pour les pêcheurs d’afficher clairement leurs pratiques vertueuses. Pour moi, un défaut des certifications “pêche durable”, c’est qu’elles veulent absolument raisonner à l’échelle de la pêcherie et non à celle du pêcheur. Je pense que tout pêcheur ayant des pratiques objectivement vertueuses devrait pouvoir être labellisé. Ce sont ces pêcheurs-là que l’on va chercher, ceux qui n’arrivent pas à travailler à petite échelle parce que la filière ne les met pas en valeur et ne les rémunère pas assez. On travaille aussi avec de nombreux pêcheurs qui s’installent, qui font peu de volume et pour lesquels il est plus facile de vendre aussi les espèces habituellement dénigrées par le marché.  

 

Pour les pêcheurs, ça change quoi concrètement ?  

 

Ce que nous voyons aujourd’hui avec les sondages que l’on fait auprès de nos pêcheurs, c’est que 30 % d’entre eux nous vendent des espèces qu’ils jetaient à la poubelle auparavant. En réduisant ce gaspillage, on réduit considérablement la pression sur les autres espèces habituellement plus exploitées. D’autres nous déclarent pouvoir se permettre de mettre moins d’engins en mer, de passer moins de temps à pêcher, de mettre moins de longueurs de filets, ce qui, encore une fois, réduit la pression de pêche.  

 

Est-ce que ce système peut s’étendre à une plus grande échelle et devenir un vrai changement transformateur ?  

 

C’est le rêve que l’on avait au départ. Nos objectifs premiers sont d’assurer des bons prix toute l’année et de voir, grâce à ce système de paniers qui assure l’écoulement de nos produits, que les stocks de poissons s’améliorent. D’ailleurs, nous avons des scientifiques qui évaluent actuellement notre impact en mesurant l’activité des bateaux, les quantités attrapées et les nombres de jours passés en mer. Vendre du poisson, c’est juste un moyen d’arriver à cette fin, de créer un levier en payant mieux les pêcheurs, au lieu d’attendre que les stocks de poissons soient dégradés à un tel point qu’il faille soumettre les pêcheurs à des mesures coercitives comme l’instauration de quotas parfois inadaptés et en décalage avec la réalité économique.  

 

Quels sont vos prochains challenges ?  

 

La prochaine étape, c’est d’inciter de nouveaux professionnels à se conformer à nos critères de durabilité, pour valoriser le mouvement des nouveaux pêcheurs qui s’installent et qui pratiquent la pêche à la ligne ou au casier. Il faut les aider à transformer plus en profondeur la filière. Aujourd’hui, il y a un vrai risque de rachat des petits bateaux. L’idéal serait de faire l’inverse : sanctuariser de petits bateaux, voire acheter des gros bateaux pour les transformer en petits. Le jour où l’on arrivera à obtenir un volume suffisamment important et où l’on pourra dire à un pêcheur qui fait 50 tonnes de poissons dans l’année qu’on est là pour lui, on deviendra un vrai levier.

#Presidentielle2022 – Agriculture et pêche

Agriculture et pêche, des enjeux biodiversité

 

Mal gérée, trop intensive, l’agriculture peut entrainer pollution, érosion des sols et de la biodiversité sauvage, transformation des habitats et déforestation, réduisant d’autant plus, à terme, le potentiel productif. Et ce, alors que les besoins alimentaires vont croissant. L’évolution de la demande des consommateurs et les incertitudes face au changement climatique nécessitent de remettre les fonctionnements écologiques au cœur de l’agrosystème, afin de rendre notre agriculture plus durable, tout en préservant et valorisant l’ensemble de ses diversités.

Par ailleurs, on observe une chute drastique des populations de poissons, notamment due à une surexploitation de certaines espèces, déclins des points chauds de diversité marine tels que les récifs coralliaires en raison du changement climatique, des pollutions, voire du tourisme, d’où la nécessité de proposer des mesures de protection à l’égard de la biodiversité marine et aquatique.

 

Nous avons ici regroupé l’ensemble des mesures qui ont pour objectifs d’enrayer de manière directe l’érosion de la biodiversité en lien avec l’agriculture et la pêche. Les mesures favorisant une transition écologique s’intégrant à la thématique identifiée et ayant un impact indirect sur l’érosion de la biodiversité ont également été recensées ci-dessous.

 

 

Les mesures des candidat·e·s :

 

N.B. Nous avons autant que possible conservé les mesures dans les termes exacts proposés par les candidat·e·s. Des modifications mineures ont cependant été apportées comme le passage des verbes à l’infinitif et la réduction de certains corpus pour en faciliter la clarté. Par ailleurs, les mesures présentées ici découlent d’un tri réalisé jusqu’au 29 mars 2022 qui peut présenter une certaine subjectivité. Pour retrouver l’intégralité des mesures proposées dans le cadre de cette campagne présidentielle, seuls les programmes officiels des candidats font foi. Ils sont disponibles sur la page principale du dossier.

[#Ipbes9] Exploitation durable du vivant : quelles solutions ?

Le deuxième volet de cette campagne est consacré à l’exploitation des ressources naturelles par les humains.

Comment rendre durable la gestion des forêts tropicales ou celle de la pêche ? Que nous apprennent les systèmes alimentaires des peuples autochtones sur nos modes de consommation et notre lien au sauvage et à la nature ?

 

 

 

Découvrez tous les articles :

 

L’approvisionnement en bois venant des forêts guyanaises peut-il être durable ?

Couverte à 95 % de forêts, la Guyane française représente un enjeu essentiel en termes de régulation du climat et des flux de carbone. C’est aussi potentiellement un réservoir considérable de bois d’œuvre. Le bois exploité est en grande partie destiné à la construction ou à la rénovation résidentielle pour des marchés locaux ou exporté dans les Antilles françaises. La production s’y élève chaque année à 80 000 m3, ce qui en fait, en plus de l’enjeu socio-économique associé à la régulation du climat, un des principaux secteurs économiques de la région. L’Office national des forêts (ONF), qui en est le gestionnaire, est chargé du choix des massifs à exploiter, de la construction des dessertes forestières et de l’application des principes de gestion durable. En particulier, il désigne les arbres à abattre puis les vend à des concessionnaires qui en font eux-mêmes l’exploitation. Car dans ces forêts naturelles, c’est-à-dire à l’état sauvage, la production se fait par exploitation sélective. Seuls quelques grands arbres d’intérêt commercial sont exploités comme l’angélique, le gonfolo et le grignon franc. Ces espèces représentent à elles seules trois quarts de la production, alors qu’au moins 90 essences sont technologiquement utilisables, mais avec encore peu de débouchés dans la filière bois. Le reste de la forêt est laissé à une régénération naturelle, avec un cycle de coupe fixé à 65 ans. Malheureusement, les populations d’individus de taille exploitable de ces espèces cibles ne se renouvellent pas au rythme auquel elles sont exploitées. En effet, on constate qu’elles pourraient être épuisées après un ou deux cycles d’exploitation. Pour maintenir les fonctions écologiques essentielles comme la régulation du climat ainsi que la production de bois de ces forêts tout en préservant les massifs forestiers inexploités sur le long terme, une solution serait de diversifier la liste d’espèces exploitées1. Pour ce faire, il est nécessaire de changer les habitudes dans les marchés publics, en parvenant à ce que les architectes maîtrisent aussi l’usage des essences moins connues et en développant des solutions techniques adaptées à leur utilisation 

 

Les systèmes alimentaires des peuples autochtones : un lien fort aux espèces sauvages comme réponse à la crise des régimes alimentaires

Comment définissez-vous les systèmes alimentaires des peuples autochtones ?   

 

D’abord, il est important de définir ce qu’est un peuple autochtone. Il s’agit d’un statut revendiqué par certaines communautés, juridiquement reconnu par les Nations Unies, sur la base d’un certain nombre de traits. Un de ces traits est un lien fort et ancien avec un territoire qui se traduit par une connaissance approfondie de ses ressources, de leur diversité et de leurs usages (alimentaires, médicaux, etc.). Un autre de ces traits est que ces peuples autochtones se définissent comme porteurs d’une relation et d’une sensibilité particulières au monde dans lequel ils vivent, relation qui s’inscrit dans un ensemble de valeurs respectueuses du vivant. 

 

 

Combien de personnes constituent l’ensemble de ces communautés ? 

 

On estime qu’ils sont un peu moins de 500 millions. Contrairement à une idée un peu ancienne et caricaturale, il n’existe que très peu de chasseurs-cueilleurs dans ces communautés. Cependant, ces communautés revendiquent des systèmes alimentaires reposant sur des ressources locales et sur une dimension collective très forte : à la fois dans l’accès aux ressources souvent gérées de façon collective, mais aussi dans le travail de production, de préparation et dans le partage des aliments. Ces communautés entretiennent des dispositifs de solidarité alimentaire. Mais ces systèmes alimentaires créent non seulement du lien social, mais aussi un lien au vivant. Ils sont la plupart du temps biocentriques et, à l’inverse de systèmes anthropocentriques, ne sont pas focalisés sur l’humain.  

 

 

Où sont généralement situées ces communautés ?  

 

Elles se situent souvent dans des zones protégées. Un tiers de la surface mondiale couverte par les zones protégées est occupé par ces communautés. Dans ces zones, ces communautés revendiquent une souveraineté alimentaire, c’est à dire le droit d’accéder aux ressources locales pour préserver leurs pratiques alimentaires et toutes les valeurs bio culturelles qui y sont rattachées.  

 

 

Quel est le lien des communautés autochtones aux espèces sauvages ?  

 

Pour vous répondre, je citerais le Livre Blanc/Whipala sur les systèmes alimentaires des peuples autochtones qui dit : “Depuis des millénaires, les peuples autochtones protègent leur environnement et sa biodiversité”. Ces savoirs et ces pratiques sont revendiqués comme durables. Les systèmes alimentaires autochtones contribuent à la construction de la biodiversité à travers l’agriculture et au maintien des ressources non domestiques par des pratiques d’exploitations durables. Mais attention, le sauvage, dans ces systèmes, ce n’est pas que du gros gibier. On se focalise parfois sur les grandes espèces emblématiques, mais les ressources alimentaires sauvages ce sont aussi des plantes, des insectes, des poissons, etc. La revendication des peuples autochtones d’être à la fois protecteurs et utilisateurs de la biodiversité est parfois mal comprise et l’équilibre est souvent fragile et difficile à maintenir.    

 

 

Pourriez-vous donner un exemple ? 

 

Prenons l’exemple des BaTonga, une population située au Zimbabwe, de part et d’autre du Zambèze. Des études montrent toute l’importance des ressources sauvages dans leur alimentation. Celle-ci se remarque à plusieurs niveaux. D’une part par la contribution à la diversité alimentaire et notamment par le nombre d’espèces consommées. En effet, les BaTonga exploitent 60 espèces animales dont 18 sauvages. Pour les plantes, c’est plus de la moitié des espèces consommées qui sont sauvages, 37 sur un total de 58. À titre de comparaison, on sait que l’alimentation mondiale basée sur le secteur agroalimentaire ne repose essentiellement que sur une dizaine d’espèces végétales et une dizaine d’espèces animales. D’autre part, les ressources sauvages sont importantes car l’alimentation des BaTonga est culturellement riche de ces espèces. Plus de la moitié des préparations culinaires répertoriées par l’étude inclut des ingrédients sauvages. Enfin, ces ressources permettent de réduire la vulnérabilité des BaTonga face aux crises. Pendant la pandémie mondiale de Covid-19, ils ont eu un recours accru aux ressources alimentaires sauvages, ils ont cueilli des fruits, chassé des oiseaux, etc. Ceci a permis de limiter l’impact des pénuries et des baisses de revenus liées à la pandémie.  

 

 

En quoi l’étude de ces systèmes peut-elle favoriser la durabilité du système alimentaire global ? 

 

Les peuples autochtones revendiquent des systèmes alimentaires durables. Ces systèmes sont sans doute porteurs de solutions à considérer pour répondre à la crise actuelle des systèmes alimentaires. Mais c’est peut-être moins leur rapport aux aliments, bases de leur alimentation, que leur rapport culturel qui doit nous inspirer. La principale cause de la crise que l’on traverse actuellement est la perte de sens de notre alimentation. Comme le signale le sociologue Claude Fischler, nous consommons des “objets comestibles non identifiés”. La distanciation entre les mangeurs et les aliments a des conséquences néfastes sur nos interactions avec le vivant, sur ce que l’on se croit “autorisé” à faire. Je suis particulièrement attachée à un certain nombre de concepts qui permettent de repenser nos systèmes alimentaires comme celui d’écologie de l’alimentation qui est un domaine très intéressant. Repenser notre alimentation comme un moyen de se relier les uns aux autres, de redonner une valeur aux relations sociales qui peuvent se tisser à travers l’alimentation, c’est revendiquer une qualité du lien avec les non humains et enfin redonner un sens au vivant. Je crois que, face à la domination de la rationalité technico-économique, ces préoccupations sont associées à de la sensiblerie et donc évacuées de nos réflexions. Mais il faut redonner sa place à l’intime et à l’affectif dans notre lien à la biodiversité. Ce que nous apportent les systèmes alimentaires des peuples autochtones, c’est la possibilité de renforcer ce lien à travers l’alimentation. Pour qu’ils soient durables, le “sensible” doit être intégré pleinement à nos systèmes alimentaires. 

 

 

Un parallèle existe-t-il entre ces systèmes autochtones et les pratiques d’exploitation ou de consommation en France ?  

 

Je pense qu’il y a énormément de mouvements sociaux en France qui visent à redonner un sens à l’alimentation. L’industrie a séparé les mangeurs des aliments, mais les consommateurs se mobilisent désormais pour essayer de recréer du lien. Il existe de nombreux exemples : les Amap qui visent à recréer le lien entre producteur et consommateur, le commerce équitable, les références au “local”, etc. De nombreux consommateurs du monde occidental se réapproprient de cette manière leur ancrage dans leur espace social et biophysique. Le parallèle entre les revendications des peuples autochtones et celles des nouveaux consommateurs du monde occidental est évident et va dans le même sens.   

 

 

Développer des systèmes plus proches du sauvage, comme les systèmes autochtones, est-il une stratégie levier pour la durabilité des régimes alimentaires ?  

 

Avec les maladies émergentes, le sauvage est perçu de façon accrue comme une menace. L’image du consommateur qui mange un animal sauvage et génère une pandémie mondiale est très présente dans les esprits. Au-delà de ce cliché, je pense que la consommation d’animaux sauvages dans les métropoles asiatiques par exemple, peut aussi être interprétée comme une forme de résistance à une réduction de la biodiversité. Garder une place au sauvage dans notre alimentation est une façon de garder un lien fort et direct avec le vivant. Bien sûr, ce n’est pas facile, surtout face aux enjeux de conservation. Je vis en France dans une zone envahie par les sangliers. Il y a eu des tentatives de créer des filières de viande sauvage, ce qui n’a pas été facile à cause des normes sanitaires strictes et des effets possibles d’une chasse commerciale. De plus, la chasse est de plus en plus difficile à accepter moralement, notamment parce qu’elle a perdu sa fonction alimentaire. Favoriser la diversité des aliments, les produits de la chasse et de la cueillette dans les systèmes alimentaires, présente certains intérêts. Même de façon très ponctuelle, cela peut être un moyen d’entretenir un lien sensible avec le vivant, qui peut aider à la conservation de la biodiversité.

Vers une utilisation durable des espèces

L’exploitation des organismes n’est pas durable lorsque le prélèvement d’individus d’une population se fait au-delà du taux de renouvellement et de l’accroissement biologique de celle-ci, ou lorsque l’activité conduit à une dégradation de l’environnement qui perturbe cette espèce (par exemple, l’écotourisme intensif). Cette exploitation correspond à un service écosystémique d’approvisionnement – et aux contributions matérielles de la nature (dans la typologie de l’Ipbes) – lorsqu’elle vise à se nourrir, se vêtir, se chauffer ou se loger par exemple. Elle correspond à un service culturel – et aux contributions immatérielles de la nature – dans le cas d’activités récréatives ou spirituelles. Au niveau mondial, l’Ipbes estime qu’il s’agit de la 2e cause principale de perte de la biodiversité.

 

La pêche, la chasse, la cueillette et l’exploitation des forêts naturelles (par opposition aux plantations) sont les principales formes d’utilisation des espèces sauvages, entraînant un prélèvement dans la nature. Certaines activités sans prélèvement représentent également une forme d’utilisation.

Pollution et biodiversité

La pollution correspond à une dégradation de l’environnement par des substances, des déchets ou des nuisances diverses. Il peut s’agir de particules fines, de gaz à effet de serre, de métaux lourds, de substances chimiques ou de matériaux non dégradables comme les plastiques. Les pollutions sonores et lumineuses présentent également un fort impact sur le fonctionnement et la santé des écosystèmes mais sont encore relativement peu  étudiées. Elle concerne différents types de milieux : l’atmosphère, les sols, les rivières ou les océans. Ingérée, respirée, entravante ou dérangeante, la pollution de l’environnement affecte la santé de toutes les espèces, y compris les humains. La meilleure solution face à l’augmentation des déchets et des polluants est de réduire drastiquement leur production et leur utilisation, sans engendrer de nouvelles pollutions.

Le développement de la cueillette de plantes sauvages sur le territoire français : conditions et enjeux de la durabilité

Bien que la cueillette de plantes sauvages remonte aux origines de l’humanité, il aura fallu attendre les années 2010 pour que le monde académique et de la conservation se penchent sur la question. En cause, une explosion de la demande en produits naturels, des désirs de retour à la nature et un marché du sauvage en pleine expansion. Cette pratique s’est fortement développée aussi bien dans les sociétés occidentales, pourtant davantage tournées vers les médicaments de synthèse, que dans certains pays du Sud où l’offre et l’usage de produits naturels sont importants. Le regard porté sur les plantes s’est transformé avec l’émergence des discours autour de la valeur économique de la biodiversité et plus généralement des valeurs attribuées à la nature. Cette dynamique est-elle compatible, au moins en France, avec le réservoir de plantes sauvages présent dans l’espace rural et le maintien de la biodiversité ?

Changement d’usage des terres et des mers

Les modes de production et de consommation pour répondre à cette demande entraînent des changements d’utilisation des terres et des mers, c’est à dire des changements d’occupation et d’utilisation des sols et des ressources, liés aux activités humaines. Le changement d’usage des terres est reconnu comme la cause première d’érosion de la biodiversité sur la planète.

 

 

Le paradoxe de la productivité : la productivité agricole favorise l’inefficacité du système alimentaire

Depuis la reconstruction économique qui a suivi la Seconde Guerre mondiale, l’objectif principal de la politique alimentaire a été d’augmenter la productivité agricole et de libéraliser des marchés permettant aujourd’hui un commerce mondialisé. Cette orientation a conduit à une croissance significative de l’offre de produits agricoles, à davantage de calories disponibles et à une baisse des prix.

 

Dans cet article, les auteurs émettent l’hypothèse que la recherche de la seule productivité agricole encourage l’externalisation des coûts sur la santé et l’environnement et, au lieu de fournir des biens publics, représente sans doute une défaillance du marché. Par exemple, la disponibilité de calories moins chères génère des régimes alimentaires créant de l’obésité, et la concurrence mondiale favorise les producteurs qui peuvent produire le plus à moindre coût, généralement avec des dommages environnementaux. Les auteurs proposent alors de recentrer la productivité et l’efficacité globales du système alimentaire sur le nombre de personnes qui peuvent être nourries sainement et durablement par unité d’intrant et non plus sur les seuls rendements.

Mettre l’accent sur l’efficacité globale du système alimentaire offre un moyen clair de réduire les défaillances du marché, d’améliorer santé et durabilité.

La régénération naturelle des paysages arborés : la meilleure stratégie pour lutter contre le changement climatique et restaurer les écosystèmes ?

Malgré les gros titres et les sommes importantes consacrées aux projets de plantation massive d’arbres qui promettent de lutter contre la désertification, la méthode la plus efficace consiste peut-être à créer un environnement facilitant arrivée, germination et essor des arbres indigènes.

En effet, les principaux succès en termes de plantation d’arbres sont observés dans les plantations commerciales pour la récolte du bois, et non pour la restauration des terres dégradées. Les grands et coûteux projets de plantation d’arbres en vue de la restauration des terres se poursuivent cependant, alors que l’idée de régénérer naturellement des arbres qui sont pris en charge par les communautés locales est peu développée car trop peu de gens connaissent son histoire et ses réussites.

 

Au travers de cette synthèse (téléchargeable dans les ressources ci-dessous) d’un article scientifique, découvrez l’histoire de cette méthode, les réussites permises et les évolutions en cours dans les pratiques et financements internationaux.

[Journée FRB 2021] Agir en faveur de la biodiversité – Osons les changements transformateurs !

 

Il est désormais clair que la biodiversité est au cœur des débats sociétaux et de l’agenda politique planétaire. Son avenir et les actions à mettre en œuvre pour enrayer son déclin demandent plus d’ambition. Réunie au sein de l’Ipbes, pour plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques, l’expertise scientifique internationale appelle désormais à des changements transformateurs. C’est-à-dire, des changements profonds de nos modes de vie et de consommation qui passent par la réorganisation fondamentale des facteurs économiques, sociaux et technologiques qui les régissent. 

 

 

Concrètement, quels sont-ils et comment les mettre en place ?
Qu’impliquent-ils pour les acteurs publics et privés, les décideurs politiques et économiques ? Quelles actions sont déjà menées ? Pour quels résultats ?

 

 

L’objectif est d’emprunter des trajectoires pensées de manière globale, intégrant à la fois les enjeux alimentaires, énergétiques, climatiques et environnementaux. Ainsi, consommer local, passer à une comptabilité environnementale, réinventer ses processus industriels, changer de modèle de gouvernance, repenser l’urbanisation de nos villes, sont autant d’exemple de mesures leviers à mettre en œuvre.

 

À l’occasion de la Journée FRB 2021, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité s’empare de ce sujet. Elle souhaite ainsi mettre en lumière les fondements scientifiques et les enjeux pour la recherche, articulant sa réflexion à partir d’ateliers menés en amont avec son Conseil scientifique et son Conseil d’orientation stratégique. Alors que l’Ipbes vient d’annoncer le lancement d’un rapport sur le sujet, la FRB propose un espace de dialogue aux chercheurs et acteurs, publics et privés, de la société afin de mieux en comprendre les contours pour oser les changements transformateurs. 

 

 

[Plénière Ipbes] En route vers la huitième session

L’Ipbes (la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques) avait beaucoup fait parler d’elle lors de la 7e session plénière de ses États membres, qui s’était tenue à Paris en avril-mai 2019. Elle y avait notamment adopté sa première évaluation mondiale de la biodiversité et des services écosystémiques, qui a largement contribué à l’attention croissante accordée aux enjeux de biodiversité ces deux dernières années. Après une “année blanche” en 2020, l’Ipbes organise sa 8e session en juin 2021, qui se déroule exclusivement en ligne, situation sanitaire oblige.

 

 

Plénière de l’Ipbes, huitième session : 

 

Les deux principaux sujets à l’ordre du jour de cette plénière sont l’approbation de deux documents  :

 

  • Le rapport de cadrage de l’évaluation dite “nexus, qui concerne les liens d’interdépendance entre la biodiversité, l’eau, l’alimentation, la santé, l’énergie et le changement climatique en vue d’orienter l’élaboration des politiques et des mesures permettant de répondre de manière intégrée aux objectifs de développement durable.

 

  • Le rapport de cadrage de l’évaluation dite sur “les changements transformateurs”, dont l’objectif est de comprendre et d’identifier les facteurs des sociétés humaines (dimensions comportementales, sociales, culturelles, économiques, institutionnelles, techniques et technologiques) qui peuvent être mis à profit pour provoquer un changement transformateur1 en vue de la conservation, de la restauration et de l’utilisation rationnelle de la biodiversité.

 

 

Ces rapports de cadrage constituent la commande passée par les États membres de l’Ipbes auprès des groupes d’experts pour les deux prochaines évaluations inscrites au programme de travail de l’Ipbes. Celles-ci se dérouleront respectivement sur 5 et 3 ans. L’adoption de ces documents en plénière participe à la priorisation des attendus et des sujets majeurs qui devront être abordés par l’Ipbes dans ses travaux.

 

La plénière examine également un rapport concernant la collaboration entre l’Ipbes et le Giec, Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, et un document sur le travail des “équipes spéciales” de l’Ipbes, des groupes transversaux permettant de renforcer les capacités et l’efficacité de la plateforme, de consolider les bases de connaissances et de soutenir les décisions politiques.

 

 

Du 3 au 9 juin : les Stakeholder Days

 

Cet évènement (en anglais) a rassemblé les parties prenantes de toutes les régions du monde, afin de favoriser les échanges et la coopération avec l’Ipbes.

 

Un récapitulatif des faits marquants et du programme de travail de l’Ipbes a été présenté. Les Stakeholder Days permettent aux parties prenantes de connaître davantage la manière dont elles peuvent s’impliquer dans le processus Ipbes et l’organisation du travail qui leur est demandé en préparation de la plénière.

Le travail effectué par le réseau ouvert des parties prenantes (ONet) et le forum international des autochtones sur la biodiversité et les services écosystémiques (IIFBES) ont été présentés. Les parties prenantes connectées ont également pu contribuer à l’élaboration des déclarations des parties prenantes, faites au cours de la plénière, en réaction au programme de travail de l’Ipbes. + d’infos

 

 

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1 Réorganisation en profondeur à l’échelle du système de l’ensemble des facteurs technologiques, économiques et sociaux, y compris des paradigmes, des objectifs et des valeurs.

La biodiversité au cœur des recherches d’INRAE, membre fondateur de la FRB, spécialiste des enjeux agriculture, alimentation et environnement

Boire, manger, respirer, être en bonne santé… la biodiversité pourvoit chaque jour à nos besoins les plus essentiels. INRAE en tant qu’institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement est de fait naturellement concerné par la biodiversité. Essentielle à la résilience des écosystèmes, à la sécurité alimentaire et à la santé, la biodiversité est un patrimoine précieux et un bien commun qu’il faut préserver pour lui-même, mais aussi pour les services écosystémiques dont dépendent les sociétés humaines. Or la multiplication des pressions anthropiques, aggravées par le changement climatique, mène à son déclin.

 

Dans ce contexte, les recherches d’INRAE qui s’étendent à de nombreux milieux, des montagnes aux littoraux en passant par les forêts, les milieux aquatiques et les agroécosystèmes, s’attèlent à mieux comprendre la biodiversité, sa dynamique et à développer, avec les acteurs des territoires, des solutions pour la préserver, la restaurer et gérer les milieux de manière durable.

 

Depuis sa création1, INRAE tient une place importante auprès de la FRB puisque l’institut siège à son Conseil d’administration, en tant que membre fondateur, et plusieurs de ses chercheurs sont ou ont été membres du conseil scientifique de la Fondation.

 

 

Plus d’informations sur la recherche sur la biodiversité à INRAE

 

 

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INRAE a vu le jour au 1er janvier 2020 et est issu de la fusion de deux instituts français : l’Inra (Institut national de la recherche agronomique) et Irstea (Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture), tous deux également déjà membres fondateurs de la FRB.

[Atelier Cos-Ipbes] Appel à relecture externe de l’évaluation Ipbes concernant l’utilisation durable des espèces sauvages

Important – Pour participer à cet atelier, vous devez obligatoirement : 

  • Être membre du Conseil d’orientation stratégique (Cos) de la FRB ;
  • Être inscrits en tant que relecteur du projet d’évaluation (+ d’infos).

 

Cet atelier prendra la forme d’un World Café pour faciliter le dialogue et le partage de connaissances et d’idées. Vous aurez l’opportunité lors de cet atelier de contribuer à la réalisation de ce rapport, en apportant vos connaissances pratiques et techniques, et vos savoirs locaux et traditionnels. Il vous sera proposé de travailler sur le « résumé pour décideurs », document de référence produit par l’Ipbes et résumant l’évaluation. Il s’adresse, au-delà des décideurs publics, aux décideurs privés (monde de l’entreprise, associatif, ou à titre individuel). 

 

 

Déroulé de l’atelier :

  • Présentation des modalités de la relecture ;
  • Échanges et dialogues entre participants ;
  • Formulation des commentaires sur le résumé pour décideurs ;

 

Si vous souhaitez participer à cet atelier, merci de vous inscrire au plus tard le 30 avril 2021.

 

 

Inscription

 

 

+ d’infos :

Indicateurs et outils de mesure : évaluer l’impact des activités humaines sur la biodiversité ? La FRB présente ses recommandations

La Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) s’est emparée de cet enjeu et publie, en collaboration avec l’Office français de la biodiversité (OFB), un rapport compilant les résultats d’une enquête menée auprès des parties prenantes, d’une évaluation scientifique d’outils de mesure intégratifs, d’ateliers réunissant acteurs et concepteurs d’outils, ainsi que les échanges issus d’un colloque.

 

À la lumière de ces travaux, la FRB propose trois constats et une série de recommandations visant à améliorer ces indicateurs et leur appropriation par les acteurs :

 

  • Les questions liées à la biodiversité tiennent compte à la fois de la diversité de ses dimensions, de la complexité du fonctionnement du vivant et de la multiplicité des enjeux sociaux associés. Il ne peut, de ce fait, pas exister d’indicateur unique tel que l’équivalent carbone développé dans la lutte contre le changement climatique.

 

  • Deuxième constat, des outils existent d’ores et déjà. Sept indicateurs et outils de mesure utilisés par le monde économique, la société civile, à l’échelle internationale, sont comparés, dégageant leurs forces et leurs faiblesses. Les acteurs s’en emparant doivent s’en servir tout en ayant conscience de leurs limites, et en dialoguant avec les concepteurs pour les améliorer.

 

  • Troisième constat, des indicateurs et outils sectoriels sont également essentiels, permettant ainsi des comparaisons au sein de ces mêmes secteurs. De tels instruments doivent venir en complément d’outils de mesure intégratifs.

 

L’ampleur du travail restant à accomplir est importante, mais il est nécessaire de progresser rapidement alors que la question des indicateurs est au cœur de la préparation de l’agenda post-2020 et des engagements de la future COP 15. Concepteurs, chercheurs et acteurs doivent y travailler de concert. À ce titre, la FRB met en avant une série de recommandations, de démarches à adopter pour améliorer les indicateurs et outils de mesure existants et mieux intégrer la complexité du vivant et de nos relations au sein de ce vivant. Parallèlement, et de manière pragmatique, une veille sur la pertinence et la qualité des différents indicateurs et outils de mesure serait utile à l’ensemble des acteurs.

 

De son côté, l’OFB au travers de ses programmes de mobilisation des acteurs économiques, associatifs et institutionnels intitulés « Engagés pour la Nature » accompagne l’ensemble des parties prenantes et les encourage à agir.

 

« Entreprises Engagées pour la nature – Act4nature France » regroupe d’ores et déjà plus d’une centaine d’entreprises, de toutes tailles, opérant dans des secteurs d’activités et des territoires variés qui au travers des plans d’actions déploient des actions concrètes afin de faire évoluer leurs modèles d’affaire en y intégrant des enjeux de biodiversité.

 

« Partenaires engagés pour la nature » a permis de valider l’engagement de réseaux et fédérations professionnelles ainsi que d’associations qui se mobilisent afin de former et d’outiller leurs adhérents au travers la mise en partage de bonnes pratiques.

 

 

Consultez le rapport complet

[Expertise et synthèse] Indicateurs et outils de mesure : évaluer l’impact des activités humaines sur la biodiversité ?

La Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) s’est emparée de cet enjeu et publie, en collaboration avec l’Office français de la biodiversité (OFB), un rapport compilant les résultats d’une enquête menée auprès des parties prenantes, d’une évaluation scientifique d’outils de mesure intégratifs, d’ateliers réunissant acteurs et concepteurs d’outils, ainsi que les échanges issus d’un colloque.

 

 

En savoir plus

Indicateurs et outils de mesure : évaluer l’impact des activités humaines sur la biodiversité ?

Des indicateurs de biodiversité et outils de mesure ont été développés dès les années 1990. Trois décennies plus tard, où en est-on ? Peut-on désormais répondre aux attentes fortes des acteurs de la société et des conventions nationales et internationales ? Et pour aller plus loin, que penser des analyses de cycle de vie, des labels de pratiques durables, en termes de pêche, déforestation, etc. ?

 

La Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) s’est emparée de cet enjeu et publie, en collaboration avec l’Office français de la biodiversité (OFB), un rapport compilant les résultats d’une enquête menée auprès des parties prenantes, d’une évaluation scientifique d’outils de mesure intégratifs, d’ateliers réunissant acteurs et concepteurs d’outils, ainsi que les échanges issus d’un colloque.

 

Le rapport complet ainsi que l’annexe avec les évaluations scientifiques de sept indicateurs et outils de mesure sont disponibles dans les ressources téléchargeables.

[Conférence] Lancement des projets de l’appel à projets BiodivERsA « Biodiversité et changement climatique »

Au terme de cet appel qui visait à promouvoir des projets de recherche mêlant excellence scientifique et pertinence politique et sociétale, 21 projets ont été financés pour un montant de plus de 25 millions d’euros.

 

BiodivERsA organise le 5 mai prochain de 13h à 18h la conférence de lancement de ces projets. Participez à cette conférence et  découvrez les 21 projets financés. 

 

 

Inscription

 

 

+ d’infos :

 

[Enquête] Avec quelle nature souhaitez-vous vivre ?

Quelques minutes seulement vous seront nécessaires pour parcourir les quatre parties de cette enquête qui questionne différents aspects de nos perceptions dont notamment, les émotions induites via des photographies de paysages.

 

L’enquête s’intéresse à la fois à la nature dans laquelle nous vivons mais également celle à transmettre, à préserver.

 

 

 

 

Ses principaux objectifs sont de :

  • relever les perceptions et représentations des individus pour mieux les comprendre ;
  • comprendre comment les individus fonctionnent ;
  • trouver dans les réponses des individus des leviers pour changer nos comportements.

 

 

Participer à l'enquête

 

 

Cette enquête aura cours jusqu’au congrès UICN en septembre prochain. Une partie des résultats sera diffusée d’ici la fin de l’été 2021 et une restitution finale des résultats sera publiée en 2022. Merci pour vos réponses et n’hésitez pas à relayer au plus grand nombre.

 

 

Ce projet à été élaboré grâce à la mobilisation des membres du club 5, en particulier Manuelle Rovillé (Les petits débrouillards), Dupuis Louis (Apesa), Hélène Leriche (Orée)et Alix Cosquer (Cefe Cnrs).

La simplification des paysages augmente le risque d’attaques de ravageurs des vignobles et donc l’utilisation d’insecticides

Dans cette étude, publiée dans la revue Ecology Letters en octobre 2020,  les chercheurs ont utilisé une base de données gouvernementale sur 13 années pour analyser les effets des paysages sur les épidémies de pyrale de la vigne (Lobesia botrana) et l’application d’insecticides dans environ 400 vignobles espagnols.

 

Au moment de la récolte, ils ont mis en évidence que les épidémies de ravageurs avaient quadruplé dans les paysages simplifiés dominés par la vigne par rapport aux paysages dans lesquels les vignobles étaient entourés d’habitats semi-naturels. De même, les applications d’insecticides avaient doublé dans les paysages dominés par la vigne et diminué dans les vignobles entourés d’arbustes. Les résultats de cette étude suggèrent que la complexité croissante du paysage pourrait atténuer les populations de ravageurs et diminuer le besoin d’application d’insecticides. La conservation des habitats semi-naturels représente une solution économiquement et écologiquement rationnelle pour parvenir à une production viticole durable.

 

 

La synthèse est disponible dans les ressources téléchargeables.

[Conférence] Une seule santé, en pratique ?

Covid-19, un an après ?

 

Quels enseignements tirer de cette pandémie qui questionne nos manières de vivre et de travailler, notre définition du progrès, notre manière d’appréhender la part sauvage du monde et aussi l’Autre, dont les activités aux quatre coins du monde impactent notre vie ?

 

Un an plus tard, la conférence « Une seule santé, en pratique ? » organisée par l’ENSV-FVI VetAgro Sup en collaboration avec France Nature Environnement (FNE), la Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité (FRB), l’Association Santé Environnement France (ASEF), Humanité et Biodiversité (H&B), la Fédération des Syndicats Vétérinaires de France (FSVF), alimentera les réflexions autour de cette crise : Peut-on anticiper et prévenir les pandémies ? Comment s’engager et être acteur.ric.e d’une transformation des modèles de sociétés ? Économie, préservation de la santé et de l’environnement sont-ils conciliables ?

 

En tant que crise, la Covid-19, comme le dernier épisode de grippe aviaire, a éclairé comme rarement les défis à venir qui nous obligent à repenser les liens entre notre santé, celle des autres espèces vivantes et celle des écosystèmes. Penser globalement la santé du vivant amène à reconsidérer nos systèmes de prévention, de soin et de santé, nos économies (notamment agricoles), notre rapport à l’environnement et aux milieux, mais aussi l’action publique et ses frontières.

 

 

Regarder la conférence en replay

[Sciences pour l’action] Les rencontres prospectives sont dédiées cette année aux territoires ultramarins

Organisées en visioconférence par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), en partenariat avec l’Office français de la biodiversité (OFB) et le ministère de la Transition écologique, ces Rencontres visent à rassembler en ateliers différents acteurs (chercheurs, responsables de politiques publiques, acteurs de terrain, etc.) afin d’élaborer une série de recommandations grâce à une méthodologie basée sur la démarche prospective.

 

 

Pour cette édition, trois thèmes ont été identifiés :

  • le développement économique endogène respectueux de la biodiversité ;
  • les fonctionnalités du continuum terre-mer et l’aménagement du territoire ;
  • les liens Humain-Nature et la protection de la biodiversité.

 

 

Les recommandations issues de ces échanges devraient être publiées dans les mois à venir, à l’instar de celles issues des Rencontres de 2018 et 2017. Nous vous invitons à découvrir la vidéo d’ouverture de l’édition 2020.

 

 

Consulter les recommandations des rencontres précédentes :

  • Rencontres 2018 : santé et biodiversité ; culture et biodiversité ; sols et questions foncières ;
  • Rencontres 2017 : biodiversité et solidarité écologique ; littoral et adaptation : solutions fondées sur la nature ; valorisation et restauration de la biodiversité et biodiversité et politiques énergétiques : cas de la biomasse forestière.

Rencontres sciences pour l’action 2020 : les territoires ultramarins

Ces Rencontres visent à rassembler en ateliers différents acteurs (chercheurs, responsables de politiques publiques, acteurs de terrain, etc.) afin d’élaborer une série de recommandations grâce à une méthodologie basée sur la démarche prospective.

 

 

Pour cette édition, trois thèmes ont été identifiés :

  • le développement économique endogène respectueux de la biodiversité ;
  • les fonctionnalités du continuum terre-mer et l’aménagement du territoire ;
  • les liens Humain-Nature et la protection de la biodiversité.

 

 

Les recommandations issues de ces échanges devraient être publiées dans les mois à venir, à l’instar de celles issues des Rencontres de 2018 et 2017. Nous vous invitons à découvrir la vidéo d’ouverture de l’édition 2020.

[Prix Jeune chercheur 2020] Découvrez les vidéos des 13 lauréats !

À l’occasion de la 2e édition des prix Jeune chercheur, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité vous présente les 13 jeunes chercheuses et chercheurs récompensés et leurs sujets d’étude aussi passionnants que différents, tous faisant avancer la recherche sur la biodiversité.

 

Découvrez les lauréates et lauréats ainsi que les partenaires des prix Jeune chercheur 2020 en vidéo !

 

 

Voir les 13 lauréats

Prix Jeune chercheur 2020

 

Connaissez-vous le safoutier ? Et le plancton diazotrophe ? Imaginiez-vous que les câbles sous-marins interagissent avec la biodiversité marine ? Avez-vous déjà entendu parler d’ethnopharmacologie ?

 

 

Pour cette deuxième édition, 54 candidatures ont été reçues, puis évaluées par le Conseil scientifique de la FRB, avant d’être transmises aux partenaires financeurs qui ont pu choisir leurs lauréats : 7 jeunes chercheuses et 6 jeunes chercheurs.

 

 

La cérémonie ne pouvant se tenir en raison des conditions sanitaires actuelles, partenaires et lauréats se présenteront dans de courtes vidéos diffusées sur les réseaux sociaux de la FRB entre le jeudi 10 et le mardi 15 décembre.

[#ScienceDurable] Ce mois-ci, la campagne s’intéresse à la thématique “agriculture et biodiversité”

Au travers de la campagne « La science pour un monde durable », découvrez ces pistes, nombreuses, sérieuses et passionnantes, sur lesquelles travaillent les chercheurs français en lien avec les recommandations proposées par l’Ipbes afin d’atteindre les objectifs du développement durable (ODD) des Nations Unies et de nourrir les réflexions en vue de la définition du cadre d’action post 2020 de la Convention sur la diversité biologique (CDB).

 

Chaque mois, la FRB, ses instituts membres fondateurs et l’alliance AllEnvi mettent en avant les solutions de la recherche pour enrayer le déclin de la biodiversité. Suivez-nous sur nos réseaux sociaux et notre page dédiée. Ce mois-ci, la thématique abordée est “agriculture et biodiversité”.

 

Découvrez les articles de la semaine :

#ScienceDurable – L’agroécologie, l’agriculture de demain ?

Julie de Bouville : Qu’est-ce que l’agroécologie ?  

 

Sandrine Petit-Michaut : L’agroécologie scientifique est une branche de l’écologie consacrée aux écosystèmes aménagés par les agriculteurs. Elle vise à comprendre la façon dont fonctionne les milieux naturels domestiqués par l’homme, et ce dans toute leur complexité : les interactions entre les végétaux, les hommes et les animaux mais aussi les éléments biologiques, physiques, climatiques, etc. C’est une approche holistique qui tend à la fois à analyser la façon dont les pratiques agricoles modifient les écosystèmes, mais surtout à apporter des solutions en s’appuyant sur la biodiversité.

 

 

Julie de Bouville : Comment la biodiversité peut-elle être employée dans l’agriculture ?

 

Sandrine Petit-Michaut : Il y a de nombreuses façons, mais l’une d’elle est de se servir de prédateurs pour diminuer la présence de nuisibles dans les champs. C’est ce qu’on appelle le contrôle biologique par conservation. Les carabes sont par exemple de grands alliés pour les agriculteurs. Ces petits coléoptères consomment des limaces et des pucerons, mais sont aussi de grands consommateurs de graines d‘adventices. Nous avons calculé que ces insectes peuvent absorber jusqu’à 4 000 graines par mètre carré et par jour, ce qui représente une consommation de 50 % des graines produites par les adventices. Plus il y a de carabes dans une parcelle cultivée et plus le renouvellement du stock de graines d’adventices diminue.

 

 

Julie de Bouville : Comment favoriser la présence de tels alliés ?

 

Sandrine Petit-Michaut : Dans une étude récente que j’ai menée à INRAEnous avons étudié les taux de prédation de pucerons, d’œufs de Lépidoptères et de graines d’adventices au champ en fonction de la structure du paysage et de l’usage de pesticides. Nous avons montré que moins l’on utilisait de pesticides et plus les paysages autour des champs étaient variés, plus la prédation des pucerons dans les parcelles augmentait. En effet l’usage des pesticides peut impacter les espèces alliéesDans le cas d’un usage modéré ou faible de pesticides, on montre que le contrôle biologique par conservation est plus efficace si les parcelles se situent dans des paysages comprenant de nombreux habitats semi-naturels pour les espèces alliées.  

 

 

Julie de Bouville : Suffit-il d’avoir des paysages variés autour des cultures pour réduire les intrants ?

 

Sandrine Petit-Michaut : Non ce n’est évidemment pas suffisant. Néanmoins, des paysages qui abritent beaucoup de cultures de différente nature et des habitats semi-naturels seront plus à même de fournir le gîte et le couvert à de nombreux organismes utiles. De plus, quand il y adifférentes cultures dans un paysage, cela signifie souvent que les agriculteurs font pousser une diversité de cultures sur une même parcelle au cours des années. Cette diversité de la rotation est un bon moyen d’éviter les infestations de nuisibles, et permet donc de réduire l’usage de pesticides. Certaines façons de conduire les cultures peuvent être intéressantes. Prenons l’exemple des carabes qui pondent leurs larves dans les sols. Si les sols des champs sont trop travaillés, le risque est de tuer les larves. Un champ de blé conduit en agriculture de conservation, dont le principe est de réduireconsidérablement le travail du sol, sera donc plus favorable à ces coléoptères qu’un champ de blé voisin régulièrement labouré.

 

 

Julie de Bouville : Est-on à même de mesurer l’efficacité de tels systèmes ?

 

Sandrine Petit-Michaut : Les systèmes agroécologiques sont difficiles à évaluer car nous avons vu qu’ils reposent sur de nombreux facteurs et organismes qui interagissent entre eux. Les effets du déploiement de ces systèmes à l’échelle du paysage est encore plus complexe. Néanmoins, sur la base de suivis sur le long terme dans différents paysages, on observe des tendances qui peuvent alimenter des modèles et nous permettent de faire des projections. On peut par exemple estimer dans quelle mesure l’ajout de haies ou la diversification des cultures dans un paysage permettrait d’augmenter le nombre de carabes. Mais les modèles ne sont pas suffisants pour convaincre les agriculteurs du bien fondé de nos affirmations, nous devons aussi passer par le terrain de l’expérimentation pour prouver nos affirmations. 

 

 

Julie de Bouville : Avez-vous justement des terrains d’expérimentation ?

 

Sandrine Petit-Michaut : En France, INRAE a installé à Bretenière, non loin de Dijon, la plateforme CA-SYS qui vise à concevoir et à évaluer des systèmes agroécologiques sur une exploitation de 120 hectares. L’objectif est de remplacer les pesticides en s’appuyant sur la biodiversité, cultivée et sauvage, comme moyen de lutte contre les bioagresseurs, en favorisant les auxiliaires, mais aussi pour améliorer la fertilité des sols, en favorisant les organismes dans le sol. En plus de la baisse de l’usage des pesticides, nous cherchons aussi à réduire l’utilisation d’intrants comme l’eau ou l’azote afin de proposer des systèmes agricoles multi performants d’un point de vue agronomique, économique, environnemental et social. La plateforme se donne entre cinq à dix ans pour parvenir à trouver des équilibres écologiques favorables à l’agriculture. Aujourd’hui beaucoup d’agriculteurs sont intrigués et passent sur la plateforme voir ce que nous faisons. C’est encourageant.  

#ScienceDurable – Le mystère du riz éternel révélé

De la diversité à perte de vue 

 

À compter de 2008, l’équipe de recherche part, chaque année, dans les terrasses de Yuan Yang caractériser le riz : « nous avions dans l’idée que la résistance de ce riz tenait à sa diversité » précise Jean-Benoît Morel. Pour vérifier cette hypothèse, les scientifiques prélèvent dans une centaine de champs plusieurs plants de riz et les séquencent. Et ce qu’ils découvrent se révèle extraordinaire : « La diversité des riz des terrasses est complètement fractale, à toutes les échelles y compris dans chaque parcelle de champs. » poursuit le scientifique. Les chercheurs la comparent alors aux 3 000 variétés de riz séquencées dans le reste du monde « et ce que l’on a constaté, c’est que ce riz à un niveau de diversité qui approche 80 % du niveau de diversité des riz mondiaux ». Mieux encore, l’analyse de 400 génomes du Yuan Yang leur fait penser que ces variétés sont très anciennes : « On a l’impression que c’est un riz qui a peut-être même été cultivé avant les autres, il y a plusieurs milliers d’années ».

 

 

Les gènes de l’immunité, les meilleurs des antidotes  

 

Jean-Benoît Morel et son équipe poursuivent leur enquête et réalisent des tests pour déterminer les gènes sous pression de l’environnement, comprenez des gènes dont la forme fluctue en fonction des pressions extérieures que la plante subit : « On a constaté que les seuls gènes qui répondaient à ce critère étaient les gènes de l’immunité. » Autrement dit la seule pression détectée à laquelle s’adapterait en permanence le riz est la pression exercée par les agents pathogènes. « Le déploiement de systèmes immunitaires très différents entre les riz cultivés à Yuan Yang a poussé l’agent pathogène à se spécialiser sur chaque type de riz, l’empêchant de passer facilement de l’un à l’autre » commente le scientifique. 

 

Dans les terrasses du Yuan Yang, la sélection naturelle darwinienne joue donc à plein régime. Lorsque les champignons parviennent à s’attaquer à certains plants de riz, les autres plants disposent de gènes pour y faire face. Les plants sensibles aux pathogènes diminuent tandis que les autres, insensibles, croissent. Ce sac et ressac, permis par la diversité au sein de l’espèce, offre donc au riz d’avoir le meilleur antidote.

 

 

La diversité comme bien commun 

 

Mais la diversité du riz n’explique pas tout. La longévité des terrasses réside entre les mains de la population locale qui depuis des millénaires sème et travaille le riz. Pour comprendre la façon dont la population Hani gère sa diversité, l’équipe de recherche a fait appel à des sociologues pour mener l’enquête. Trois règles sociales ont été identifiées : 

 

  • La première est que les semences des variétés traditionnelles sont échangées et jamais vendues. 
  • La seconde est qu’un agriculteur qui refuse de donner des semences est considéré comme un paria. 
  • Et la troisième est que le choix des semences par un agriculteur ne résulte d’aucune concertation collective : c’est à lui que revient la décision de semer de la façon dont il le souhaite.

 

« À elles seules, ces règles permettent spontanément d’instaurer dans ce territoire un accès illimité, immédiat et très peu couteux, à un large stock de semences maintenues in situ. » 

 

 

Vers une agriculture européenne résiliente et durable ?  

 

Ce modèle serait-il d’une façon ou d’une autre transposable en Europe ? « Dans les terrasses, on a estimé qu’il fallait maintenir une vingtaine de gènes de résistances différents, cela n’est évidemment pas généralisable, car les socio-écosystèmes ne sont pas les mêmes, mais cela donne un ordre d’idée. » Lorsque l’on sait qu’en France seules quelques variétés de riz sont cultivées, le chemin semble encore long pour avoir une agriculture résiliente et durable. « En France, les agriculteurs qui cultivent le blé commencent néanmoins à suivre cette tendance, souligne le chercheur. Aujourd’hui, 12 % des surfaces de blé sont cultivées avec plus d’une variété par parcelle. » Les sorties de ce travail de recherche vont permettre d’aider les agriculteurs à constituer des mélanges de variétés durables et pertinentes. Une autre idée que souhaiterait faire passer Jean-Benoît Morel serait de sensibiliser les agriculteurs à la diversité comme bien commun. « Si on ne la conserve pas, les agents pathogènes sauront développer des contre-attaques. ». Mais les agriculteurs ne sont pas les seuls à convaincre : « Il y a de puissants verrous notamment du côté de la filière qui n’a pas intérêt à proposer de nombreuses variétés, mais à privilégier une variété qui rapporte beaucoup au détriment d’autres variétés qui ne représenteraient que des micros marchés. »

 

La diversité fait pourtant partie des solutions de demain « Or le problème est qu’il n’y en a de moins en moins en France. Pour l’étudier, il faut aller la chercher ailleurs, dans les pays du sud notamment » rappelle Jean-Benoît Morel. Dans ces pays, celle-ci est encore active, de nombreux paysans la travaillent au quotidien.  « INRAE est en train d’identifier avec le Cirad des chantiers communs au sud dans cette perspective. L’enjeu est à la fois de protéger les cultures et de voir comment transposer leurs solutions chez nous. » Car, vous l’aurez compris, de la diversité découle l’éternité.

#ScienceDurable – L’agriculture croît dans les mathématiques

Réduction des pesticides et engrais, prédiction des récoltes, adaptation au changement climatique… Les défis posés à l’agriculture sont multiples et les mathématiciens ont des solutions à apporter. Focus sur leurs travaux à l’occasion du Salon de l’agriculture qui s’est tenu à la Porte de Versailles en mars dernier.

 

 

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#ScienceDurable – Réchauffement climatique : une situation d’urgence pour les céréales africaines

Le réchauffement climatique impacte les productions agricoles en Afrique de l’Ouest… depuis déjà une vingtaine d’années ! Si de nombreux travaux prévoyaient une baisse des rendements agricoles de 10 à 15 % en 2050 dans ces régions du fait de l’élévation des températures, aucune ne s’intéressait jusqu’alors à la situation actuelle. Deux climatologues de l’UMR Espace-Dev, Benjamin Sultan et Dimitri Defrance, viennent de publier une étude sur ce sujet en collaboration avec un laboratoire japonais, spécialisé dans les simulations environnementales.

 

 

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#ScienceDurable – Combiner les politiques agricoles de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour concilier biodiversité et sécurité alimentaire

Répartir les efforts entre la production de biocarburants, une transition vers des régimes alimentaires moins carnés et la reforestation de pâture serait une bien meilleure option pour l’agriculture de demain que de miser uniquement sur une seule de ces stratégies. Cette combinaison permettrait d’allier à la fois des objectifs de sécurité alimentaire, de préservation de la biodiversité et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, selon une étude publiée par le Cirad et ses partenaires dans Environmental Research Letters.

 

 

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Webinaire – Comment sortir de l’ère des pandémies ?

La pandémie de Covid-19 a mis sur le devant de la scène la question des liens entre érosion de la biodiversité et multiplication des pandémies. A la suite d’un atelier dédié qui s’est tenu dès juillet dernier, la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (Ipbes) a publié un rapport, le 29 octobre, synthétisant les causes et les voies de sortie de cette « ère des pandémies », qui sont toutes liées à la manière dont on interagit avec la biodiversité. La crise sanitaire et socio-économique de la Covid-19 a justement heurté de plein fouet un processus de négociations internationales préparant la 15e Conférence des Parties (Cop 15) de la Convention sur la diversité biologique (CDB) des Nations unies. La Cop 15, prévue de longue date pour octobre 2020 à Kunming (Chine) mais reportée à 2021, doit aboutir à un nouveau cadre international visant à freiner l’érosion de la biodiversité mondiale. 

 

 

Ce webinaire propose une perspective croisée sur le rapport de l’Ipbes sur la biodiversité et les pandémies et le processus de préparation de la Cop 15 et du prochain cadre mondial pour la biodiversité.

 

 

Avec :

 
Bérangère Abba, secrétaire d’État à la Biodiversité, ministère de la Transition écologique,
Pierre Dubreuil, directeur général de l’Office français de la biodiversité (OFB),
Jean-François Silvain, président de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) et co-animateur de la synthèse FRB sur les liens entre Covid-19 et biodiversité,
Basile Van Havre, co-président du groupe de travail sur le Cadre post-2020 de la Convention sur la diversité biologique (CDB),
Benjamin Roche, directeur de recherche au sein de l’Institut de recherche pour le Développement (IRD), co-auteur du rapport de l’Ipbes sur la biodiversité et les pandémies,
Aleksandar Rankovic, coordinateur de l’initiative Gouvernance internationale de la biodiversité post-2020 à l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri).
 

 

 

Inscriptions

 

Plus d’informations sur la page de l’événement

[BiodivERsA] Découvrez la dernière publication du réseau sur les sciences participatives

Cette publication retrace les principaux atouts et forces des sciences participatives tout en détaillant les bonnes pratiques et ressources à mobiliser dans ce domaine.

 

Ce Citizen Science Toolkit (en anglais) a été développé par un groupe composé de scientifiques et d’experts des sciences participatives, suite à un atelier organisé par BiodivERsA à Bruxelles en avril 2019.

 

 

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Webinaire sur l’appel à projets BiodivRestore “Conservation et restauration des écosystèmes dégradés et de leur biodiversité”

Le webinaire a été animé conjointement par le coordinateur de BiodivERsA, par un représentant de la Water JPI, ainsi que de l’ANR. Il a été l’occasion d’aborder les thèmes de l’appel ainsi que les modalités et les procédures de participation, notamment pour les équipes françaises.

 

 

Le webinaire a eu lieu le 12 novembre 2020 de 14h30 à 16h00 (CET).

 

 

Plus d’informations : 

 

 

 Toutes les informations pratiques et les modalités de candidature sont disponibles sur la page de l’appel à projets BiodivRestore “Conservation et restauration des écosystèmes dégradés et de leur biodiversité”

La date limite de dépôt des pré-propositions est fixée au 7 décembre 2020, 16h00 CET.

[Merci d’avoir été au rendez-vous !] Les aires protégées peuvent-elles sauver la biodiversité au XXIe siècle ?

Pour l’édition 2020, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité a consacré sa Journée FRB à la thématique des aires protégées.

 

Cet événement a permis d’expliciter les bénéfices écologiques et aussi socio-économiques des aires protégées et constitué un espace de dialogue entre chercheurs, décideurs politiques et acteurs de la société.

 

Les présentations des intervenants sont disponibles sur la page internet de l’événement dans la rubrique “ressources téléchargeable”. Les vidéos des différentes interventions seront bientôt en ligne sur le site internet et la chaîne Youtube de la Fondation.

 

 

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[Journée FRB 2020] Les aires protégées peuvent-elles sauver la biodiversité au XXIe siècle ?

Après la sortie du rapport alarmant de l’Ipbes sur l’état de la biodiversité mondiale, l’année 2020 a été marquée par une crise sanitaire sans précédent et rythmée par une succession de rapports alertant sur la situation critique de la biodiversité. Ce contexte inédit a mis en lumière le rôle que peuvent avoir les aires protégées pour ralentir l’érosion de la biodiversité et réduire les risques de zoonoses ou d’épidémies.

 

Les aires protégées sont-elles efficaces ?
Le seront-elles demain ?
Facilitent-elles l’adaptation du monde vivant au changement climatique ?
Quels en sont les bénéfices socio-économiques ?
Comment concilier activités humaines et aires protégées ?
Quel(s) modèle(s) économiques adopter ?

 

En 2020, les aires protégées, tout statut confondu, avoisinent les 16 % de la surface de la planète. Les objectifs discutés pour la préparation des prochains grands rendez-vous internationaux ambitionnent d’atteindre 30 % de la planète d’ici 2030. Si par définition ces aires sont protégées des activités humaines, de manière partielle ou plus rarement totale, le maintien, l’extension ou la création de nouvelles aires protégées se heurte à des intérêts socio-économiques multiples.

 

L’évaluation du niveau de protection nécessaire pour atteindre les objectifs fonctionnels sur le plan écologique de ces espaces est donc indispensable.

 

En présence de Bérengère Abba, secrétaire d’état à la biodiversité, et de Yann Wehrling, Ambassadeur délégué à l’environnement, la Journée FRB 2020 a permis d’expliciter les bénéfices socio-économiques des aires protégées et constitué un espace de dialogue entre chercheurs, décideurs politiques et acteurs de la société.

 

Les présentations des intervenants sont disponibles dans les ressources téléchargeables. 

Biodiversité les acteurs français passent à l’action

La Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) a pour mission de favoriser les activités de recherche sur la biodiversité en lien avec les acteurs de la société. Susciter l’innovation, développer et soutenir des projets, diffuser les connaissances et mobiliser l’expertise sont au coeur de ses actions. Elle accueille par ailleurs le secrétariat scientifique du comité français pour l’Ipbes, la Plateforme intergouvernementale pour la biodiversité et les services écosystémiques. À ce titre, elle est chargée de relayer les travaux de la Plateforme au niveau national. La FRB travaille ainsi avec son Conseil d’orientation stratégique (Cos), regroupant plus de 240 structures (entreprises, syndicats, ONG, collectivités territoriales, etc.), afin que les acteurs nationaux s’approprient les messages de l’Ipbes et pour rapprocher les conclusions scientifiques de leurs préoccupations opérationnelles. La Fondation s’est ici associée à ORÉE, association multi-acteurs pour l’environnement membre de son Cos et comptant plus de 180 membres.

 

Ainsi est née la présente publication, fruit d’un long travail auprès d’acteurs français. Elle fournit un panorama des mesures pour la biodiversité mises en oeuvre au niveau non-étatique, alors que les acteurs sont de plus en plus sollicités pour rendre des comptes sur leurs engagements, notamment en 2020 dans le cadre de la préparation de la Cop 15 de la Convention sur la diversité biologique.

 

La publication est consultable dans les ressources téléchargeables. 

[Appel à projets] L’appel FRB-Cesab à revues systématiques est prolongé jusqu’au 9 septembre

Au travers de son Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab), la FRB finance deux post-doctorants jusqu’à 18 mois, pour réaliser un travail de revue systématique, mobilisant cartographie systématique, évaluation critique et synthèse narrative du corpus de textes sélectionnés, en vue de la rédaction d’un article de synthèse destiné à une revue scientifique internationale.

 

 

Le projet pourra aller soit jusqu’à une analyse lexicographique aboutie, soit jusqu’à l’extraction des données statistiques du corpus et leur analyse (méta-analyse). 

  

 

  • Thème 1 État et devenir de la biodiversité marine à l’heure des changements globaux 
  • Thème 2, en partenariat avec la Fondation Agropolis : Des solutions pour la transition agro-écologique qui préservent la biodiversité 

 

Date de clôture des pré-propositions9 septembre 2020, 23:59 CEST

Toutes les informations sont disponibles sur la page de l’appel.

[Communiqué] Les plantes adventices au service de l’agriculture : pourquoi sont-elles essentielles et comment les protéger ?

Deux récentes études issues du projet Disco-Weed démontrent le rôle clé des plantes adventices dans le fonctionnement des écosystèmes agricoles. Elles identifient aussi les mesures à mettre en œuvre pour favoriser leur présence dans les parcelles sans porter préjudice à la production agricole. Le projet de recherche Disco-Weed a été financé par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) et réalisé dans son Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab), en partenariat avec l’INRAE, le CNRS, les universités de La Rochelle et de Lorraine, le ministère de l’écologie et l’Agence nationale de la recherche.

 

 

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Les plantes adventices au service de l’agriculture : pourquoi sont-elles essentielles et comment les protéger ?

Longtemps considérées comme de « mauvaises herbes » pour la compétition qu’elles exercent sur les plantes cultivées, les plantes adventices se révèlent être en réalité de grandes alliées dans les écosystèmes agricoles. C’est ce que montre l’étude du projet Disco-Weed publiée le 28 mai 2020 dans Frontiers in Sustainable Food Systems. À partir de données récoltées sur 184 parcelles cultivées de la Zone Atelier Plaine & Val de Sèvre, une plaine céréalière de 450 km² s’étendant autour du centre d’études biologiques de Chizé (CNRS/La Rochelle Université), les chercheurs ont montré que la diversité des plantes adventices, et en particulier les espèces rares, contribuaient à la fourniture simultanée de plusieurs fonctions écologiques (multifonctionnalité). En effet, les plantes adventices favorisent : le contrôle des ravageurs des cultures ; la fertilité du sol et des fonctions associées aux cycles du Carbone, de l’Azote et du Phosphore ; la pollinisation et le nombre d’espèces d’abeilles sauvages, un indicateur de la biodiversité.

 

Dans la seconde étude publiée le 8 juillet 2020 dans Proceedings of the Royal Society B: Biological Sciences, les scientifiques ont cherché à comprendre les mécanismes à l’origine du maintien de la diversité de plantes adventices dans les parcelles agricoles pour favoriser leur présence. L’équipe a étudié la flore adventice dans 444 parcelles cultivées de la même Zone Atelier Plaine & Val de Sèvre. Dans ces différentes parcelles, les chercheurs ont montré que la diversité des adventices est plus importante dans les zones « d’interfaces », situées entre la bordure de parcelle et le premier rang de culture. L’étude montre pour la première fois qu’en plus de leur rôle de refuge pour la diversité de la flore adventice, ces zones non-cultivées agissent comme des ‘corridors’ (milieux reliant fonctionnellement entre eux  des habitats vitaux pour une espèce) entre les différentes parcelles d’un paysage agricole. L’étude montre aussi qu’une plus grande proportion d’agriculture biologique dans le paysage augmente la diversité de plantes adventices dans ces zones d’interfaces, en particulier dans les parcelles en céréales d’hiver. « La diversité des plantes adventices étant essentielle pour la fourniture de multiples fonctions écologiques, une gestion extensive de ces zones est une stratégie pour la préserver dans les paysages agricoles » souligne Sabrina Gaba, chercheuse à l’INRAE, auteure des deux publications et porteuse du projet Disco-Weed. L‘étude met en effet en évidence l’importance de :

  • conserver ces zones d’interfaces ;
  • et favoriser des paysages agricoles diversifiés, incluant des parcelles en agriculture biologique, pour assurer une plus grande diversité de plantes adventices dans les parcelles agricoles et ainsi la fourniture de multiples fonctions écologiques.
 
 

#ScienceDurable – Sous les tropiques, la lutte biologique peut limiter la déforestation et l’érosion de la biodiversité

Une lutte biologique bien menée en agriculture peut ralentir la déforestation et prévenir la perte de biodiversité. C’est ce que vient de montrer une équipe internationale comprenant des entomologistes, des biologistes de la conservation, des agro-écologistes et des géographes. Les résultats de cette étude ont été publiés dans Communications Biology – Nature.

 

 

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#ScienceDurable – Déforestation à Madagascar : concilier développement et conservation de la biodiversité

L’île a perdu 44 % de ses forêts naturelles depuis les années 50 et le rythme de la déforestation s’accélère. Avec 90 % d’espèces endémiques, c’est une biodiversité unique qui est menacée de disparition. L’enjeu de la Grande île est de concilier la sauvegarde de son patrimoine naturel et la lutte contre la pauvreté. Un défi de taille qui nécessite des actions menées sur plusieurs fronts. Les recherches du Cirad et de ses partenaires accompagnent le pays dans ce sens au travers de plusieurs projets. Revue de détails à l’occasion de la journée internationale des forêts, le 21 mars.

 

 

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[Prix Jeunes Chercheurs 2020] La FRB lance la deuxième édition des Prix Jeunes Chercheurs

En 2018, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) et son Conseil scientifique ont créé le Prix Jeunes Chercheurs, en lien avec son Conseil d’orientation stratégique (Cos), pour accompagner les jeunes chercheur.euse.s qui contribuent significativement aux sciences de la biodiversité. 

 

Toutes les informations sur l’édition 2020 ainsi que les modalités de candidature sont disponibles sur la page de l’appel. 

 

  • Ouverture de l’appel : 2 juin 2020
  • Date limite de soumission : 15 août 2020 à minuit (heure de Paris).

 

 

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Les sites Natura 2000 ont-ils aussi un impact sur les espèces d’oiseaux et de papillons non ciblées ?

Cette équipe internationale, coordonnée par le European Topic Center on Biological Diversity (ETC/BD), a réalisé un travail de synthèse conséquent, en parti financé par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) dans son Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab), et par le groupe Electricité de France (EDF).

 

L’équipe de recherche a analysé des données recueillies dans plusieurs pays européens au cours d’enquêtes de sciences participatives – des programmes de surveillance à long terme basés sur le volontariat. Au total, 14 programmes de suivi d’oiseaux et 6 programmes de suivi de papillons ont été comparés au réseau de sites protégés. 

 

L’étude montre qu’au-delà des espèces ciblées, la moitié des 155 espèces d’oiseaux suivis bénéficient de la protection des sites Natura 2000, et particulièrement dans les forêts. Les chercheurs soulignent ici l’importance d’un suivi standardisé de la biodiversité et l’intérêt de rendre ces données disponibles afin d’évaluer l’état de la biodiversité à grande échelle et d’informer au mieux les acteurs des besoins de conservation.

 

Si la protection s’avère efficace pour les oiseaux, elle l’est en revanche moins pour les papillons. En effet, les sites Natura 2000 prennent avant tout en compte les exigences des oiseaux et peu celles des insectes. « 38 % des aires protégées sont des zones agricoles et des prairies fréquentées par les papillons » souligne Guy Pe’er, porteur du projet Cesab Lola BMS. « Or ceux-ci n’y bénéficient pas d’une bonne protection. La PAC (Politique agricole commune) n’a mis en place ni moyens ni plan de gestion pour soutenir les zones agricoles abritant pourtant une grande biodiversité». Guy Pe’er met aussi en avant le besoin « de cibler les efforts pour limiter les facteurs de pressions sur la biodiversité, et notamment l’agriculture », particulièrement cette année où sera discuté la réforme de la PAC et les objectifs post-2020 pour la CDB (Convention sur la diversité biologique).

 
 

[Communiqué] Les sites Natura 2000 ont-ils aussi un impact sur les espèces d’oiseaux et de papillons non ciblées ?

Cette équipe internationale, coordonnée par le European Topic Center on Biological Diversity (ETC/BD), a réalisé un travail de synthèse conséquent, en parti financé par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) dans son Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab), et par le groupe Electricité de France (EDF).

 

L’équipe de recherche a analysé des données recueillies dans plusieurs pays européens au cours d’enquêtes de sciences participatives – des programmes de surveillance à long terme basés sur le volontariat. Au total, 14 programmes de suivi d’oiseaux et 6 programmes de suivi de papillons ont été comparés au réseau de sites protégés. 

 

 

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[Appel à propositions] Ouverture de la 3ème édition de l’appel pour la gratification de stages de master 2

La Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) et ses partenaires lancent un appel pour soutenir l’accueil de stagiaires de master 2 dans des laboratoires de recherche français, métropolitains et ultramarins, travaillant sur la biodiversité.

 

Les équipes lauréates recevront un financement pour la gratification d’une ou d’un stagiaire pour un stage de 4 à 6 mois.

 

Date limite de soumission : 14 avril 2020, minuit CET (heure de Paris)

Toutes les informations sont disponibles sur la page de l’appel master 2020.

#ScienceDurable – La permaculture de la mer

En pratique, l’aquaculture multi-trophique intégrée consiste à inclure dans les écosystèmes aquacoles des organismes de niveaux trophiques inférieurs, comme de petits invertébrés, capables d’ingérer les rejets organiques, sources de pollution environnementale : « Les effluents d’élevage génèrent des nutriments (carbone, azote et phosphore). Ils peuvent, dans certains cas, s’accumuler dans le milieu et engendrer une réduction de la disponibilité en oxygène néfaste pour les espèces benthiques présentes à proximité. » poursuit la chercheuse. À l’heure où la demande mondiale de produits aquatiques est passée de 9,9 kg par habitant et par an à 18,6 kg en moins d’un demi-siècle, parvenir à un modèle durable devient un enjeu majeur pour le secteur aquacole « d’autant que cet accroissement n’est pas assuré par les pêcheries traditionnelles mais par l’aquaculture » poursuit Myriam Callier.

 

Afin de limiter les impacts sur l’environnement, l’Ifremer et dix autres instituts de recherche européens ont mené le projet IMTA-Effect. Leur objectif : évaluer les différents systèmes d’intégration des systèmes d’aquaculture multi-trophique intégrée dans des pays aussi différents que la France, le Portugal, la Roumanie et la Grèce. « Nous avons cherché à comprendre comment optimiser la chaine trophique entre le poisson, les microalgues, les mollusques et les détritivores, poursuit Myriam Callier. Nous avons travaillé sur chaque espèce pour bien comprendre sa biologie et son rôle dans les écosystèmes piscicoles. » Le choix de l’espèce extractive à intégrer est évidemment fonction du service de bioremédiation recherché.

 

Le projet IMTA-Effect s’est notamment concentré sur un ver polychète marin (Hediste diversicolor), détritivore, qui se nourrit des excréments des poissons. « On connait sa biologie, précise la chercheuse. Il vit dans des milieux naturellement riches en matière organique, tolère de faible concentration en oxygène et de fortes variations de température. Il a l’avantage de pouvoir aussi être valorisé comme appât de pêche. Son élevage en aquaculture multi-trophique intégrée pourrait permettre de diminuer son exploitation, car il est lui-même péché dans le milieu naturel. » Par ailleurs, son étude, à la fois réalisée en laboratoire et en milieu contrôlé, a permis de comprendre dans différentes conditions environnementales sa capacité de bioremédiation. « Nous sommes désormais en mesure de dire exactement combien de rejets de poisson le polychète marin peut ingérer au mètre carré. »

 

La difficulté est que chaque système d’élevage est spécifique. Répondre aux besoins de chaque espèce, surveiller les températures, les changements de saisons sont autant de facteurs à prendre en compte pour harmoniser les écosystèmes. Dans sa forme la plus complexe, un système en aquaculture multi-trophique intégrée peut comprendre jusqu’à quatre compartiments extractifs à équilibrer : les espèces autotrophes (macro et microalgues), les filtreurs (ex. bivalves), les détritivores (ex. polychètes, concombre de mer et autres invertébrés benthiques) et les bactéries. « Les résultats de ces études permettent de paramétrer des modèles qui serviront par la suite à prédire la capacité de bioremédiation de chaque maillon trophique et de tester différents scénarios, comme l’effet d’un changement de température » souligne la chercheuse.

 

À une échelle plus fine, le chercheur de l’Ifremer Cyrille Przybyla s’est lui intéressé au compartiment des microalgues qui ont pour particularité de purifier l’eau des bassins, mais aussi d’être potentiellement des aliments pour les poissons. Un enjeu majeur lorsque l’on sait que l’aquaculture impacte les stocks de petits poissons sauvages pêchés. Réduits en farine et en huile, ils sont utilisés pour nourrir principalement les poissons des fermes et plus largement certains animaux d’élevages ou domestiques. Pour alléger les pressions sur cette biodiversité marine, de très nombreux instituts de recherche à travers le monde se sont lancés dans une course pour sélectionner l’algue qui serait en mesure de devenir une source d’alimentation alternative pour le poisson d’élevage. « Notre démarche dans le projet MARINALGAE4Aqua, est tout autre, précise Cyrille Przybyla. Nous avons décidé de laisser faire la nature, en favorisant une polyculture algale naturelle. ». Pour cela, les effluents sont laissés en bassin ouvert permettant à la nature de mettre sa diversité locale au service de l’épuration de l’eau d’élevage et de la nutrition en aquaculture. « Ce n’est pas une seule algue qui vient se développer sur les effluents, mais toute une prairie de microalgues dont la diversité change en fonction des saisons. » Ces microalgues ont néanmoins des valeurs protéiques et lipidiques bien réelles. Cyrille Przybyla et son équipe sont arrivés à récolter 5kg de farine sèche, fertilisée par les effluents sortant des bassins d’aquaculture, qu’ils ont réussi à réinjecter dans l’alimentation du poisson « On a substitué 20% des farines et huiles de poissons dans la composition de l’alimentation des élevages. On est parvenu à améliorer la durabilité de l’aliment en se basant sur le principe de l’aquaculture multi-trophique intégrée, sans qu’il y ait de conséquence sur la croissance et le bien-être des poissons. » L’aquaculture multi-trophique intégrée peut donc se décliner sur le modèle des poupées russes et permettre à la filière aquacole d’opérer sa transition environnementale pour devenir la grande source d’alimentation durable qui participera de façon substantielle à nourrir de 8,5 milliards d’humains en 2030.

 

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Auteur : Julie de Bouville

Relecteurs : Myriam Callier, Cyrille Przybyla, Hélène Soubelet, Jean-François Silvain, Pauline Coulomb

 

[#ScienceDurable] La recherche française porteuse de solutions pour lutter contre le déclin de la biodiversité

Des solutions pour enrayer le déclin de la biodiversité existent. De nombreuses équipes de recherche y œuvrent quotidiennement. Chaque mois, de mars à octobre 2020, la FRB, ses instituts membres fondateurs – le BRGM, le Cirad, le CNRS, l’Ifremer, l’Ineris, INRAE, l’IRD, le Muséum national d’Histoire naturelle et l’Université de Montpellier – et l’alliance AllEnvi s’unissent pour valoriser les travaux et résultats des chercheurs qui travaillent sur des solutions et leviers d’action.

 

Rendez-vous dès mi-mars pour suivre le #ScienceDurable : « La science pour un monde durable ».

 

 

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[Veille scientifique] Biomimétisme et biodiversité

Afin de comprendre les enjeux et les risques de cette approche relativement récente de l’exploitation du monde vivant, la FRB a été missionnée par le ministère de la transition écologique et solidaire pour réaliser une veille scientifique et identifier ainsi les menaces et opportunités actuelles du biomimétisme pour la biodiversité. Le rapport issu de ce travail de veille ainsi qu’un résumé sont disponibles dans la rubrique “lire le rapport“. 

Biomimétisme et biodiversité

Le concept de biomimétisme ou bio-inspiration a été théorisé pour la première fois il y a une vingtaine d’année (cf. Janine Benyus : Biomimicry, Innovation Inspired by Nature). L’approche initiale défend une vision qui considère que cette démarche d’innovation « fait appel au transfert et à l’adaptation des principes et stratégies élaborés par les organismes vivants et les écosystèmes, afin de produire des biens et des services de manière durable, et rendre les sociétés humaines compatibles avec la biosphère ».

 

Le Biomimétisme identifie des solutions naturelles apparues au cours de l’évolution, c’est à dire des fonctions ou des rapports entre structures et fonctions chez les organismes vivants qu’il peut être intéressant de transposer à une fonction d’intérêt humain : sa finalité est de chercher, d’identifier et de d’industrialiser une solution à un problème humain.

 

Cette démarche est nécessairement interdisciplinaire, entre sciences fondamentales et sciences de l’ingénieur, et demande de la part des acteurs économiques la mobilisation de ressources significatives en matière de recherche et développement (R&D).

 

 

Le biomimétisme est la rencontre de plusieurs mondes, l’écologie,
les sciences de l’évolution, la biologie et l’ingénierie,
ou encore une interface entre sciences naturelles et industrie.

 

 

L’association Biomimicry Europa, créée en 2006 pour la promotion du biomimétisme, propose de distinguer trois niveaux d’inspiration : les formes biologiques, les matériaux et processus, les interactions.

 

En matière de recherche et développement, l’Allemagne a longtemps été en tête avec plus de 100 structures de recherche publiques impliquées et dix réseaux territoriaux spécialisés. Le Royaume-Uni et la Suisse sont aussi deux pays fortement impliqués en Europe.

 

En France, l’implication est plus récente, mais actuellement, plus de 175 équipes de recherche s’intéressent au sujet et plus de 100 entreprises font appel à cette démarche. Plusieurs Groupements de recherche (GDR) et Réseaux thématiques pluridisciplinaires (RTP) génèrent des initiatives structurantes autour de la chimie bio-inspirée, la mécanique des matériaux biologiques ou les micro-technologies inspirées des insectes. Le centre européen d’excellence en biomimétisme (Ceebios), créé en 2012, fédère un nombre croissant de grandes entreprises comme L’Oréal, LVMH, Engie, Vicat, Saint-Gobain, et bénéficie du soutien du ministère de la transition écologique et solidaire.

 

Les régions les plus impliquées en matière de R&D (compétences académiques) sont l’Ile-de-France, Auvergne-Rhône-Alpes et Nouvelle-Aquitaine, puis, à un niveau sensiblement équivalent, Occitanie, Provence-Alpes-Côte-d’Azur et Grand-Est.

 

Urgence : il faut sauver les forêts tropicales avant qu’elles ne disparaissent complètement !

Près de 12 millions d’hectares de forêts tropicales ont été détruits en 2018, soit l’équivalent de la surface de la Belgique, avec en tête le Brésil (un million d’hectares), le Congo (0,5 Mha) et l’Indonésie (0,3 Mha). Considérés comme des sanctuaires majeurs de biodiversité et conservant d’énormes stocks de carbone, notamment dans leurs sols, ces massifs sont défrichés à une vitesse et une ampleur alarmante.

 

Les causes de ces déforestations massives sont bien connues. Elles sont très clairement liées à la recherche de nouvelles terres agricoles pour servir de pâtures à un élevage bovin intensif en pleine expansion, pour cultiver le soja qui nourrira de gigantesques troupeaux, sur place ou ailleurs, ou pour planter de vastes étendues de palmiers à huile.

 

Afin de stopper la disparition en cours de ces joyaux inestimables que sont les écosystèmes forestiers tropicaux, le conseil scientifique de la FRB appelle a en rapidement supprimer les causes, toutes ancrées dans un modèle de commerce international de denrées agricoles ou alimentaires produites à coût économique minimal et coût écologique maximal.

Comment le vieux porc Souabe a rendu leur dignité aux éleveurs allemands de Hohenlohe

Au début des années 1980, Rudolph Bühler, un jeune ingénieur agronome allemand, rentre au pays reprendre la ferme familiale après quelques années passées en Asie à travailler dans l’humanitaire. Pleins d’idéaux et d’envies, le jeune Bühler se lance dans l’agriculture paysanne pour explorer des pistes alternatives à l’industrie agroalimentaire qui promet des profits élevés avec des races importées jugées plus productives. Ainsi sur le territoire de Hohenlohe, les producteurs de porcs élèvent depuis quelques temps un cochon venant de Hollande jugé plus productif que les races locales car produisant plus de viande mais néanmoins mal adapté à son environnement, car souvent malade et traité aux antibiotiques.

     Convaincu par ses années passées sur le terrain que les variétés locales supportent bien mieux la nourriture et le climat régional que les animaux importés, Rudolph Bühler s’allie à d’autres agriculteurs pour sauver de l’extinction une ancienne race porcine locale – issue d’un croisement entre le cochon chinois Meishan importé au 19e siècle – et une race allemande. Bien vite leur petite production se développe. Les journaux locaux titrent « Une viande de porc qui a du goût ! ».

     Fort de leur succès, les agriculteurs vont plus loin et établissent un système de tarification communautaire : les prix de la viande et les montants de production sont fixés en commun. Mais les coûts de production des porcs souabes sont environ 12 % plus élevés que pour les autres races dîtes « industrielles ». Au lieu de devenir un fardeau économique pour les éleveurs ceux-ci redistribuent une partie de leur bénéfice au réseau comme un soutien financier. Ces mesures garantissent ainsi un revenu stable et une juste part des bénéfices, tout en permettant une stabilité dans le processus de production.

 

Pour le chercheur en science politique Brendan Coolsaet, qui porte le projet JustConservation du Cesab de la FRB, ce cas est devenu un sujet d’étude.

     « Ce qui m’a intéressé chez les éleveurs allemands de Hohenlohe, c’est qu’il s’agissait d’un cas européen qui différait radicalement du système dominant, autant dans sa dimension agricole que dans sa dimension politique. » Pour le chercheur, prendre en compte ce type d’alternative permet d’apporter des solutions en matière de conservation de la biodiversité. « Je me suis inspiré des travaux sur la justice sociale et environnementale pour étudier le combat de ces éleveurs pour la conservation du porc Souabe. Je me suis particulièrement intéressé au concept de la « reconnaissance », qui je pense est clé pour tenter de comprendre les nouveaux mouvements sociaux pour l’environnement en général, et pour la conservation de la biodiversité en particulier. En effet, reconnaître et respecter la différence ce n’est pas seulement une question éthique ou morale, la recherche montre comment la reconnaissance des différences culturelles dans le contexte de la conservation permet d’apporter des solutions alternatives utiles, voir même vitales. » La conservation de la biodiversité agricole est à ce titre un bon exemple.

     Elle nécessite des connaissances agronomiques propres au milieu, que les agriculteurs ont progressivement perdues avec la modernisation. « L’agriculture industrielle a standardisé et centralisé les connaissances et les pratiques agricoles à travers le monde, et a conduit à un déclin massif de la biodiversité agricole, » poursuit Brendan Coolsaet. Reconnaître d’autres pratiques permet l’émergence d’alternatives, qui dans le cas du cochon Souabe sont à la fois respectueuses de l’environnement, du bien-être animal et des communautés rurales.

 

Afin de faire reconnaître leurs pratiques, les éleveurs allemands de Hohenlohe se sont employés à créer des espaces d’apprentissage collaboratifs autogérés et à s’associer à des universités allemandes pour lancer un projet commun dans le cadre du programme de recherche Horizon 2020 de l’Union européenne, en étudiant les liens entre les aliments traditionnels comme l’herbe et l’amélioration de la qualité de la viande par exemple. Rudolf Bühler ne s’est pas arrêté là.

     Cet été, invité par l’ONU au Forum politique de haut niveau pour le développement durable, l’éleveur a appelé à ce que les objectifs de développement durable (ODD) soient mis en œuvre au niveau local et d’ajouter que le passage à l’agriculture biologique et la gestion naturelle ne suffisait pas : « l’agriculture doit aller de pair avec une économie solidaire axée sur le bien-être animal et la justice sociale, en particulier sur la scène internationale. »

   En attendant, le porc Souabe fait des petits. Aujourd’hui, près de 1 500 fermes en Allemagne élèvent ce vieux cochon sauvé de l’extinction.

[Journées FRB 2019] Indicateurs et outils de mesure – Évaluer l’impact des activités humaines sur la biodiversité ?

« Plus d’un million d’espèces menacées », c’est le chiffre qui a marqué les esprits cette année, au moment de la sortie du rapport de l’Ipbes sur l’état mondial de la biodiversité et des services écosystémiques. Pertes et dégradations d’habitats, surexploitations ou encore pollutions sont autant de pressions induites ou accentuées par les activités humaines qui pèsent aujourd’hui considérablement sur la biodiversité. Le constat est désormais posé et la question de la mesure des impacts de nos activités, qui joue un rôle clé pour passer à l’action, est plus que jamais d’actualité.

 

Dans un contexte où la France accentue son engagement pour limiter ses impacts négatifs sur la biodiversité, au travers notamment du Plan Biodiversité, et participe à la préparation de la COP15 et de l’agenda post-2020 pour la biodiversité, les différents acteurs de la société ont aujourd’hui besoin d’indicateurs et d’outils de mesure. Les acteurs publics et privés, les décideurs politiques et économiques qui s’engagent, à l’échelle d’un territoire ou d’un pays, à estimer et limiter leurs impacts sur la biodiversité, sont en quête de réponses.

 

Les Journées FRB 2019 ont été l’occasion d’ouvrir la question de la mesure des impacts des activités humaines sur la biodiversité et d’informer sur des indicateurs et outils de mesure existants, leur utilisation actuelle et explorer ensemble leur potentiel d’appui à la décision en faveur de la biodiversité. Elles se sont tenues sur deux jours : une journée d’ateliers mardi 1er octobre, suivie d’une journée plénière mercredi 2 octobre. 

 

Retrouvez, dans les ressources téléchargeables ci-dessous :

  • Le programme de la journée plénière ainsi qu’un glossaire,
  • Les présentations de Sébastien Barot et Harold Levrel,
  • Un aperçu de la restitution des ateliers, 
  • Le compte-rendu de Frédéric Denhez.

 

Une publication reprenant l’ensemble du travail effectué autour des journées FRB 2019 devrait voir le jour en 2020.

Pourquoi maintenir la diversité génétique des animaux domestiques ?

À travers le monde, 14 espèces animales produisent 90 % des protéines consommées par les humains. Les processus d’intensification et de standardisation de la production agricole poussent à une certaine uniformisation de ces espèces. Une spécialisation toujours plus importante de ces animaux est alors recherchée et aboutit à une grande inégalité dans l’usage de ces races : certaines populations de vaches, sélectionnées par exemple pour leur grande production laitière, sont présentes partout dans le monde alors que des populations plus locales voient leurs effectifs baisser ou disparaissent. Cet appauvrissement de la diversité génétique pourrait avoir des conséquences importantes pour le futur de la production et les services rendus par les écosystèmes pâturés par des herbivores domestiques, en l’absence d’herbivores sauvages en nombre et avec une diversité suffisante. Alors comment maintenir une telle diversité ? Par quels acteurs passe cette conservation ? Pour quel rôle au sein des écosystèmes ? Anne Lauvie, chargée de recherche en gestion territoriale des populations animales locales à l’Inra nous éclaire sur les enjeux de la diversité génétique chez les animaux domestiqués.

[Appel à projets – Ecophyto2+]

Il vise à soutenir les efforts de recherche dans le domaine de la connaissance des impacts des produits phytopharmaceutiques sur la santé et sur les écosystèmes. Les recherches pourront permettre de mieux caractériser les liens entre les expositions à ces substances aux niveaux rencontrés dans l’environnement et la survenue d’effets, en particulier chroniques, notamment du fait des expositions à des faibles doses, sur les organismes et/ou les écosystèmes. Les résultats obtenus devront permettre d’appuyer les politiques publiques et notamment la réduction des risques liés aux produits phytopharmaceutiques, conformément au plan Ecophyto 2+.

 

Toutes les informations sur la page de l’appel Ecophyto2+.

Les écosystèmes agricoles : une évaluation dans le cadre du programme EFESE

Depuis son émergence au Néolithique, l’agriculture modèle les écosystèmes afin de les rendre plus productifs et de couvrir les besoins croissants de la population humaine en produits végétaux et animaux. Les écosystèmes agricoles se caractérisent donc par un fort degré d’anthropisation qui résulte des actions de reconfiguration des milieux et de gestion des sols et de la biomasse par les agriculteurs. La tendance constatée depuis les années 1950 en France est à l’agrandissement de la taille moyenne des exploitations, à la réduction du nombre d’espèces cultivées et à la simplification des structures paysagères. Tous ces facteurs entrainent une baisse de la diversité biologique et de l’abondance des espèces associées aux écosystèmes agricoles.

Nourrir la planète sans l’uniformiser : les dangers de la pollution à l’azote

L’azote, bien que majoritaire dans notre atmosphère (78 % de l’air), est un élément limitant de la croissance pour les règnes animal et végétal dans de nombreux écosystèmes (Vitousek & Howarth, 1991). Il y a sur Terre beaucoup d’azote inerte (N2), mais peu de composés azotés réactifs comme le nitrate (NO3), l’ammonium (NH4) et l’ammoniac (NH3) qui sont les principales formes assimilables par les plantes, à l’exception de quelques familles botaniques comme les légumineuses fixant l’azote atmosphérique grâce aux symbioses avec des bactéries. Ceci amène un paradoxe évident qui resta longtemps indépassable : l’azote est partout sur la planète mais naturellement accessible seulement par quelques organismes qui conditionnent l’ensemble de l’accès à cette ressource pour toute la chaîne du vivant. Le cycle de l’azote, naturel comme anthropique, fut donc au départ basé sur une économie du recyclage de l’azote contenu dans les matières organiques en décomposition.

 

Les assolements1 dès le Moyen-Âge, les pratiques agricoles cherchant à bénéficier au mieux des fumures animales, la collecte des « boues, racluns et immondices urbaines » dans les villes du monde témoignent de ce souci historique et général de réinjecter cet engrais « naturel » dans les sols (Barles, 2005). Jusqu’au début du 20e siècle, « le fumier était or » selon les mots de Victor Hugo dans Les Misérables, invitant les villes à fumer la plaine au lieu de le jeter aux égouts « en empestant les eaux et en appauvrissant les sols ». Et puis, il y a un siècle, deux chimistes allemands inventent les engrais minéraux et le procédé Haber-Bosch qui permet la synthèse de l’ammoniac à partir de l’azote de l’air et l’hydrogène. C’est peu dire que cette histoire fût un succès. Associés à de nouvelles techniques culturales et de nouvelles variétés de pesticides, les engrais chimiques produits à échelle industrielle ont permis la révolution verte et l’intensification agricole mondiale, accroissant les rendements et permettant à de nombreuses régions de s’approcher de l’autosuffisance alimentaire. Cependant, les coûts environnementaux et sociaux de l’agriculture industrielle ont longtemps été ignorés. Ils se sont cumulés à d’autres coûts liés à d’autres transformations concomitantes : l’accroissement des combustions d’hydrocarbures d’origines domestique et industrielle a multiplié les apports d’une autre source d’azote réactif, les oxydes d’azote, dont certaines formes comme le protoxyde d’azote (N2O) entrent dans la catégorie des gaz à effet de serre. La durabilité de ce système est aujourd’hui mise en question à mesure que la dégradation de la qualité des eaux de surface et souterraines ou encore que l’impact sur les sols et la biodiversité se font sentir (Gowdy & Baveye, 2019).

 

Le cachemire à petits prix : un commerce qui coûte cher aux écosystèmes mongols

Selon une étude fondée sur des données satellitaires, un très fort recul de la végétation dans les steppes mongoles est en cours. Il serait largement dû à l’augmentation du bétail dans le pays. Si les variations des précipitations jouent un rôle important, le surpâturage paraît en être la cause principale. Cette baisse de biomasse végétale est loin d’être homogène sur l’ensemble du territoire, et pose encore question. Cependant, dans les zones limitrophes du désert de Gobi, on attribue plus de 80 % de la perte de végétation au cheptel. Et sur l’ensemble du pays, c’est une perte de 12 % de territoire végétalisé qui a été comptabilisée entre 2002 et 2012 (Hilker et al., 2014). Cette dégradation de la steppe se traduit par une désertification qui prend notamment sa source dans le développement d’un commerce lucratif : celui du cachemire.

Si, depuis la sortie de la Mongolie du bloc soviétique en 1990, les produits de l’élevage comme la viande et la laine ont connu un effondrement de leurs prix, le cachemire, lui, se porte bien et l’élevage des “chèvres cachemires” s’est accru.

Les plantes favorisent-elles leurs parents ?

Les comportements de préférence ou de protection entre parents ont été largement documentés chez les animaux et même expliqués en termes d’avantage évolutif. Ainsi les individus apparentés trouveraient avantage à collaborer pour transmettre leurs gènes.

Il y a plus de dix ans, une biologiste canadienne avait émis l’idée qu’il pouvait en être de même pour les plantes. Cependant, comme ces dernières ne possèdent pas le système nerveux qui permet aux animaux de reconnaître leur parentèle, sa théorie n’a pas été considérée comme sérieuse. Depuis, la science a démontré que les plantes pouvaient distinguer les racines relevant du “soi” et les racines relevant du “non-soi”, ouvrant une brèche vers un élargissement des perspectives en matière de comportement des plantes.

Les travaux scientifiques récents présentés par Elisabeth Pennisi dans une synthèse pour le journal Science en janvier 2019 vont encore plus loin.

 

Les conséquences pratiques que sous-tendent les premières études sur la reconnaissance familiale chez les plantes et ses conséquences ont suscité l’intérêt de la communauté scientifique. Les mécanismes en jeu pour favoriser les individus apparentés sont divers : certaines espèces limitent l’étendue de la propagation de leurs racines, d’autres modifient le nombre de fleurs qu’elles produisent et quelques-unes inclinent ou déplacent leurs feuilles pour minimiser l’ombrage des plantes voisines. Néanmoins, les questions persistent : une plante identifie-t-elle un parent génétique ou reconnaît-elle simplement que sa voisine est plus ou moins semblable à elle-même ?

 

“Il semble que chaque fois qu’un scientifique cherche un effet de préférence parentale chez les plantes, il le trouve”, a déclaré André Kessler, un spécialiste en écologie chimique à l’université de Cornell.

 

Un des premiers exemples intéressants est celui de la sauge buissonnante (Artemisia tridentata) en Amérique du nord. Attaqués par des herbivores, les arbustes libèrent des substances chimiques volatiles qui poussent l’arbre voisin à produire des composés toxiques pour leurs ennemis communs. L’écologue Richard Karban, de l’Université de Californie à Davis, s’est demandé si les parents étaient prévenus de manière préférentielle. Il avait déjà été établi que les buissons se divisaient en deux “chémotypes”1, émettant soit du camphre soit de la thuyone lorsque leurs feuilles sont endommagées. L’équipe a montré que les chémotypes étaient héritables, ce qui en faisait un signal potentiel de reconnaissance de parentèle. En 2014, les chercheurs ont indiqué que, lorsque les substances volatiles d’une plante présentant un chémotype donné étaient appliquées sur le même type de plante, ces plantes produisaient des défenses anti herbivores plus fortes et présentaient beaucoup moins de dommages causés par les insectes que lorsque les substances volatiles provenaient d’une plante de l’autre chémotype.

 

Un second exemple est fourni par la moutarde Arabidopsis thaliana. Il y a environ huit ans, Jorge Casal, biologiste spécialiste des plantes à l’université de Buenos Aires, a remarqué que les plants d’Arabidopsis poussant aux côtés de parents modifient l’arrangement de leurs feuilles pour réduire l’ombrage sur leurs voisines, mais qu’elles ne le font pas lorsque les voisins ne leur sont pas apparentés. Leur perception de la présence de parents était toutefois un mystère. En 2015, l’équipe de Casal a découvert que la force avec laquelle la lumière est réfléchie sur les feuilles voisines donne une indication de la parenté et initie les réarrangements dans les feuilles. Des membres d’une même famille ont tendance à produire des feuilles à la même hauteur et par conséquence à renvoyer plus de lumière vers leurs voisines. L’équipe de chercheurs a mis en évidence que cette réduction d’ombrage favorisait une croissance plus vigoureuse et une meilleure production de graines.

Ce fut le premier cas de reconnaissance des parents chez les plantes où la relation complète incluant la reconnaissance de la parentèle (signal et récepteur) et ses conséquences a été mis en évidence. Depuis lors, Casal et son équipe ont montré en 2017 dans les Actes de la National Academy of Sciences que, lorsque des tournesols apparentés sont plantés les uns à côté des autres, ils s’organisent également pour ne pas se gêner entre eux. Les tournesols inclinent leurs tiges en alternance d’un côté ou de l’autre de la rangée. Pour pousser encore plus loin l’expérience, ils ont planté entre 10 et 14 plantes apparentées par mètre carré – une densité plus élevée que dans les plantations commerciales – et ont obtenu 47 % d’huile en plus lorsque les plantes étaient libres de leur mouvement (et donc capables de s’éloigner les unes des autres) comparées aux mêmes plantes contraintes de pousser droit.

 

Plus tard, Susan Dudley, écologiste de l’évolution des plantes (university McMaster à Hamilton, au Canada) a déclaré : “nous devons reconnaître que les plantes ne détectent pas seulement s’il fait jour ou nuit, ou si elles ont été attaquées, mais qu’elles reconnaissent aussi avec qui elles interagissent”. Estimant que les mêmes forces évolutives qui conduisent à favoriser la parentèle devraient s’appliquer aux plantes, la chercheuse a conduit des expérimentations avec de la roquette des mers (Cakile edentula), une plante succulente trouvée sur les plages nord-américaines. Elle a ainsi publié en 2017 une étude démontrant que le système racinaire de la roquette était moins développé lorsqu’elle était cultivée en pots avec des plantes apparentées par rapport à la même roquette cultivée avec des plantes non apparentées de la même population. Elle a suggéré que la plante avait réduit la concurrence de ses propres racines en laissant plus de place à ses parents pour obtenir de la nourriture et de l’eau. Si son étude a été vivement critiquée tant en termes de rigueur statistique qu’en termes de conception, néanmoins d’autres chercheurs ont depuis publié des découvertes similaires.

 

Le 22 mai 2018, Rubén Torices et ses collègues de l’université de Lausanne (Suisse) et du Conseil national de la recherche espagnole ont publié dans Nature Communications les résultats d’une étude démontrant un phénomène de coopération chez une autre brassicacée d’ornement, Moricandia moricandioides. Après avoir cultivé 770 plantes en pot, seules ou avec trois ou six voisins de parenté variable, l’équipe a mis en évidence que les plantes cultivées avec des parents produisaient plus de fleurs, ce qui les rendaient plus attrayantes pour les pollinisateurs. Les expositions florales étaient particulièrement élevées dans les pots les plus peuplés. Torices, aujourd’hui enseignant à l’université King Juan Carlos à Madrid, qualifie ces effets “d’altruistes”, car chaque plante abandonne individuellement une partie de son potentiel de production de graines pour dépenser plus d’énergie dans la production de fleurs avec une présomption d’une meilleure fertilisation au bénéfice de la communauté.

 

Chui-Hua Kong, spécialiste en écologie chimique (université d’agriculture de Chine, Beijing), exploite un effet similaire pour stimuler les rendements chez le riz. Son laboratoire étudie des variétés de riz émettant des produits chimiques à effet désherbant à partir de leurs racines, mais qui obtiennent des rendements trop faibles pour remplacer les variétés couramment cultivées qui nécessitent des herbicides. Toutefois, en septembre 2018, à l’issue de tests de terrain conduits pendant trois ans, les chercheurs ont publié dans le journal New Phytologist des résultats démontrant que des variétés de riz “autoprotectrices” (capables de reconnaître leur parentèle), avaient des rendements augmentés de 5 % lorsqu’elles étaient cultivées avec des parents, plutôt qu’avec des plantes non apparentées.

 

Pour tester l’approche à plus grande échelle et confirmer que ces liens familiaux suggérés pouvaient être exploités pour améliorer les rendements des cultures, les chercheurs ont répété l’expérience dans des rizières du sud de la Chine.

 

Brian Pickles, écologiste à l’université de Reading au Royaume-Uni, propose, quant à lui, que la reconnaissance de la parentèle puisse aider les forêts à se régénérer. En traçant les flux de nutriments et les signaux chimiques entre les arbres reliés par des champignons souterrains, il a montré que les sapins nourrissent préférentiellement leurs parents et les avertissent des attaques d’insectes. Les résultats suggèrent qu’une famille de sapins grandirait plus rapidement qu’une communauté de sapins non apparentés.

 

Pour certains biologistes, ce nouveau paradigme des plantes en communication et en coopération nécessite encore la production de preuves. “Je ne pense pas que nous ayons actuellement des preuves convaincantes d’une reconnaissance parentale chez les plantes”, déclare Hélène Fréville, biologiste des populations à l’Inra de Montpellier. Laurent Keller, biologiste de l’évolution à l’université de Lausanne, a montré au contraire que les signes apparents de reconnaissance de la parentèle chez Arabidopsis provenaient plutôt de différences innées entre les plantes. Il appelle à plus de rigueur dans les études pour écarter d’autres explications potentielles, tout en prédisant que des preuves plus solides de la reconnaissance de la parentèle chez la plante émergeront. Karban, lui, est déjà pleinement convaincu. “Nous apprenons que les plantes sont capables d’un comportement beaucoup plus sophistiqué que nous avions pensé, c’est vraiment fascinant”.

 

1. Un chémotype est une entité chimique distincte au sein d’une même espèce (ensemble d’individus interféconds)

Devons-nous choisir entre nourrir l’humanité et protéger la nature ? Modélisation des liens entre l’environnement et la démographie humaine

La capacité de la population humaine à continuer de croître dépend fortement des services écosystémiques fournis par la nature. Or ceux-ci se dégradent de plus en plus à mesure que le nombre d’individus augmente, ce qui pourrait menacer le bien-être futur de la population humaine, comme cela a déjà été constaté par le passé avec la disparition de plusieurs civilisations humaines.

 

En construisant un modèle dynamique pour conceptualiser les liens entre la proportion mondiale des habitats naturels et la démographie humaine à travers quatre catégories de services écosystémiques (approvisionnement, réglementation, loisirs culturels et informationnels) les chercheurs ont essayé de déterminer si la trajectoire actuelle du développement humain pouvait conduire à un effondrement similaire.

 

Ils ont montré en premier lieu qu’il existe généralement un compromis entre la qualité de vie et la taille de la population humaine qui suit quatre scénarios :

  • Deux scénarios de déclin de la population :
    • Dans le cas d’une production alimentaire forte au détriment des services de régulation tels que la qualité de l’air et de l’eau, pollinisation ou la régulation des maladies, entraînant une augmentation du taux de mortalité et une dégradation de la nature
    • En cas de surexploitation des terres entraînant une diminution de la production alimentaire ou de baisse de l’efficacité de la production alimentaire qui ne couvre plus les besoins de la population
  • Un état de famine stable où la population continue de croître avec une faible alimentation
  • Un futur souhaitable en cas de compromis entre la conversion des terres pour nourrir toute la population et la conservation de la biodiversité et des services écosystémiques

 

Les deux scénarios de déclin sont dictés par des processus antagonistes entre conversion des terres pour l’agriculture et conservation des milieux naturels. Cependant, les deux sont incontestablement négatifs pour le bien-être humain et la nature : la conversion d’un trop grand nombre de terres naturelles en terres exploitées a des conséquences négatives sur les services de régulation et donc sur la population. Au contraire, la conservation de la nature préserve les services de régulation, mais est responsable de famine, si elle ne laisse pas de place à la production agricole.

 

La seule solution pour un futur souhaitable est de préserver à la fois les services écosystémiques d’approvisionnement et de régulation par un compromis équilibré entre la conservation de la nature et la conversion des terres pour l’agriculture. Ce scénario intermédiaire n’est possible qu’en évitant un emballement de la démographie et en conservant une population relativement « petite » autour de 10 milliards d’individus.

Comment mesurer la relation entre la biodiversité alimentaire et l’adéquation nutritionnelle des régimes alimentaires ?

En conséquence, les régimes alimentaires humains qui étaient composés d’une grande variété de plantes et d’animaux ont progressivement été remplacés par des régimes alimentaires composés principalement d’aliments transformés et comprenant un nombre limité de denrées alimentaires (Drewnowski et al., 1997).

Ces nouveaux régimes sont sources de nouvelles maladies, dites maladies métaboliques non transmissibles (obésité, diabètes, hypertension, maladies cardio-vasculaires) et responsables de véritables épidémies au niveau mondial. Il est en effet établi que les régimes de faible qualité nutritionnelle constituent le principal facteur de risque de mauvaise santé dans le monde entier (Abajobir et al., 2017) et sont corrélés à des indicateurs socio-économiques et politiques tels que le revenu, l’éducation, la cohésion et les inégalités sexuelles ou sociales.

 

Alors qu’on estime à 300 000 les espèces de plantes comestibles disponibles pour l’Homme, plus de la moitié des besoins énergétiques mondiaux sont actuellement satisfaits par quatre cultures : le riz, les pommes de terre, le blé et le maïs.

La biodiversité agricole et sauvage revêt un aspect essentiel pour la bonne nutrition humaine et la durabilité des systèmes alimentaires. Cette biodiversité contribue notamment à la résilience des exploitations agricoles, en particulier face aux aléas tels que les effets du changement climatique, les épidémies et les fluctuations des prix du marché. Dans les pays objets de l’étude, l’apport d’aliments issus de cueillette dans la nature est une source complémentaire de résilience des systèmes alimentaires, en particulier pendant la période où les récoltes sont les moins abondantes.

De manière surprenante, les points chauds (“hot spots”) de biodiversité sauvage et agricole mondiaux coïncident souvent avec des zones de grande pauvreté, de forte dégradation des écosystèmes et de malnutrition. Les populations qui s’y trouvent vivent ainsi souvent dans un environnement dégradé où l’érosion de la biodiversité sauvage et cultivée réduit la diversité alimentaire disponible et donc diminue la qualité des régimes en fonction des saisons, entrainant des problèmes de malnutritions.

 

En restaurant les écosystèmes et leurs fonctions, la gestion et l’usage durable de la biodiversité alimentaire cultivée et sauvage peut remédier aux carences en micronutriments des populations vulnérables par le soutien de systèmes de production avec une plus grande diversité d’espèces consommables.

[Journée FRB 2018] Biodiversité, transition alimentaire et santé

À l’occasion de ses 10 ans, la journée annuelle de la FRB a pour ambition de faire un point sur l’état des connaissances scientifiques et animer des discussions avec les parties prenantes sur les voies d’une transition alimentaire qui permettraient notamment, via l’évolution des systèmes de production alimentaire, de contribuer à la préservation de la biodiversité et à l’amélioration de la santé humaine. Des questions majeures se posent en effet, comme l’adaptation des populations humaines à la modification rapide des régimes alimentaires ou encore la compréhension des impacts sur la biodiversité liés à l’appropriation de la biomasse par les sociétés humaines dans un contexte d’évolution des modes alimentaires et des systèmes agricoles.

 

À l’issue de chaque session, un dialogue entre chercheurs et acteurs de la société permettra de discuter des solutions collectives pour imaginer et mettre en œuvre un développement durable des sociétés humaines.

 

Action n°11 : Je limite ma consommation d’huile de palme

L’île de Bornéo a perdu un tiers de ses forêts primaires1 entre 1973 et 2015 (Gaveau et al. 2016). C’est bien en Indonésie, plus qu’en Amazonie, que la disparition des forêts primaires est la plus rapide, avec 840 000 hectares perdus par an en 2012 (Margono et al. 2014). La plantation industrielle de palmiers à huile (Elaeis guineensis) y constitue l’une des principales causes de déforestation, avec la production de pâte à papier et de bois (Abood et al. 2015). Dans ce pays, premier producteur d’huile de palme avant la Malaisie, la superficie totale plantée en palmiers a été multipliée par sept en une vingtaine d’années (Carlson et al. 2012).

 

L’huile de palme est l’huile la plus produite dans le monde avec 70 millions de tonnes (USDA 2018). Elle est destinée à l’industrie alimentaire2 et à la production de cosmétiques3, de produits d’entretien, d’agro-carburants et d’électricité. La déforestation associée touche non seulement l’Asie, mais aussi l’Amérique latine et l’Afrique (Varsha et al., 2016). Au niveau mondial, sa production représente 8% de la déforestation imputée aux cultures, après le soja (19%) et le maïs (11%) (Union Européenne, 2013). Si le problème affecte des contrées lointaines, l’Union Européenne est le deuxième importateur et le troisième consommateur d’huile de palme au niveau mondial (USDA, 2018). Et cette consommation intensive n’est pas sans conséquence sur les plantes et les animaux dans les pays producteurs.

 

“Le déclin le plus sévère des orangs-outans a eu lieu dans des environnements détériorés par la récolte de bois et par les plantations industrielles d’huile de palme.”

 

Parmi les 193 espèces menacées par la production d’huile de palme, il faut citer l’orang-outan (Pongo pygmaeus), en danger critique d’extinction selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (Ancrenaz et al., 2016). Une étude internationale s’est tout récemment intéressée à l’influence de l’extraction de ressources naturelles, y compris l’huile de palme, sur ces primates (Voigt et al., 2018). Les auteurs sont allés sur le terrain compter les nids que ces grands singes construisent pour s’abriter la nuit. À l’aide de ces données et de modèles informatiques, ils ont estimé à 100 000 le nombre d’orangs-outans tués entre 1999 et 2015. Si la cause principale du déclin des primates est la chasse illégale, la moitié des orangs-outans de l’île de Bornéo se trouvait en 2015 dans des habitats dégradés par la récolte de bois, les plantations industrielles et la déforestation (Voigt et al., 2018). Le déclin le plus sévère a eu lieu dans ces environnements détériorés. Mais est-ce là la seule espèce victime de l’huile de palme ? Qu’en est-il de l’impact sur la biodiversité de façon plus générale ?

 

“Dans les plantations de palmiers à huile, l’abondance des chauves-souris insectivores diminue, faute de proies, et les oiseaux “spécialistes” disparaissent.”

 

Des chercheurs ont compilé et analysé 25 articles scientifiques consacrés aux conséquences de la production d’huile de palme sur la biodiversité. D’après leurs résultats, les plantations de palmiers à huile abritent, sans surprise, un nombre d’espèces (richesse spécifique) inférieur à celui de forêts primaires et secondaires (Savilaakso et al., 2014). Certaines espèces voient leur abondance diminuer, comme la plupart des chauves-souris insectivores, faute de proies. Les plantations défavorisent également les espèces d’oiseaux les moins répandues et les plus exigeantes en termes de conditions environnementales et de ressources (oiseaux dits spécialistes). Cette disparition des oiseaux spécialistes dans les plantations s’expliquerait par une végétation au sol réduite par rapport aux forêts. En outre, les conditions plus chaudes et sèches qui règnent dans ces plantations nuisent à certaines espèces de fourmis, de coléoptères et d’abeilles. D’où un impact très probable sur les services écosystémiques tels que la pollinisation, le contrôle des ravageurs de culture et le fonctionnement des sols (Savilaakso et al., 2014).

 

Un mode de gestion adapté pourrait réduire ces conséquences néfastes sur la biodiversité. En effet, des études ont démontré que le nombre d’espèces d’oiseaux était supérieur dans les plantations des petits producteurs, en comparaison avec celles des industriels (Azhar et al., 2011, dans Savilaakso et al., 2014). La recherche devrait aussi se pencher sur l’effet des standards de certification durable tels que RSPO (Roundtable on Sustainable Palm Oil).  En effet, ce dernier, qui rassemble depuis 2004 des entreprises et des ONG, fait l’objet de vives critiques, portant sur des principes et critères trop peu contraignants qui favoriseraient les industriels au détriment des petits producteurs, des sanctions trop peu dissuasives et pas assez appliquées en cas de non respect, ainsi que des problèmes de traçabilité (FIAN/CNCD, 2018). Cela explique en partie des initiatives de boycott, parmi les consommateurs, de tout produit contenant de l’huile de palme, labellisée ou non.

 

“Les huiles de coco et de coprah sont elles aussi produites dans les pays tropicaux et prennent potentiellement la place de forêts.”

 

Cependant, les alternatives les plus fréquentes à l’huile de palme ne sont pas non plus sans incidence sur la biodiversité. Dans les cosmétiques, les huiles de coco et de coprah (chair de la noix de coco) sont elles aussi produites dans les pays tropicaux et prennent potentiellement la place de forêts. Dans l’alimentation, les huiles de colza et de tournesol, certes cultivées en Europe, le sont souvent de façon intensive et nécessitent, comme le souligne un récent rapport de l’UICN, des surfaces plus vastes pour une production équivalente (Meijaard et al. 2018). Alors qu’il est parfois compliqué de modifier les processus industriels (en termes de quantités disponibles ou de caractéristiques physico-chimiques requises), les consommateurs peuvent choisir de diversifier les sources d’huiles dans les produits quotidiens et  privilégier certaines huiles, telles que l’olive, la noix, l’amande, l’argan, les pépins de raisins ou les noyaux d’abricot, parfois locales et plus durables. Le label Agriculture biologique de l’Union Européenne reste alors un outil précieux pour se repérer.

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1 Les forêts primaires sont relativement préservées des activités humaines et concentrent une biodiversité particulièrement riche. Les forêts secondaires, en revanche, ont généralement repoussé après la destruction d’une forêt primaire. Forêts primaires et secondaires sont détruites pour les plantations.

2 L’huile de palme alimentaire est parfois mentionnée dans la composition sous les termes imprécis de « graisse végétale » et « huile végétale ».

3 Dans la composition des cosmétiques, l’huile de palme est indiquée par la mention Elaeis guineensis Oil. Ses dérivés les plus courants : Sodium Palmate, Isostearyl Palmitate et Palmitate d’Isopropyl. Les dérivés suivants en sont souvent issus, sauf mention contraire du fabricant : Lauryl Glucoside, Sodium Lauryl Sulfate, Cetearyl Alcohol, Glyceryl Distearate, Isopropyl Myristate, Dodecanol(en gras, partie du nom indiquant le lien possible avec l’huile de palme).

Biodiversité, transition alimentaire et santé

En 2030, la population humaine devrait atteindre 8,6 milliards d’habitants. La production mondiale agricole, aquacole et halieutique devrait augmenter de 20 % (FAO, 2018) au cours des dix prochaines années. Or ni le taux d’accroissement des rendements des quatre principales céréales – blé, maïs, pomme de terre et riz – qui répondent à la plupart des besoins nutritionnels (Lachat et al., 2017), ni les stocks de poissons aujourd’hui surexploités (FAO, 2013) ne pourront couvrir les besoins d’une population grandissante.

 

À ce jour, la réponse donnée à l’augmentation de la demande alimentaire a été de convertir des terres en surfaces agricoles et d’intensifier l’agriculture et la pêche, autrement dit, d’augmenter la quantité des aliments sans se soucier de leur qualité, alors même que la biodiversité alimentaire est indispensable à une bonne qualité de notre alimentation notamment en terme de micro nutriments.

 

Cette réponse n’est pas sans conséquence sur l’environnement et sur la santé humaine. La plus grande cause de la perte de biodiversité au cours des 50 dernières années a été la transformation des habitats, principalement en raison de la conversion d’écosystèmes naturels et semi naturels. L’agriculture intensive, et en particulier l’usage des pesticides qui lui est généralement associé, cause par exemple 250 000 décès par an (OMS).

 

Afin de permettre à nos sociétés de se nourrir sainement, dans le respect de la biodiversité, les systèmes de production alimentaire doivent être repensés pour préserver les écosystèmes qui produisent des denrées et qui permettent aux sociétés humaines d’en retirer des services tels que la captation du CO2, l’épuration de l’eau ou de l’air, indispensables à une bonne qualité de vie.

 

La journée FRB du 27 septembre : « Biodiversité, transition alimentaire et santé » fera un point sur l’état des connaissances scientifiques sur ces enjeux. Elle se donne aussi pour ambition d’animer des discussions avec les parties prenantes sur les voies d’une transition alimentaire effective et partagée par le plus grand nombre. Car si les solutions existent, des questions majeures doivent encore trouver leurs réponses. Comment faire en sorte que ces solutions pensées au niveau mondial puissent s’appliquer localement ? Et à quel prix politique, et social ?

 

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Action n°1 : Je mange bio

En France, près des ¾ de la population consomment des aliments bio au moins une fois par mois (Agence Bio / CSA 2018). Si la motivation principale des acheteurs de produits bio est de “préserver leur santé” (69 % des répondants), la seconde est de “préserver l’environnement” (61 %). Mais l’agriculture biologique répond-elle à ces objectifs ? En 2014, une équipe de recherche (Tuck et al. 2014) a analysé près d’une centaine d’études publiées au cours des trois dernières décennies en comparant des systèmes d’agriculture biologique avec des systèmes agricoles conventionnels. En moyenne, le nombre d’espèces présentes dans le milieu, appelé richesse spécifique, est d’un tiers supérieur en bio par rapport à l’agriculture conventionnelle (Tuck et al. 2014). Il faut toutefois considérer ce résultat avec précaution, du fait de données hétérogènes. En effet, si le nombre d’espèces est toujours plus élevé en bio qu’en agriculture conventionnelle, il varie en fonction du type de cultures. Ainsi, la différence entre bio et conventionnel est plus élevée dans un champ de céréales – où les pesticides sont très fréquents – que dans un verger (Tuck et al. 2014).

 

Selon cette étude, les plantes présentes dans l’environnement  bénéficient davantage de l’agriculture biologique que les oiseaux, les arthropodes et les micro-organismes (Tuck et al. 2014), peut-être  en raison d’un usage plus massif d’herbicides dans les cultures conventionnelles. Cependant, d’autres éléments de biodiversité seraient probablement favorisés par l’agriculture biologique, en particulier les oiseaux, dont les pesticides diminuent les ressources alimentaires. De façon plus globale, sur les 38 études consacrées à l’impact de la réduction des engrais, herbicides et autres pesticides dans plusieurs pays européens répertoriées par des chercheurs, 34 ont montré un effet positif sur certains invertébrés, plantes et oiseaux (Dicks et al. 2018).

 

Si les pratiques de l’agriculture bio s’illustrent par l’interdiction ou la limitation stricte de l’usage d’engrais synthétiques et de pesticides, elles présentent aussi d’autres avantages pour la biodiversité. Les rotations de cultures permettent par exemple de contrôler les ravageurs, tandis que l’usage de compost, d’engrais animal ou végétal enrichit les sols.

 

“Il serait possible de nourrir plus de 9 milliards d’êtres humains en 2050 avec 100 % d’agriculture biologique, à condition de réduire le gaspillage alimentaire et de limiter la consommation de produits d’origine animale.”

 

Consommer bio permet donc bien d’agir en faveur de la biodiversité. Mais ce type de consommation pourrait-il se généraliser ? En effet, d’après ses détracteurs, l’agriculture biologique présenterait des rendements insuffisants pour subvenir aux besoins d’une planète à la démographie galopante (Connor 2008). Une idée répandue que réfute une étude publiée en novembre dernier par la revue Nature Communications (Muller et al. 2017). D’après les chercheurs, il serait possible de nourrir plus de 9 milliards d’êtres humains en 2050 avec 100 % d’agriculture biologique, à condition de réduire le gaspillage alimentaire et de limiter la consommation de produits d’origine animale. Par ailleurs, les travaux de Vincent Bretagnolle et son équipe sur la zone atelier « Plaine et Val de Sèvre » depuis 1994 démontrent que réduire les apports d’herbicides et d’engrais azotés de 30 à 50 % peut être effectué sans réduction des rendements (Gaba et al. 2016). De même, d’autres chercheurs ont estimé qu’il était possible, dans près de deux tiers des 946 fermes françaises étudiées, de réduire la quantité de pesticides de 42 % sans aucun effet négatif sur la productivité ni sur la rentabilité économique (Lechenet et al. 2017).

 

Il serait donc possible, en termes de rendement, de se tourner vers le bio. Outre le bénéfice pour la biodiversité, c’est aussi notre santé, voire même nos capacités mentales, que nous protégerions. Le quotient intellectuel (QI) de certaines populations humaines aurait baissé de deux points par décennie, d’après des études danoises et norvégiennes, dont une toute récente (Bratsberg & Rogeberg 2018). Or, une cause plausible d’une telle diminution réside dans l’interférence de certains polluants environnementaux – notamment des pesticides contenus dans les aliments – avec l’action des hormones thyroïdiennes (Bellanger et al. 2015). Ces dernières jouent un rôle crucial dans la myélinisation des nerfs, processus qui accélère la transmission entre les neurones. C’est pourquoi l’exposition à ces substances allonge probablement notre temps de réaction face aux situations. Selon Barbara Demeneix, professeure au Muséum national d’Histoire naturelle, interrogée par France Culture, manger bio constituerait une bonne solution en attendant d’adopter des mesures législatives contre ces polluants. En outre, manger bio préserverait notre système cardio-vasculaire. La proportion de personnes souffrant d’un syndrome métabolique – un ensemble de troubles, dont l’hypertension artérielle, qui augmentent les risques cardio-vasculaires et de diabète de type II – est d’environ 12 % chez ceux qui se nourrissent le plus fréquemment d’aliments bio, contre plus de 20 % chez ceux qui n’en consomment que très peu (Baudry et al. 2017).

 

En France, à la suite des États généraux de l’alimentation, le gouvernement a annoncé l’attribution d’une enveloppe de 1,1 milliard d’euros sur cinq ans pour financer le programme Ambition bio 2022. Objectif : atteindre 15 % de surface agricole utile cultivée en bio et 20 % de produits labellisés bio en restauration collective publique (ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation 2018). Des mesures nécessaires pour préserver notre environnement et notre santé.

 

 Les labels Bio


Derrière chaque label se cache un cahier des charges. AB France et Agriculture biologique européenne ont les mêmes exigences, interdisant l’utilisation des pesticides de synthèse. Ils fixent aussi un pourcentage maximum de 0,9 % d’OGM, et les produits transformés doivent contenir au moins 95 % d’ingrédients certifiés bio. D’autres labels, bio ou écologiques (“écolabels”), vont plus loin, en imposant par exemple une provenance nationale, des pratiques spécifiques favorisant la biodiversité, la fertilité des sols et le bien-être animal ou encore des revenus équitables pour les producteurs. Entre deux produits bio, préférons les denrées locales et de saison.

Mobilisation internationale contre les néonicotinoïdes

À l’initiative du scientifique britannique Dave Goulson, 233 chercheurs internationaux, signent un appel dans le journal Science pour inviter les États du monde à restreindre rapidement l’usage des insecticides néonicotinoïdes responsables en partie du déclin massif de la biodiversité. Ils insistent sur la nécessité de ne pas remplacer les néonicotinoïdes interdits (notamment suite au récent vote du parlement européen) par des produits qui auraient les mêmes effets sur la biodiversité.

 

Cette mobilisation de la communauté scientifique s’appuie sur de nombreux travaux de recherche récents et relaye les alertes lancées par l’Ipbes à l’occasion des évaluations sur les pollinisateurs ou des évaluations régionales de la biodiversité et des services écosystémiques.

 

La FRB invite à relire le rapport de son Conseil scientifique “Biodiversité et néonicotinoïdes, revisiter les questions de recherche” ainsi que la Note de la FRB “Sortir de la dépendance aux pesticides”, documents disponibles ci-dessous.

La biodiversité favorise-t-elle la productivité des écosystèmes ?

Certains services essentiels à la vie et au bien-être humain fournis par les écosystèmes comme la production de nourriture, de combustibles, l’épuration ou la mise à disposition de l’eau, la production d’oxygène, la régulation des maladies sont le produit de processus biologiques rendus possibles par la diversité des organismes vivants qui les peuplent. À partir des années 1990, le déclin accéléré des espèces sauvages a suscité un effort concerté pour répondre à la question suivante : comment les changements dans la diversité biologique affectent-ils le fonctionnement des écosystèmes et la production de biens et services ?

Des méta-analyses réalisées sur la base de plus de 500 expériences montrent comment la diversité génétique, spécifique et fonctionnelle, influence le fonctionnement des écosystèmes. Elles ont pu mettre en évidence que des dispositifs expérimentaux incluant plusieurs espèces étaient, en moyenne, 50% plus efficaces et productifs que des systèmes mettant en jeu une seule espèce, et qu’ils étaient plus à même de fournir des biens et services essentiels.

 

L’idée que la biodiversité est le moteur du fonctionnement des écosystèmes, quoi qu’assez intuitive, n’avait pas encore été objectivée et pouvait dans certains cas rester controversée. Des critiques ont soutenu que les premières expériences réalisées ne contrôlaient pas de manière adéquate les variables confondantes, ce qui a conduit les chercheurs à améliorer leurs protocoles et leurs analyses au fil des années. Nonobstant ces améliorations, certains experts sont restés préoccupés par le fait que les expérimentations avaient été menées à des échelles trop petites, étaient trop limitées dans le temps et trop irréalistes dans leurs conditions pour être significatives dans le monde réel. D’autres ont suggéré que, bien que la biodiversité affecte les processus écosystémiques dans des expériences simplifiées, des effets similaires seraient peu probables dans la nature, ou seraient faibles comparés à la régulation de la productivité et de la stabilité des écosystèmes par les facteurs abiotiques, un processus bien documenté.

 

Les deux principales questions à résoudre restaient donc de déterminer :

  • ces différentes études sont-elles capables d’isoler statistiquement les effets de la biodiversité de ceux des autres facteurs environnementaux comme la variation du climat et des ressources qui contrôlent la fertilité des écosystèmes ?
  • est-ce que les effets de la biodiversité mis en évidence dans les expérimentations se produisent également dans la nature et, dans l’affirmative, sont-ils importants ou insignifiants ?

 

Ces questions étaient restées non résolues en partie parce que l’identification des causes, sans passer par des expérimentations, est notoirement difficile dans le cas de systèmes où les forçages sont complexes, en interaction et souvent non linéaires.

Pour lever ces interrogations, les auteurs présentent une synthèse de 133 estimations du rôle de la biodiversité dans la productivité des écosystèmes provenant de 67 études empiriques ayant mesuré la biodiversité et le fonctionnement des écosystèmes naturels dans 623 464 sites d’échantillonnage dans le monde.

Ces études ont bénéficié de nouvelles avancées analytiques pour quantifier les effets des espèces ou de la diversité fonctionnelle sur le fonctionnement des écosystèmes après contrôle statistique des co-variables environnementales. Les auteurs se sont concentrés sur la biomasse1 et la production à l’échelle des communautés en tant que fonctions écosystémiques, car ce sont les variables de réponse les plus fréquemment mesurées dans les expérimentations passées, et elles sont fondamentalement importantes pour la fourniture de presque tous les biens et services écosystémiques.

 

La synthèse de données a abordé trois questions :

  • les effets de la biodiversité sur la production de biomasse sont-ils détectables dans les systèmes naturels et, si oui, sont-ils en cohérence avec les prédictions des expérimentations et la théorie correspondante ?
  • les effets de la biodiversité dans les systèmes naturels sont-ils d’une ampleur comparable à ceux estimés dans des expérimentations contrôlées à petite échelle ?
  • comment les effets de la biodiversité se comparent-ils aux effets d’autres facteurs environnementaux majeurs à l’origine de la production de biomasse des écosystèmes ?

 

Premièrement, l’étude montre qu’une biodiversité plus élevée est communément associée à une production plus élevée de biomasse dans les écosystèmes naturels et que cette relation positive a tendance à être statistiquement plus significative lorsque les co-variables environnementales sont contrôlées.

Cette constatation va à l’encontre d’une critique courante des études de terrain reliant la biodiversité à la productivité, qui est que les corrélations entre la richesse spécifique et la biomasse des communautés pourraient n’être qu’un effet collatéral des conditions environnementales qui améliorent simultanément la diversité et la productivité. Si cette hypothèse de covariance était vraie, les effets apparents de la biodiversité sur la productivité devraient s’affaiblir ou disparaître lorsque les facteurs environnementaux sont pris en compte. Or, l’analyse montre le contraire. Parmi les études qui ne tenaient pas compte des co-variables, 69% ont détecté une relation significative entre la biodiversité et le fonctionnement des écosystèmes, tandis que cette proportion atteignait 82% lorsque les co-variables environnementales étaient contrôlées statistiquement. Pour tenir compte de la non-indépendance potentielle des données dans certaines études, les auteurs ont effectué 10 000 tirages au hasard et recalculé la proportion des études montrant des effets de diversité significatifs avec et sans prise en compte des co-variables. Ce test de ré-échantillonnage a confirmé qu’une proportion significativement plus élevée d’effets de diversité était détectée après la prise en compte des co-variables.

 

Deuxièmement, les auteurs ont constaté que, dans 75% des études, la relation entre la diversité et la production de biomasse était positive lorsqu’on contrôlait les co-variables, la plupart augmentant de façon monotone.

Ces résultats correspondent à des prédictions a priori de la théorie écologique ainsi qu’aux résultats de la plupart des expérimentations. Toujours selon une approche de ré-échantillonnage, la proportion d’études montrant des effets positifs de la diversité était significativement plus élevée parmi les études qui contrôlaient les co-variables environnementales, alors que les effets non significatifs étaient moins nombreux (P = 0,03) et que les effets négatifs sont restés inchangés (P = 0,33). Par conséquent, non seulement les observations reflètent qualitativement les résultats des expérimentations antérieures sur la biodiversité, mais l’accord entre les observations et les expérimentations augmente après la prise en compte des co-variables environnementales.

 

Après avoir réalisé un important travail afin de vérifier que les données des différentes études étaient comparables, les auteurs ont analysé l’intensité des effets de la biodiversité sur la productivité de la biomasse dans la nature. Malheureusement, dans de nombreux cas, les effets de la richesse spécifique sur la production de biomasse n’ont pas pu être croisées. Après élimination d’un certain nombre d’études les auteurs ont pu toutefois identifier des mesures comparables de l’incidence de la biodiversité pour quatre cas particuliers :

  • les effets de la richesse algale sur la production de biomasse phytoplanctonique ;
  • les effets de la richesse en plantes herbacées sur la biomasse des prairies ;
  • les effets de la richesse des essences forestières sur la production d’arbres ;
  • les effets de la richesse en invertébrés herbivores sur la biomasse algale dans les systèmes de zostères marines.

 

Les effets de la biodiversité dans les écosystèmes naturels se sont révélés plus forts que ceux documentés dans des expérimentations contrôlées pour les quatre comparaisons. Ce résultat résulte pour partie de l’éventail plus large de la diversité présente dans les études d’observation par rapport aux expérimentations.

Étant donné que les écosystèmes naturels présentent souvent des associations plus fortes entre la biodiversité et la production de biomasse que celles documentées dans les expérimentations, les auteurs ont étudié l’importance du rôle de la biodiversité par rapport aux facteurs abiotiques associés au changement global. Ils ont identifié 28 études de terrain qui ont fourni 65 estimations dans lesquelles les auteurs quantifiaient simultanément les effets statistiques de la biodiversité et des variables climatiques (généralement la température) sur la biomasse ou la productivité, et 10 études avec 22 estimations qui quantifiaient simultanément les effets de la biodiversité et la disponibilité des éléments nutritifs (généralement l’azote).

Lorsque les études séparaient statistiquement les effets, la biodiversité avait une incidence supérieure aux variables climatiques dans 51% des estimations de terrain et supérieure à celle des variables relatives aux éléments nutritifs dans 64% des estimations. Ces résultats restent robustes après la prise en compte de la non-indépendance des données (test de ré-échantillonnage). Étant donné que les travaux d’observation couvrent différentes aires latitudinales et longitudinales, la gamme des co-variables abiotiques n’est pas directement comparable dans toutes les études. Cependant, on note que plusieurs études qui vont de l’échelle continentale à l’échelle mondiale ont mis en évidence des effets de la biodiversité comparables ou plus forts que ceux du climat.

 

Compte tenu du scepticisme relatif à l’idée que la diversité des espèces puisse affecter la productivité des écosystèmes naturels, la force et la cohérence des résultats présentés ici n’étaient pas prévisible. Dans tous les cas, les auteurs ont démontré l’inverse des opinions exprimées pendant longtemps dans la littérature écologique. Les écosystèmes riches en espèces présentaient généralement une biomasse et une productivité plus élevées dans les données d’observation de terrain pour un large éventail de taxons et d’écosystèmes, y compris les plantes des prairies, les arbres, le phytoplancton et le zooplancton des lacs et les poissons marins.

 

Les associations positives observées entre la biodiversité et la production de biomasse dans la nature étaient :

  • plus fortes lorsque les co-variables étaient comptabilisées,
  • plus fortes que les effets de biodiversité documentés dans des expérimentations contrôlées,
  • et comparables ou plus fortes que les associations entre la productivité et le climat ou la disponibilité des éléments nutritifs qui sont considérés comme deux des facteurs majeurs influençant la structure et le fonctionnement des écosystèmes, et comme les principaux moteurs du changement global.

 

Ces résultats corroborent ceux d’une récente synthèse de données expérimentales, citée par les auteurs, démontrant que les effets de la biodiversité étaient comparables dans leur ampleur à ceux des principaux facteurs du changement mondial.

 

Ces résultats permettent d’étendre à un large éventail d’écosystèmes des conclusions similaires basées sur les données d’observation de forêts et de plantes de zones arides.

En effet, toutes les études incluses dans la présente synthèse ont utilisé des approches statistiques conçues  b. De plus, toutes les études incluses ici impliquaient des gradients de diversité résultants des processus d’assemblage de communautés naturelles, ce qui permettait de réfuter l’argument ancien selon lequel les effets de diversité sur la productivité sont des artefacts des combinaisons d’espèces aléatoires utilisées dans les expériences.

 

Comme pour toutes les analyses basées sur des données non expérimentales, on ne peut pas complètement exclure la possibilité que les études examinées aient négligé une ou plusieurs variables environnementales importantes augmentant la diversité et la production en parallèle, générant ainsi une corrélation parasite (non causale) entre elles. Les auteurs considèrent toutefois qu’il est peu probable que les différents écologues impliqués dans toutes ces études n’aient pas pris en compte les principaux moteurs de la production de biomasse dans les écosystèmes qu’ils étudient et connaissent bien.

Une limitation plus réaliste de cette synthèse est que, sauf rares exceptions, les études disponibles n’ont pas abordé le potentiel de rétroaction entre la richesse spécifique, la biomasse et les facteurs environnementaux tels que les ressources. De telles rétroactions pourraient générer des associations plus complexes entre la diversité et la productivité, et l’évaluation de leur fonctionnement dans la nature doit être un objectif pour les recherches futures.

 

En conclusion, la cohérence des résultats pour plusieurs taxons et écosystèmes au sein de centaines d’expérimentations et leur concordance avec les prévisions théoriques concourent collectivement à conclure que la biodiversité joue un rôle majeur en soutenant la productivité des écosystèmes terrestres.

Au regard de ces différents résultats et en lien avec l’utilisation de solutions fondées sur la nature, il est donc important que la biodiversité soit pleinement prise en compte dans les décisions de gestion et surtout dans les trajectoires de transformation de nos modèles agricoles, comme un facteur majeur de réussite de la transition agro-écologique.

 

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1. La biomasse est la masse des organismes vivants dans un biotope particulier. 

#ScienceDurable – Plaidoyer pour les forêts mélangées

La déforestation massive est une réalité sur l’ensemble des continents. Longtemps cantonnée aux forêts tropicales humides du bassin de l’Amazone et de l’Asie du Sud Est, elle concerne maintenant le bassin du Congo et même l’Europe, où la taïga russe est touchée. Dans son rapport de 2015 sur l’état de la ressource forestière dans le monde, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) estime que 3,3 millions d’hectares de forêts sont perdus chaque année, soit 6 hectares ou encore 9 terrains de football chaque minute. Les sources non gouvernementales sont encore plus pessimistes, évaluant la perte de surface forestière à 30 millions d’hectares en 2016.

 

 

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Sortir de la dépendance aux pesticides

Les conséquences de l’usage de pesticides sur la biodiversité se répercutent à tous les niveaux de la chaîne trophique
L’action des pesticides ne se limite pas uniquement aux espèces cibles ; elle est à l’origine d’un grand nombre d’effets en cascade non maitrisés, qui se répercutent tout au long des chaînes trophiques. Les pollinisateurs sauvages sont ainsi directement affectés par la présence d’insecticides, mais les recherches démontrent qu’il en est de même pour les oiseaux qui consomment ces insectes ou des graines contaminées ou encore des mammifères en contact répétés avec des pesticides présents dans l’environnement. L’ensemble de l’écosystème est donc affecté, avec des conséquences dramatiques sur la biodiversité et les ressources alimentaires.

Les risques liés à l’usage des pesticides sont actuellement sous-estimés
Les méthodes d’évaluations des risques liés aux pesticides se focalisent généralement sur une espèce d’intérêt plutôt que sur l’écosystème dans sa globalité. Elles ne prennent pas en compte leurs effets indirects et synergiques, pourtant prépondérants, ni les effets longs termes ou des faibles doses. L’usage massif de pesticides a aussi un effet boule de neige : il entraîne le développement de résistances chez les espèces cibles. Un usage de plus en plus important de produits est donc requis pour maintenir un même niveau d’efficacité, entraînant par la même occasion un coût croissant pour l’agriculteur.

Des solutions existent pour limiter voire éviter l’usage des pesticides
Une réduction d’usage des produits phytosanitaires ne compromet pourtant pas la viabilité des exploitations : des études ont ainsi montré qu’une diminution de 30% des pesticides pourrait même conduire à une rentabilité équivalente ou meilleure.
Il est donc possible et urgent de sortir de la dépendance aux pesticides et de l’inertie politique sur ce thème.

La Fondation pour la recherche sur la biodiversité préconise plusieurs solutions parmi lesquelles :
Un soutien accru à la recherche afin de mieux comprendre et évaluer les effets additifs et conjoints des pesticides, leur éco-dynamique au cours du temps et des risques liés à leur mésusage,
une meilleure application du principe pollueur payeur afin que tous les impacts des pesticides soient compensés par la restauration des écosystèmes et pas uniquement ceux qui concernent la qualité de l’eau (pollution de sols, impacts sur les biodiversité etc…),
un découplage des activités de distribution et de conseil des produits phytosanitaires,
une accélération de la mise à disposition de méthodes et produits alternatifs (notamment non-chimiques) aux pesticides,
Le développement d’un fonds de compensation en vue d’une approche assurantielle des risques
L’intégralité de la note détaillant les effets des pesticides et les solutions alternatives à leur usage est disponible ici.

Sortir de la dépendance aux pesticides

Une étude récente publiée dans la revue scientifique Plos One a révélé que 75% de la biomasse des insectes volants a disparu en moins de 30 ans en Allemagne. L’intensification agricole et en particulier l’usage des pesticides est la cause probable de ce déclin vertigineux, loin devant d’autres facteurs de pression tels que le changement climatique, l’augmentation de la population humaine ou encore le changement d’usage des terres. Face à ce constat, est-il possible de réduire voire de se passer des pesticides sans impacter pour autant les rendements de la filière agricole ?

 

La Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) s’est penchée sur ces questions au travers de la Note : Sortir de la dépendance aux pesticides, consultable ci-dessous.

Biodiversité et Agriculture : séparation ou réconciliation ? Une question centrale, des réponses contingentes

Le devenir de l’agriculture et de la biodiversité sont intimement liés. Les impacts de l’agriculture sur la biodiversité sont massifs : transformation des habitats, prélèvements de biomasse et d’eau (plus de 80 % des prélèvements dans ces deux cas), eutrophisation et écotoxicité, émissions de gaz à effet de serre.

Réciproquement, la biodiversité est indispensable à l’agriculture. Elle contribue au maintien de la diversité des ressources génétiques des espèces cultivées et élevées, elle est nécessaire au fonctionnement des agroécosystèmes, à la fertilité des sols et à la pollinisation. Elle offre par ailleurs des perspectives agronomiques majeures, en termes de maintien et d’amélioration du contrôle biologique des ravageurs, d’accroissement de la fertilité des sols, de contribution potentielle à la sécurité alimentaire, de réduction de la pauvreté dans le monde agricole et plus largement rural. En conséquence, si les enjeux liés à la conservation de la biodiversité n’apparaissent directement que dans l’ODD 15, on peut cependant retrouver leur présence indirecte dans près de la moitié des ODD, notamment ceux concernant l’agriculture (ODD 1, 2, 8, 10, 12 et 13).

 

Face à la diversité des enjeux qui lient agriculture et biodiversité, des réponses contrastées sont proposées. C’est notamment l’alternative entre séparation des espaces agricoles et des territoires dédiés à la biodiversité (land sparing en anglais) ou la réconciliation au sein des milieux ruraux des enjeux de production alimentaire et de conservation de la biodiversité (land sharing en anglais). Dans cet article, les auteurs reviennent brièvement sur ces deux options et examinent les points de controverse qui semblent représentatifs des enjeux de la transition écologique.

 

 

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Néonicotinoides : des nouvelles connaissances scientifiques sur leur impact sur les abeilles

Les néonicotinoïdes sont des insecticides, c’est-à-dire des produits chimiques dont l’objectif est de tuer des insectes dit « cibles », ravageurs des monocultures commerciales modernes. Les molécules comme le thiamethoxam, l’imidaclopride ou le clothianidine sont des insecticides systémiques, c’est-à-dire qu’elles percolent dans les tissus des plantes traitées, soit directement par enrobage des semences, soit par épandage sur les sols.

 

Les connaissances sur la responsabilité des néonicotinoïdes au déclin des pollinisateurs sont de plus en plus nombreuses. Néanmoins, même si de nombreuses études ont démontré les effets toxiques des néonicotinoïdes sur les pollinisateurs et autres espèces animales, ou encore leurs effets négatifs sur la santé des abeilles y compris à des doses sub-létales, il est toujours délicat de discriminer leurs effets spécifiques de ceux d’autres pressions comme la perte des habitats, le changement climatique ou les pathogènes. Par ailleurs, si certaines études ont démontré que ces molécules augmentaient la mortalité des colonies d’abeilles domestiques en réduisant leur capacité à entretenir la ruche et le succès reproductif des bourdons sauvages et des abeilles solitaires, d’autres n’ont décelé aucun effet. Peu d’informations sont disponibles sur la survie des colonies sur le long terme dans un contexte d’exposition à ces pesticides. Il est en effet difficile de déterminer à quel point ces molécules affectent les abeilles et plus largement leurs colonies sur le long terme.

 

Les principales critiques portées aux études antérieurs sur les néonicotinoïdes étaient que les expérimentations n’avaient pas été conduites dans des conditions d’exposition réalistes, similaires à celles retrouvées au champ. De plus, les études toxicologiques n’utilisaient ni des doses d’insecticides ni des durées d’exposition réalistes, ces doses et durées n’ayant jamais été réellement quantifiées alors qu’elles constituent deux paramètres clés pour établir des liens de cause à effet. Ces différents éléments d’incertitude ont été repris dans l’évaluation relative à la pollinisation, les pollinisateurs et la sécurité alimentaire, publiée en 2016 par la plate-forme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques.

 

Dans ce contexte de présomption d’effets négatifs avérés des insecticides néonicotinoïdes sur les abeilles, qui a conduit à l’interdiction de ces produits en France (loi du16 aout 2016 pour la reconquête de la biodiversité), deux articles scientifiques ont été publiés le 30 juin dernier dans le journal Science.

 

Tsvetkov et al. ont ainsi démontré qu’au Canada, en zone de production de maïs, les abeilles domestiques étaient exposées aux néonicotinoïdes pendant quatre mois, correspondant à la majorité de leur période d’activité et ce, à des niveaux significatifs malgré l’obligation faite aux agriculteurs d’utiliser des lubrifiants pour réduire les émissions de poussières contaminées en pesticides. Ils ont mis également en évidence que ces molécules, aux doses de terrain, avaient de nombreux effets négatifs préoccupants pour les colonies d’abeilles domestiques expliquant leur affaiblissement, et à terme leur dépérissement : une mortalité précoce des butineuses de 23% supérieure à celle des colonies non contaminées, une propension à l’essaimage combinée à une difficulté à élever une nouvelle reine réduisant le temps efficace de ponte et une perte au fil du temps de la capacité hygiénique de la colonie. Enfin, les scientifiques ont établi qu’en présence du boscalide, (un fongicide commun utilisé notamment en association avec certains insecticides), la toxicité de deux néonicotinoïdes, la clorthianidine et le thiamothoxam étaient presque doublée.

 

En conduisant plusieurs études de terrain en Hongrie, Allemagne et Royaume Unis pour évaluer les effets des insecticides néonicotinoïdes sur trois espèces de pollinisateurs, Woodcock et al. ont, quant à eux, démontré que l’exposition aux néonicotinoïdes a des effets majoritairement négatifs sur le potentiel reproductif interannuel des insectes étudiés et que même si les taux d’exposition aux néonicotinoïdes sont faibles, ils provoquent des impacts sublétaux susceptibles de diminuer la survie à long terme des populations. Des effets négatifs associés au traitement par la clothianidine ont été observés chez les ouvrières d’Apis mellifera, en Hongrie, conduisant à des colonies plus petites au printemps suivant avec un taux de déclin de 24%. Quant aux espèces sauvages Bombus terrestris et Osmia bicornis les auteurs ont démontré que l’exposition aux résidus de néonicotinoïdes, principalement ceux stockés dans les nids et découlant de la contamination environnementale généralisée, diminuait pour les premiers la production de reines et pour les seconds la production d’œufs. Ces différents impacts altérant le succès reproducteur des populations de pollinisateurs domestiques ou sauvages réduisent la capacité de ces espèces à établir de nouvelles populations d’année en année et pourraient expliquer leurs déclins, actuellement largement documentés. Par ailleurs, les résultats obtenus dans trois pays différents démontrent l’importance des facteurs spécifiques et locaux qui expliquent probablement les résultats discordants des études antérieures conduites dans un seul pays ou sur un nombre de sites réduit.

 

Consultez, dans les ressources ci-dessous, les synthèses des deux articles. 

Biodiversité et néonicotinoïdes : revisiter les questions de recherche

Premières sur la liste des espèces pour lesquelles un effet négatif des néonicotinoïdes a été démontré, les abeilles domestiques ont depuis ouvert le chapitre à une pléiade d’autres groupes d’animaux comme les invertébrés terrestres et aquatiques, les poissons, les amphibiens, les reptiles ou encore les oiseaux insectivores, les rongeurs et les chauve-souris.

Par ailleurs, l’air, l’eau, les sols, les habitats naturels sont eux aussi contaminés. Des études ont également révélé des traces de ces insecticides dans les aliments. Les cultures non traitées ainsi que les plantes sauvages aux abords des cultures peuvent elles aussi contenir des néonicotinoïdes.

 

Le rapport souligne que la recherche sur les effets systémiques de ces substances et de celles issues de leur dégradation est aujourd’hui insuffisante. Ce qui induit une sous-estimation des conséquences néfastes pour la biodiversité. Le rapport invite à développer des recherches à des échelles d’organisation écologiques plus larges que l’individu : (1) les populations d’organismes et leur démographie, (2) les communautés d’organismes, (3) les écosystèmes.

 

Le rapport appelle à ce qu’une réflexion scientifique soit engagée sur les effets des néonicotinoïdes sur la biodiversité en général et non pas seulement au sein des agrosystèmes et sur des espèces cibles ou emblématiques. Les relations interspécifiques de compétition, prédation ou encore de mutualisme impliquent que l’effet direct d’un insecticide sur une espèce donnée se traduit nécessairement par des effets indirects sur des espèces en interactions avec cette espèce cible. Si les études se focalisent sur la contamination des insecticides sur des espèces cibles ou périphériques, les cascades trophiques déclenchées par les effets des insecticides sur celles-ci restent encore très largement inconnues.

 

En outre, le conseil scientifique de la FRB invite, à la lumière des effets déjà avérés de ces molécules sur la biodiversité, à soutenir de manière beaucoup plus active la recherche sur des alternatives aux néonicotinoïdes et plus particulièrement sur des alternatives non-chimiques reposant sur de nouvelles pratiques agricoles, relevant notamment de l’agro-écologie.

 

Le rapport est téléchargeable dans les ressources ci-dessous. 

La thématique “Biodiversité et agriculture” dans les projets de recherche et développement français

La FRB et l’ACTA ont noué un partenariat qui a permis de réaliser une analyse des projets de R&D agricole CASDAR* portant sur la biodiversité.

 

Ce rapport rassemble les principaux résultats, à travers une présentation :

  • de l’évolution de la prise en compte de la biodiversité et des approches adoptées dans les projets, depuis 2004 ;
  • des acteurs impliqués et de leurs réseaux de collaborations, dans le paysage global de la recherche à l’interface agriculture / biodiversité.

 

Cette étude souligne la grande diversité des structures impliquées sur ce thème, bien au-delà des seuls acteurs de la recherche publique académique. Elle met ainsi en évidence un vivier de partenaires potentiels, mobilisables dans les projets à venir.

 

Le rapport complet est consultable dans les ressources ci-dessous.

 

 

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* CASDAR : Compte d’affectation spéciale pour le développement agricole et rural

Quels indicateurs pour suivre la diversité génétique des plantes cultivées ?

Face aux exigences d’une agriculture durable et aux changements globaux, nous devrons mieux préserver et utiliser la diversité génétique des espèces agricoles. Leur diversité est un élément clé du devenir des agroécosystèmes. Les principaux textes internationaux (CDB, FAO) et nationaux (SNB) portant sur la biodiversité, soulignent que les changements de diversité biologique restent mal caractérisés, notamment pour les plantes cultivée.

 

La FRB propose un « tableau de bord » d’indicateurs inédit : Pour la première fois, ce tableau de bord intègre des données génétiques et des données de répartition des variétés de blé sur le territoire français au cours du XXe siècle. Vous pouvez retrouver le rapport complet, le résumé de l’étude et les annexes en téléchargement ci-dessous.

 

  • Les résultats

 

Cette étude montre une homogénéisation de la diversité génétique cultivée, qui s’explique par la disparition de la diversité à l’intérieur des variétés cultivées au cours du XXe siècle. Cette homogénéisation concerne aussi la répartition des variétés entre et au sein des territoires marqués par leur histoire agricole. Elle pose la question de la fragilité des cultures de blé vis à vis des changements de l’environnement en cours et à venir (pathogènes, sécheresse, pratiques agricoles, etc.).

 

Ce type d’étude permet de retracer les conséquences de l’évolution de l’agriculture et des filières associées sur la diversité des plantes cultivées. L’application de ces indicateurs est un formidable outil pour éclairer les décideurs sur les actions visant à maintenir, aux échelles nationales et territoriales, la diversité des ressources génétiques cultivées.